Pacte mondial sur les réfugiés: Quelle différence avec celui sur les migrants ? 

Pacte mondial sur les réfugiés: Quelle différence avec celui sur les migrants ? 

"Réfugié" et "migrant" Deux termes utilisés indifféremment pour décrire les millions de personnes dans le monde qui fuient un conflit ou recherchent de meilleures conditions de vie. Alors que l’ONU s’efforce de sécuriser des pactes mondiaux pour mieux les protéger, il est essentiel de comprendre les différences entre les deux.

Les Etats membres de l'Assemblée générale des Nations Unies, devraient approuver lundi 17 décembre le Pacte mondial pour les réfugiés. Ce nouvel accord international vise à apporter une réponse plus forte et plus juste aux grands mouvements de réfugiés et aux pays qui les accueillent, ces derniers comptant souvent parmi les plus pauvres du monde.

Ce Pacte a été conçu pour fournir un modèle robuste et systématique destiné à améliorer la vie des réfugiés et de leurs communautés d'accueil et est le résultat de deux années de consultations intensives. Un processus qui peut sembler familier à quiconque a suivi l'évolution du Pacte mondial sur les migrations (formellement connu sous le nom de Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et regulières) qui a été officiellement adopté à Marrakech, au Maroc, le 10 décembre 2018.

ONU Info a préparé ce guide pour expliquer la différence essentielle entre le statut de migrant et celui de réfugié, ainsi que les différences entre les deux pactes soutenus par l'ONU et conçus pour améliorer la vie de tous ceux qui se déplacent.

Un Pacte mondial sur les migrations a récemment été adopté. Pourquoi avons-nous besoin d'un autre accord ?
La Déclaration de New York adoptée en septembre 2016 a donné naissance à deux pactes : l'un sur les réfugiés et l'autre sur les migrants. Bien qu'il s'agisse de groupes de personnes vivant hors de leur pays d'origine, il existe des distinctions cruciales entre les termes « réfugié » et « migrant ». Les deux Pactes sont des accords de nature volontaire et ne sont pas des instruments juridiquement contraignants.

Quelle est la différence entre un migrant et un réfugié ?
Les réfugiés sont des personnes qui se trouvent en dehors de leur pays d'origine en raison de craintes de persécution, de conflits, de violences généralisées ou d'autres circonstances qui ont gravement perturbé l'ordre public et qui, par conséquent, nécessitent une protection internationale. La définition du réfugié figure dans la Convention de 1951 et dans les instruments régionaux relatifs aux réfugiés, ainsi que dans le Statut du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR).

Bien qu'il n'existe pas de définition juridique formelle du migrant international, la plupart des experts s'accordent pour dire qu’il s’agit d’une personne qui change de pays de résidence habituelle, quels que soient le motif de la migration ou le statut juridique. En règle générale, une distinction est faite entre les migrations à court terme et temporaires, couvrant les mouvements d’une durée comprise entre trois et douze mois, et les migrations de longue durée ou permanente qui se rapportent à un changement de pays de résidence pour une durée d'un an ou plus.

« Je suis un migrant mais je n’ai pas eu à risquer ma vie sur un bateau qui prend l’eau, ni à payer des trafiquants. Une migration sûre ne peut pas être limitée à l'élite mondiale », a déclaré le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres.

Cela signifie-t-il que la Convention sur les réfugiés n'est pas adaptée à son objectif ?
Le Pacte mondial pour les réfugiés repose sur – et ne remplace pas - le système juridique international en vigueur pour les réfugiés. Ce système comprend la Convention de 1951 sur les réfugiés et d'autres instruments juridiques internationaux sur les réfugiés, les droits de l'homme et le droit humanitaire.

« La Convention sur les réfugiés met l'accent sur les droits des réfugiés et les obligations des États, mais ne traite pas de la coopération internationale au sens large. Et c’est ce que le pacte mondial cherche à résoudre », explique Volker Türk, Haut-commissaire adjoint en charge de la protection au HCR. La Convention de 1951 ne précise pas comment partager la charge et la responsabilité, et c’est ce que fait le Pacte mondial. « Cela répond à l'un des principaux problèmes auxquels nous sommes confrontés depuis des décennies ».

