La surenchère syndicale ou la mise à mort de l’enseignement public

La surenchère syndicale ou la mise à mort de l’enseignement public

 

Si on voulait mettre à mort notre système public d’enseignement qui fait la fierté de la Tunisie depuis l’indépendance, on ne s’y prendrait pas autrement. Alors que la rentrée est une fête républicaine que les petits comme les grands attendent avec impatience après les longues vacances estivales voilà qu’elle devient le cauchemar des élèves comme des parents. A cause d’une surenchère syndicale qui n’a pas sa raison d’être dans un pays confronté à des difficultés insurmontables et qu’on veut coûte que coûte envoyer au fond de l’abîme.

Si le droit à la revendication est reconnu par la Constitution, car telle est la finalité des syndicats, il est scandaleux que ces derniers en fassent un usage abusif. Ce qu’ils revendiquent désormais, ce ne sont pas des majorations salariales, car elles ont été honorées parfois plus que de raison. Ni de meilleures conditions de travail. Ce que tout le monde aurait compris. Ils ne réclament rien de moins que la cogestion du système éducatif. Ils veulent avoir un droit au chapitre sur tout. A partir des programmes d’enseignement jusqu’au calendrier des vacances scolaires en passant par le maintien ou non des collèges techniques et j’en passe.

Il est évident que Lassâad Yacoubi, secrétaire général du syndicat général du secondaire et son compère du primaire Mastouri Gammoudi veulent l’un et l’autre et en même temps faire office de ministre de l’Education alors que le responsable en titre au gouvernement ne serait que le pantin qu’ils agitent quand ils veulent, comme ils veulent et de la manière dont ils l’entendent.

Néji Jelloul, le ministre de l’Education a beau accepter leurs revendications les plus extrêmes et leur donner des gages, ils en veulent toujours plus. Ils se réveillent chaque matin pour se dire : que faire pour mettre en difficulté ce « pauvre ministre ». De surenchère en surenchère, ils ont fini par lasser les Tunisiens,  par les rendre furieux non seulement contre eux, mais contre leur centrale qui les laisse faire sans jamais leur dire qu’il y a un temps pour chaque chose, un temps pour la revendication juste et justifiée et un temps pour le travail et la rentabilité.

Les Tunisiens sont fatigués. Car ils ont conscience que ces syndicalistes de la 25ème heure sont en train de prendre leurs enfants en otages. Déjà avant que l’année scolaire ne commence,  ils ont annoncé une suspension des cours le 21 septembre c'est-à-dire une semaine tout au plus après la rentrée. Les risques sont grands de voir une année scolaire perturbée de bout en bout avec  des grèves tournantes ou tout juste perlées et des débrayages à tout bout de champ.

Ce faisant, ces syndicalistes savent-ils qu’ils sont en train de mettre en danger le niveau de notre enseignement déjà en piètre état. Se rendent-ils compte qu’ils sont en train de scier la branche sur laquelle ils sont assis. A moins que leur but ne soit d’encourager les parents à inscrire leurs enfants dans l’enseignement privé qui connait d’ailleurs un essor remarquable. Grâce à ces syndicats inconscients.  Il est pour le moins paradoxal que ce sont les syndicats qui vont favoriser l’expansion de l’enseignement privé. Selon les chiffres, l’effectif et le nombre d’écoles dans cet enseignement ont doublé en moins de cinq ans. Ils vont connaitre une croissance exponentielle dans le futur proche.

L’enseignement public est déjà sinistré. Pourquoi lui en  rajouter une couche qui va le détruire irrémédiablement. Il est pour le moins curieux que les syndicats qui se réclament de l’organisation de Farhat Hached soient en train de détruire l’un des fondements de la République. Celui de l’égalité des chances pour tous.

Ces syndicalistes se rendent-ils, au moins, compte que s’ils continuent sur leur lancée, ce sera la mise à mort de l’enseignement public ?

Aux dernières nouvelles, une délégation de l’UGTT conduite par Houcine Abbassi s’est engagée devant le chef du gouvernement qui l’a reçue mardi 6 septembre d’assurer la réussite de la rentrée scolaire. Mais comment va-t-elle s’y prendre avec ses syndicalistes fossoyeurs de l’enseignement public ? Si la centrale y parvient, ce sera formidable. Mais  tout le monde est sceptique.

RBR

 

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