Quand une championne du "tourisme parlementaire" veut interdire sa discipline !

 Quand une championne du "tourisme parlementaire" veut interdire sa discipline !

Par Kaïs Ben Mrad

Si les députés de l'ancien régime de Ben Ali n'étaient que de simples marionnettes entre les mains du pouvoir et de son clan, les représentants actuels du peuple jouissent, il faut le reconnaître, d'un atout fort enviable: la liberté de parole et d'action. Une liberté souvent d'ailleurs mal comprise et mal utilisée amenant certains représentants du peuple à se comporter comme des collégiens à cullote courte distillant des idées et comportements indignes de la fonction de député. 

Combien de fois avons-nous assisté, tristes et désemparés, à des écarts de conduite, des échanges musclés, des insultes entre députés, et même des tentatives d'agression physique.

Mais ce n'est pas tout. Parmi les plus grands maux qui gangrènent notre assemblée, l'on retrouve l'absentéisme et "le tourisme parlementaire". Depuis l'élection en 2014 des membres de l'Assemblée des représentants du peuple (et même avant ceux de l'ANC), combien de séances plénières ont été reportées faute de quorum? Combien de députés font l'école buissonnière sans aucune justification? Ce qui dénote un manque de sérieux et d'engagement de bon nombre d'entre eux. Et le phénomène semble même s'aggraver malgré les mesures timides prises ça et là pour contrer ce phénomène.

Mais le phénomène le plus à la mode est désormais "le tourisme parlementaire". Passer allégrement d'un groupe parlementaire à un autre, d'un parti à un autre, est devenu le sport favori de la plupart de nos politiques. Selon les statistiques, plus d'un tiers des 217 membres de l'Assemblée nationale constituante s'y sont adonnés. Tandis que la proportion de députés ayant changé de couleur politique durant la législature de l'ARP atteint 60%.

Parmi ces spécialistes du tourisme politique, l'un d'eux vient de s'illustrer de la plus belle des manières. A tel point que l'on ne sait si on devrait en rire ou en pleurer. Vous l'aurez compris, nous faisons allusion à la députée Qalb Tounes, en l'occurrence Samira Chaouachi. 

La première vice-présidente de l'ARP vient de révéler, dans une interview accordée au journal "Al Maghreb" paru mercredi 20 novembre, qu'elle soumettra une proposition à l'Assemblée en vue d'interdire le tourisme parlementaire. Et l'ancienne secrétaire générale de l'UPL d'ajouter que "le tourisme parlementaire a un impact néfaste sur la scène politique et que pour la stabilité des composantes parlementaires, ce fléau doit être arrêté".

Une belle parole, une initiative en somme, sauf que la question est de savoir si cette charmante députée est mieux placée pour faire cette proposition. Ne fait-elle pas partie elle-même des champions (si elle n'est pas la championne) du tourisme politique? 

Pour ceux qui ne sont pas trop versés dans la politique, Samira Chaouachi (celle-là même qui veut faire interdire le tourisme parlemantaire) a été dirigeante au sein de cinq partis politiques (excusez du peu) sur une période de 9 ans. Il s'agit du parti de l'Unité populaire avant la Révolution, Al Moubadara de Kamel Morjène, l'UPL de Slim Riahi, Nidaa Tounes et finalement Qalb Tounes qu'elle représente aujourd'hui en tant que première vice-présidente de l'assemblée.

Finalement, (et pourquoi pas prendre les choses du bon côté) peut-on trouver mieux qu'elle pour donner des conseils sages et aider l'Assemblée à couper l'herbe sous les pieds de tous ceux qui pourraient encore être tentés de s'aventurer dans ce type de tourisme !?  

K.B.M.
 

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