Mais pourquoi avons-nous besoin d'un nouvel accord international ?
Fin 2017, il y avait près de 25,4 millions de réfugiés dans le monde, dont plus de la moitié avait moins de 18 ans. Aujourd’hui, 10 pays seulement accueillent 60% des réfugiés dans le monde. La Turquie à elle seule accueille 3,5 millions de réfugiés, plus que tout autre pays. En outre, la grande majorité des réfugiés dans le monde (85%) vivent dans des pays en développement confrontés à leurs propres problèmes d’économie et de développement. Par exemple, dix bailleurs de fonds gouvernementaux (y compris l’Union européenne) fournissent près de 80% des fonds du HCR et plus des deux tiers des demandes de réinstallation du HCR vont à seulement cinq pays. L’écart entre les besoins des réfugiés et les mesures prises pour les satisfaire est grand et s’agrandit.

Qui a décidé de créer ce Pacte ? L'ONU ? Le HCR ?
Non, cela a été décidé par les États membres. La Déclaration de New York sur les réfugiés et les migrants, adoptée par les États membres en septembre 2016, comportait deux étapes essentielles en ce qui concerne les réfugiés :

· Premièrement, les États membres ont adopté le Cadre global de réponse aux réfugiés, qui définit un large éventail de mesures à prendre par la communauté internationale pour faire face à une situation de réfugiés à grande échelle.

· Deuxièmement, les États membres ont convenus de continuer à améliorer les réponses internationales en œuvrant à l'adoption d'un Pacte mondial sur les réfugiés en 2018. Ils ont demandé au Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) de consulter les États membres et un large éventail de autres parties prenantes et de proposer un tel pacte. Le Pacte mondial proposé sur les réfugiés a été publié le 20 juillet 2018.

Comment le Pacte mondial sur les réfugiés a-t-il été négocié ?
Il a été mis au point dans le cadre d’un vaste processus de consultation multilatérale avec les États membres et d’autres parties prenantes.

Le 13 novembre 2018, la troisième commission de l'Assemblée générale des Nations unies sur les questions sociales, humanitaires et culturelles a approuvé la résolution affirmant le Pacte pour les réfugiés à une écrasante majorité et a transmis le texte à la plénière de l'Assemblée générale pour adoption, prévue pour le matin du 17 Décembre 2018.

Comment fonctionnera le Pacte mondial sur les réfugiés ?
Le Pacte mondial sur les réfugiés établit le cadre d’une réponse internationale plus forte, plus prévisible et plus équitable aux grandes situations de réfugiés.

Bien que non juridiquement contraignant, il guide la communauté internationale dans son soutien aux réfugiés et aux pays et communautés accueillant un grand nombre de personnes par la mobilisation de la volonté politique, l'élargissement de la base de soutien et la mise en place d'arrangements pour un partage plus équitables et prévisibles des charges et des responsabilités. 

« Les réfugiés sont une préoccupation internationale et une responsabilité partagée », a déclaré le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, Filippo Grandi. « Dans le Pacte, nous aurons pour la première fois un modèle pratique et exploitable, un ensemble d’outils permettant de traduire ce principe en action ».

« Des décennies de séparation des réfugiés, confinés dans des camps ou en marge de la société cèdent la place à une approche fondamentalement différente - inclure les réfugiés dans les systèmes nationaux, les sociétés et les économies de leurs pays d'accueil pendant le temps nécessaire, et leur permettre de contribuer à leurs nouvelles communautés et à assurer leur propre avenir, dans l’attente d’une solution à leur problème », a expliqué M. Grandi, soulignant que le Pacte mondial avait été créé avec la générosité de ces communautés.

