Tunisie: la réponse est dans la société non pas dans le pouvoir

Si la politique pouvait sauver les sociétés d'aujourd'hui (des inégalités, de l'absence de dignité, etc.) alors les plus grandes démocraties seraient au paradis.

Mais ce n’est pas le cas. La réponse est dans la société et non pas dans le pouvoir.

Il faut que je souligne tout d’abord que ne parle point d’un gouvernement ou d’un autre. Ni d’un homme politique ou d’un autre. Ni d’un parti ou d’un autre. Il s’agit d'un concept un peu plus large, DU politique, pas seulement de LA politique. C'est peut-être un peu trop tôt pour la Tunisie ? Ca l'est aussi pour l'Italie (où je vis) et où le gouvernement élu démocratiquement actuellement a laissé place à un gouvernement technique.

Il y'a une forte crise DU politique dans les sociétés d’aujourd’hui. Peu importe qui est au pouvoir ou quels sont les intérêts qui sont autour, de toute manière les mécanismes d'accès au pouvoir sont toujours les mêmes qu'on soit dans un pays qui a des ressources naturelles comme le pétrole ou le gaz ou qui a les peaux des ours comme richesse qui différencie le riche du pauvre.

La règle est clairement la même : celui qui a accès aux ressources ou réussit à attirer les intérêts autour de ces ressources pourra accéder au pouvoir et gouverner. Ce modèle ne peut pas sauver la Tunisie actuellement et pourtant nous semblons n’avoir aucun choix. La Tunisie tout comme l'Italie tout comme la France tout comme les USA.

Actuellement (et je parle bien de ces derniers 10-15 années) le modèle politique a été englouti par un modèle économique mondial qui a petit à petit éliminé la réelle démocratie là où les ressources naturelles ne sont pas capables de rendre un peuple indépendant.

Il suffit de tourner le regard vers la Grèce, l'Europe y compris l'Allemagne, ou l'Irlande, des pays avec de grandes traditions démocratiques "classiques". Actuellement nous devons repenser non pas le politique mais la société, qui si elle saura donner des réponses elle pourra révolutionner aussi le politique.

Le cœur de l'enjeu est la société. D'ailleurs en Tunisie c'est très simple : ce n'est pas la Politique ou le Politique qui a chassé le dictateur mais la société. Et nous avons perdu de vue ce point... crucial et nous nous sommes engouffré dans des batailles inutiles et épuisantes qui remettent le tout entre les mains des pouvoirs.

Les pouvoirs ce ne sont pas les personnes qui sont au pouvoir mais les forces de pouvoir qui les régissent, internement et de l’extérieur. Il ne s'agit pas 'une énième théorie du complot mais de simples interactions et dynamiques que vous trouverez décrites dans tous les livres de Sciences Politiques. Rien de nouveau. JUSTEMENT. Il faudra innover.

Pour conclure, je n'ai rien contre ce gouvernement ou contre les politiciens, au contraire j'admire leur courage et leur utopie s'ils sont de bonne foi. Je hais leur opportunisme et leur bassesse quand ils veulent profiter. Mais tout ceci est naturel, vieux et pas du tout révolutionnaire.

Les objectifs de la révolution qui sont les seuls éléments tangibles qu'on a de cette phase et dont personne ne peut dire "il n'ya pas eu de requêtes" comme on dit "on n'a pas eu de révolution". Oui on a eu des demandes claires, formulées nettement comme les « objectifs de la révolution » de la part de personnes qui n'ont pas demandé le pouvoir, qui ne l'ont pas requis et qui ont délégué à la politique ces demandes "révolutionnaires".

Aujourd'hui, nous constatons clairement (et sans démagogie contre un parti ou un autre) que ces demandes ne peuvent pas avoir une réponse politique car elles vont CONTRE les intérêts de trop de gens et que la politique qui se nourrit d'intérêts ne peut pas se concilier avec des demandes révolutionnaires. Le modèle est entré dans sa phase ECHEC. Ou nous changeons de modèle ou nous retirons les demandes de la révolution et on la déclare échouée et perdue.

Beaucoup trop de personnes avaient prédits cet aboutissement car l’histoire enseigne et continuera à enseigner ceci. Ce dont je suis convaincue c’est qu’il y’a une alternative contrairement à ce que pensaient les défaitistes.

Il faudrait inventer quelque chose de nouveau, et ceci est le rôle de qui a décidé de ne pas entrer dans le jeu politique (noble ou opportuniste soit-il) mais voudrait porter à terme cette révolution "du politique" à travers la citoyenneté.

Je lance ainsi un appel à ceux qui pourront voir en ce message un point de départ pour travailler ensemble dans un espace nouveau, celui de la citoyenneté, lui-même à créer en partant de la brèche que la révolution a généré dans notre société.

Nous sommes dans l’urgence ? Oui et Non. Mais nous n’avons aucun choix, nous n’avons aucune excuse de ne pas entamer une relecture de notre rôle en tant que citoyens pour changer notre société en commençant d'abord par changer  notre propre approche. Je vous lance un appel afin de rallier les rangs car nous sommes là dépourvus d’actions et nous avons oublié que la plus grande action est celle de penser ensemble.

A qui j’adresse cet appel : à ceux qui comprendront dans cet article l’enjeu unique que nous offre cette situation et les conséquences qu'elle pourrait générer.


Wejdane Majeri