Que vont se dire Kaïs Saïed et Noureddine Taboubi au cours de leur « rencontre importante » demain?

Que vont se dire Kaïs Saïed et Noureddine Taboubi au cours de leur « rencontre importante » demain?

 

L’UGTT annonce mardi soir qu’une importante rencontre aura lieu mercredi 1er juillet entre le président de la République et le secrétaire général de la centrale syndicale Noureddine Taboubi. La page officielle ne donne aucune précision sur l’ordre du jour de cette rencontre.

Mais on devine aisément qu’elle portera sur la conjoncture politique, sociale et syndicale qui est largement tourmentée ces derniers jours. L’UGTT a tenu à la fin de la semaine dernière une réunion cruciale de sa commission administrative nationale, sa plus haute instance entre les congrès.

Une très longue déclaration a été publiée à l’issue des travaux dans laquelle l’UGTT déclare avoir examiné « la détérioration de la situation économique et sociale dans le pays » à propos de laquelle elle a émis des avis, signalant notamment son « inquiétude » face aux tensions qui prévalent sur la scène politique, en raison de l’absence d’harmonie entre certaines composantes de la coalition gouvernementale. Elle dénonce en outre l’action de certains groupes parlementaires ayant de liens avec l’étranger en vue de porter préjudice aux intérêts du pays et à propager un discours de la haine et de la violence.

Le choix de Sfax pour tenir la réunion de la commission administrative nationale pour la première fois n’est pas fortuit. Il est le signe de la solidarité avec trois syndicalistes de cette ville qui ont été arrêtés suite à un incident avec un député de la coalition originaire de Sfax Mohamed Affès. D’ailleurs la CA réclame la libération de ces syndicalistes et appelle la justice à refuser les pressions exercées sur elle.

Dans le même contexte l’UGTT dénonce avec vigueur les campagnes de diabolisation qui la visent, soulignant qu’elle ne restera silencieuse devant ces campagnes orchestrées par des parties extrémistes œuvrant par procuration au service de pouvoirs interne et externe, en allusion à la Coalition Al Karama et au mouvement Ennahdha.

Comme un clin d’œil au président de la République Kaïs Saïed, la déclaration comporte un paragraphe consacré à la Libye dans lequel, l’UGTT dénonce les ingérences étrangères en Libye considérées comme une occupation haineuse et estime que la solution de ce conflit ne peut être qu’inter-libyenne loin des regroupements terroristes. Elle invite à ce titre la présidence de la République à faire de la Tunisie le point de départ du dialogue pacifique entre les Libyens et non une base militaire pour une quelconque partie devant nourrir les combats entre les frères libyens et à piller leur richesse. La centrale ouvrière réitère à ce titre sa préoccupation concernant l'aggravation de la situation en Libye, en particulier à la lumière de la présence des forces étrangères occupantes et des séquelles du terrorisme qui se rassemblent près de nos frontières ».

La commission administrative décide enfin une escalade de ses actions par la tenue de rassemblements d’ouvriers allant des entreprises à des mouvements au niveau national selon un calendrier qui devrait être fixé par le bureau exécutif de l’organisation.

Dans ce cadre s’est tenu d’ailleurs un grand meeting à Sfax qui s'est voulu une démonstration de force puisqu'il a rassemblé pas moins d'une dizaine de milleirs de participants. Au cours de ce meeting Noureddine Taboubi a prononcé un important discours où il fut très offensif ne mâchant pas ses mots en déclarant que son organisation est déterminée à redresser « la boussole du pays » quitte à marcher sur le Palais du Bardo, siège du Parlement en vue de reconquérir selon ses mots la souveraineté nationale.

Il a bien indiqué qu’il n’a pas l’intention de contester la légitimité de la représentation nationale. Ce qui a laissé les observateurs interrogateurs sur la manière dont la centrale syndicale va tenter d’investir le Palais du Bardo.

Il est tout à fait possible que ce sera l’un des sujets à l’ordre du jour de la rencontre « importante » entre Kaïs Saïed et Noureddine Taboubi. « Une alliance stratégique » a été mise en place entre les deux hommes et une coordination va être envisagée entre les deux hommes.

On se rappelle que le président de la République a annoncé son intention de déposer des projets pour la révision de la Constitution pour le changement du régime politique et l’amendement de la loi électorale en vue d’introduire le mode de scrutin sur les personnes en deux tours. Le chef de l’Etat sait qu’il n’a pas de majorité au Parlement pour faire aboutir ses projets de loi. Il a déclaré qu’il mettra la classe politique devant ses responsabilités.

Là peut intervenir l’UGTT qui mobilisera la population pour faire pression sur le Parlement en vue d’approuver ses projets. Le sort du gouvernement sera également à l’ordre du jour.

La question des « conflits d’intérêt » dans laquelle est empêtré le chef du gouvernement Elyès Fakhfakh n’est pour plaire au chef de l’Etat ni au chef de la centrale syndicale non plus. Elu sur sa probité et son entière intégrité, Saïed n’est pas content pour la tournure prise par cette sale affaire. Il devrait écouter attentivement l’avis de Taboubi à ce sujet.

Ayant lui-même choisi Fakhfakh pour diriger le gouvernement, Saïed serait-il amené à lui demander de rendre son tablier. Tout est possible même si une décision aussi grave ne peut être prise à la légère.

Un été chaud est à prévoir.

RBR

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