Le Pacte mondial sur les réfugiés a quatre objectifs :

1. atténuer les pressions sur les pays qui accueillent un grand nombre de réfugiés;

2. renforcer l'autonomie des réfugiés;

3. élargir l'accès aux pays tiers des réfugiés par le biais de la réinstallation et d'autres voies d'admission;

4. soutenir les conditions permettant aux réfugiés de rentrer dans leur pays d'origine

Mon pays sera-t-il obligé d'accueillir des réfugiés ?
Pas plus que ce n'est déjà le cas. La Convention de 1951 sur les réfugiés met l'accent sur les droits des réfugiés et les obligations des États. Le Pacte mondial sur les réfugiés réaffirme ces normes et principes. Le Pacte n’a pas pour but de créer des charges ou des contraintes supplémentaires pour les pays accueillant un grand nombre de réfugiés, ni de modifier le mandat du HCR en matière de protection et de solutions. Il s’appuie sur le régime international des réfugiés mis en place depuis des décennies.

Mon pays accueille déjà de nombreux réfugiés? Allons-nous obtenir de l'aide?
Dans des contextes spécifiques de réfugiés à grande échelle, le Pacte mondial prévoit qu'un État hôte ou un pays d'origine peut demander l'activation par le HCR d'une plate-forme de soutien pour l'aider dans ses dispositifs de réponse nationaux. « Ce que nous voulons réaliser, c'est une très rapide mobilisation du soutien : soutien politique, financier et de réinstallation, de sorte que les pays - lorsqu'ils sont confrontés à une telle situation - sentent qu'ils ne sont pas seuls, qu'ils ne sont pas isolés. ou que personne ne s'en soucie », a déclaré M. Türk. « Que la communauté internationale se soucie de la population, mais aussi du pays touché. Et qu’elle soit solidaire et agisse avec eux. C'est vraiment le but ».

Quelle différence concrète le Pacte fera-t-il dans la vie des réfugiés ou des communautés qui les accueillent?
Le Haut-Commissaire assistant du HCR pour la protection a expliqué que si le Pacte était mis en œuvre, nous obtiendrions « une meilleure éducation des garçons et des filles réfugiés, ainsi qu'un meilleur accès aux services de santé pour tous les réfugiés et davantage de moyens de subsistance ». Les communautés d'accueil s'engageraient différemment avec les réfugiés, en s'éloignant des politiques de campement.

Les pays hôtes comme l’Ouganda, le Rwanda, l’Iran, ceux d’Amérique centrale ou le Liban - dotés d’infrastructures et de services de santé extrêmement sollicités par l’accueil d’un million de réfugiés - obtiendraient le soutien dont ils avaient besoin, non seulement du point de vue humanitaire, mais aussi du point de vue de la coopération au développement. « Et c’est ce qui est nouveau», a ajouté M. Türk.

En outre, le HCR a pour objectif d'obtenir davantage de lieux de réinstallation et de trouver plus de moyens de transférer les réfugiés dans des pays tiers - par exemple, par la réunification de la famille, des bourses d'études ou des visas humanitaires.

Mais si le pacte n’est pas juridiquement contraignant, peut-il vraiment faire la différence ?
Ce n’est pas contraignant, mais l’Assemblée générale des Nations Unies adoptera le Pacte mondial. « Une fois que cela est fait, cela témoigne d'un très fort engagement politique des 193 États membres, même s'il n'est pas juridiquement contraignant », a déclaré M. Türk, soulignant que « dans le monde d'aujourd'hui, c’est comme cela que fonctionne le multilatéralisme ».

Qui va financer tout cela ?
Le Pacte mondial inscrit la réponse dans une approche de partenariat beaucoup plus large. Il examine ce que le secteur privé, les communautés religieuses et les institutions financières internationales peuvent apporter sur la table. La Banque mondiale a mis en place un instrument financier spécifique pour les pays à faible revenu touchés par les déplacements forcés - 2 milliards de dollars sur plusieurs années - afin de traiter les conséquences socio-économiques des flux de réfugiés.

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