Le Gouverneur de la Banque Centrale met les pieds dans le plat !

Le Gouverneur de la Banque Centrale met les pieds dans le plat !
 
Les récentes déclarations du gouverneur de la Banque Centrale de Tunisie ont créé une grande polémique. Chedli Ayari a en effet, émis son intention de créer une commission d’expertise pour connaître les raisons qui font que la baisse du prix du pétrole n’a jusqu’à présent eu aucune incidence sur les balances commerciale et énergétique, et sur les prix du pétrole et du gaz en Tunisie.
 
Il a aussi demandé la vérification des factures d’achat des sociétés qui importent le pétrole et a exigé l’ouverture d’une enquête au sujet de l’absence de l’impact de la baisse du prix du pétrole sur l’économie tunisienne.
 
De nombreux observateurs ont vu dans les accusations lancées par Chedli Ayari une grande maladresse et une ignorance inconcevable de la réalité du domaine de l’énergie, indigne d’un gouverneur de la Banque Centrale.
 
Au niveau de la forme, Ayari qui s’est attaqué directement à l'Entreprise Tunisienne d'Activités Pétrolières et à la Société Tunisienne des Industries de Raffinage qui sont les deux seules sociétés à importer le pétrole et le gaz, a discrédité ces entreprises publiques et a touché en plein fouet les établissements de l’Etat, car l’ETAP et la STIR n’agissent pas à leur guise.
 
Toutes leurs transactions sont contrôlées par la commission de surveillance des marchés publics dans laquelle interviennent ou sont représentées de nombreuses parties dont la présidence du gouvernement, le ministère des Finances, la direction générale de l’énergie et la Banque Centrale de Mr Chedly Ayari !!
 
Au niveau du fonds, le gouverneur de la Banque Centrale aurait dû être le premier à savoir que le gaz représente quelque 50% de nos importations en énergie et que la baisse du prix du pétrole a certes une incidence sur la baisse du prix du gaz mais cette incidence ne peut pas se ressentir immédiatement.
 
En effet, le prix moyen du gaz se calcule sur la base des neuf derniers mois glissants. Ce qui veut dire que le consommateur tunisien ne peut réellement commencer à bénéficier de la baisse du prix du gaz qu’à la fin du mois de mars prochain. Une diminution qui continuera au mois d’avril et qui connaîtra son summum au mois de juin.
 
D’un autre côté, notre gouverneur aurait dû être le premier à savoir que la baisse du prix du gaz n’a pas absorbé la compensation. Le prix réel de la bouteille de gaz coûte à l’Etat plus que 20 dinars alors qu’elle est vendue au citoyen à 7d500. Ce qui veut dire que la subvention revient à quelque 12d500. Et quel que soit le niveau de la baisse, tant qu’elle n’a pas atteint les 7d500, elle fera diminuer la part compensée par l’Etat et non le coût payé par le citoyen. 
 
Il est à préciser, d’un autre côté, que de nombreux experts voient que la diminution du prix du pétrole et du gaz à l’échelle mondiale ne peut pas avoir d’impact positif sur l’économie tunisienne, contrairement à ce qu’on a tendance à croire.
 
Ils prévoient, dans ce sens, que la diminution des prix aura une incidence importante sur les investissements directs étrangers des sociétés étrangères qui œuvrent dans le secteur de l’énergie dans notre pays.  Selon certaines sources, cette diminution pourra atteindre en 2015 un chiffre record qui oscillera entre 600 et 700 millions de dollars.
 
British Gaz, EnQuest, Shell, ENI et Petrofac ont tous, semble-t-il, révisé à la baisse leurs budgets d’investissement en Tunisie et certaines parmi ces sociétés s’apprêtent même à quitter notre pays.
 
D’un autre côté, la part des revenus de l’Etat au titre d’impôt sur la production de pétrole et de gaz ont sensiblement diminué en 2014 et continueront leurs chutes en 2015 tant que le prix du baril continue à baisser.
 
L’Etat Tunisien a récolté 1400 millions de dinars en 2013 de la part des sociétés pétrolières, et ce chiffre qui a considérablement baissé en 2014 continuera sa baisse en 2015.
La Tunisie produit en moyenne 60 mille barils de pétrole par jour et les sociétés productrices paient entre 50 % et 75% du prix du baril comme impôt à l’Etat. Il est donc évident qu’à chaque fois que le prix du baril diminue, les parts de l’impôt revenant à l’Etat diminuent.
 
Face à ces constats complexes du dossier de l’énergie, il est clair que le salut de la Tunisie pour essayer de rééquilibrer sa balance énergétique passe par l’augmentation de sa production.
 
Au lieu d’importer 50% de nos besoins énergétiques, on doit produire plus et essayer de subvenir à nos besoins. Mais pour cela, il faut encourager les sociétés pétrolières à demeurer en Tunisie et non les pousser à la sortie. Il faut encourager les investissements et non les freiner. Il faut renouveler les autorisations de prospection et de forage existantes et accorder d’autres et non les bloquer. Monsieur le Gouverneur est censé être le premier à savoir cela. Mais il semble passer à côté de la plaque.
 
Kais Ben Mrad