Mis en minorité au sein du Nidaa, Hafedh Caïd Essebsi se tourne vers son père ?

Mis en minorité au sein du Nidaa, Hafedh Caïd Essebsi se tourne vers son père ?

 

Les membres du gouvernement appartenant à Nidaa Tounés et des députés du mouvement entourant Youssef Chahed à Dar Dhiafa à Carthage, la photo n’est pas passée inaperçue. Surtout qu’y figurait le chef du bloc nidaïste, Sofiène Toubal.

Il a beau faire savoir par ses proches pour faire bonne figure, qu’il a donné son « feu vert » à cette rencontre, le directeur exécutif de Nidaa Hafedh Caïd Essebsi ne décolère pas contre une initiative qui lui est restée en travers de la gorge.

Car ce sont bien les députés nidaïstes membres de la commission constituée pour évaluer l’activité du gouvernement qui ont demandé à rencontrer Youssef Chahed. Celui-ci n’a pas mis beaucoup de temps pour donner suite à leur requête, sachant tout le bien qu’il peut en récolter.

En créant ladite commission, Hafedh Caïd Essebsi voulait qu’elle fasse le réquisitoire du gouvernement de quoi donner de l’eau au moulin des opposants à celui-ci. Mal lui en prit, puisqu’en demandant à rencontrer Youssef Chahed elle a tourné casaque s’alignant désormais sur la position de ce dernier.

La déclaration de la députée Ons Hattab indiquant que l’orientation générale au sein du bloc de Nidaa est en faveur du maintien de Youssef Chahed à charge pour celui-ci d’introduire un remaniement au sein de son équipe a été l’élément qui a aussi ajouté à l’ire du chef du parti et de ses proches.

Le porte-parole de Nidaa, Mongi Harbaoui a beau expliquer que les positions du parti son celles exprimées par les communiqués de ses instances, il ne fait pas de doute que le bloc du Nidaa commence à échapper au contrôle de la direction entourant Hafedh Caïd Essebsi.

D’ailleurs pour discréditer la députée de Kairouan, on a fait publier qu’elle serait concernée par un poste ministériel dans l’équipe remaniée de Youssef Chahed. Ambiance. Elle n’est pas la seule à prendre une position contre la direction du Nidaa.

La députée Fatma Mseddi l’a précédée en demandant au président fondateur Béji Caïd Essebsi rien moins que le gel de l’actuelle direction. Elle prend soin néanmoins de mettre dos-à-dos Hafedh Caïd Essebsi et Youssef Chahed responsables selon elle de la crise politique que vit le pays.

Mais malgré le fait qu’il soit mis en minorité au sein du bloc nidaïste à l’ARP, Hafedh Caïd Essebsi n’en démord pas. Il veut la tête de Youssef Chahed et il compte bien l’obtenir. C’est désormais vers son père le président de la République qu’il se tourne.

Celui-ci, estime-t-il, tient entre ses mains le sort de Youssef Chahed. Il lui suffit de lui demander de démissionner pour qu’il s’exécute comme l’a dit le chef d’Ennahdha Rached Ghannouchi. A défaut, le chef de l’Etat peut recourir à l’article 99 de la Constitution qui lui donne la faculté de requérir un vote de confiance pour le maintien du gouvernement. En fait c’est un vote de défiance qu’il réclame.

C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il est sorti du silence qu’il observe depuis l’allocution télévisée de Youssef Chahed du 29 mai dernier (dans laquelle celui-ci l’accuse de détruire Nidaa) pour démentir le conseiller de la présidence chargé des médias Firas Guefrech qui avait exclu cette possibilité dans un post publié sur sa page facebook. C’est faux, le président n’est pas au courant de ce post, s’est empressé d’écrire Hafedh Caïd Essebsi sur le même réseau social, une manière de laisser entendre que le chef de l’Etat n’exclut pas le recours au fameux article.

Mais le texte de Guefrech qu’il n’aurait pas écrit sans en avoir le feu vert du directeur du cabinet présidentiel, Slim Azzabi, estime-t-on trône toujours en tête des publications du conseiller présidentiel sur sa page facebook.

Dans le même temps, Youssef Chahed fait comme si de rien n’était. On l’a vu prendre part aux côtés du président de la République aux cérémonies religieuses à la Mosquée Zitouna et lors de la prière de l’Aïd. Certes, ce sont des cérémonies où le protocole impose sa marque, mais on ne décèle pas le moindre problème entre les deux hommes qui semblent en totale harmonie.

Cela ne doit pas plaire à Hafedh Caïd Essebsi non plus. Mais ce qui risque d’être déterminant c’est la position de l’UGTT et de son secrétaire général Noureddine Taboubi.

La centrale syndicale réclame à cor et à cri le départ de Youssef Chahed et elle n’est pas prête à changer d’avis. C’est pour quoi son patron a pris ombrage de la rencontre tenue par le chef du gouvernement avec les ministres et députés nidaïstes.

C’est pour cette raison qu’il s’est fendu d’un long communiqué dans lequel il souligne « l’urgence de changer la composition du gouvernement actuel et de nommer dans les plus brefs délais un nouveau chef du gouvernement pour sauver le pays de la crise politique, économique et sociale ».

Après « la trêve des confiseurs » qui s’achève lundi, la rentrée risque d’être animée. Dans ces conditions, la reprise du processus de Carthage 2 pourrait-elle être envisagée, dans la mesure où chaque partie campe sur sa position antérieure.

On remarque ainsi qu’Ennahdha n’est plus inflexible sur la question des personnes quand bien même elle plaide toujours pour la stabilité gouvernementale.

Mais l’intransigeance de l’UGTT serait-elle déterminante ?

Dans tous les cas on estime qu’il reviendra au président Béji Caïd Essebsi de trancher. Le ferait-il sur le vif ou laissera-t-il le temps au temps selon la formule qu’il aime emprunter à l’ancien président français Mitterrand ?

C’est là toute la question.

RBR

Votre commentaire