Affaire Abou Yaareb Marzouki: Les brigades révolutionnaires, le doute et la science

Affaire Abou Yaareb Marzouki: Les brigades révolutionnaires, le doute et la science

Par Jamel HENI

Les préposés à la dissidence continue, feraient-ils chou blanc ! Rentrant dans les bonnes grâces présidentielles, semblent-ils jeter leur dévolu depuis quelques mois sur le philosophe tunisien Abou Yaareb Marzouki. Son crime serait de lèse-majesté. Son délit, de lèse-sagesse. Il se serait fendu de textes au vitriol contre le président de la république. Hourra!

Je ne discuterai ici ce passage sordide de la révolution permanente à l’alignement le plus réac. Je soulèverai juste quelques remarques sur les textes du philosophe, incriminé par la brigade révolutionnaire à temps partiel.

Le marronnier des détracteurs du professeur de philosophie grecque et allemande, tiendrait en deux mots : le danger iranien serait une vue de l’esprit. Le président n'est le jouet d’aucune puissance étrangère.

Mais le monopole révolutionnaire va plus loin. Il dénonce des formules strictement licencieuses, irrévérencieuses, impropres et décadentes dans les pamphlets de Marzouki. Pour ce faire, le monopole national ne s’encombre pas de contradictions et déverse à son tour un torrent d’insultes. Œil pour œil. Dent pour dent. Cohérence après !

Venons-en aux arguments du philosophe. Non pas le contenu mais bien plutôt le critère scientifique. L’objet, l’approche, la méthode, l’hypothèse théorique et pratique, le design causal ou corrélatif…..

La démarche de Marzouki est-elle scientifique ?

Le danger iranien pourrait-il faire l’objet d’une recherche en sciences politiques ? La réponse est oui. N’admettant les tabous, la science étudie tout, voire n'importe quoi. Y compris le danger iranien, lorsque les conditions d’une observation scientifique paraîtraient réunies. Vous rendez-vous compte ?

La seule question à poser serait strictement liée à la méthode  : Est-ce que le le danger iranien était proprement posé en termes scientifiques par le philsophe tunisien ?

Voyons voir !

Selon Marzouki le danger iranien présenterait des régularités récurrentes, observables répétables et mesurables !

Il définit ces régularités, comme étant des faits politiques répétés, dans un espace territorial et culturel défini : al îqlîm : la région arabe et sur une étendue temporelle circonscrite : les révolutions arabes. l'objet de recherche devrait jusque-là satisfaire au premier critère rédhibitoire de l'observation.

En termes d'approche, le philosophe et essayiste politique, envisage clairement le danger iranien à travers la politique comparée , en apportant une réponse à la question  essentielle: quels seraient les acteurs et les institutions, mais aussi les pratiques et comportements plus ou moins constants dans cette région et sur l’étendue d’une décennie de révolutions arabes ?

La méthode de recherche paraîtrait, quant à elle, rigoureusement expérimentale : elle répondrait à la question : existe-t-il une variable indépendante ( cause) provoquant des effets quantifiables sur des variables dépendantes : des valeurs de variations des paramètres d'études, lesquelles valeurs seront observables mesurables et répétables !

Explication causale 

L’explication pourrait en être causale. Un acteur constant reproduirait les mêmes pratiques, manipulerait les mêmes instruments, afin d’obtenir les mêmes résultats : au moins dans cinq pays différents.

Partout où ses hommes feraient leur trou, l’Iran agirait de la même manière : en cas de guerre défend-il les régimes et autres dissidences alliés. Lorsque le vent tourne, soutiendrait-il les partis proches ou alliés, mais surtout les mouvements de conversions massives et sous le manteau.

Cette hypothèse théorique donnerait lieu à une hypothèse de travail ou appliquée: l’Iran soutiendrait ses alliés politiques et culturels en Tunisie et confirmerait par-là les régularités politiques et culturelles de sa reconquête arabe.

Explication corrélative

L’explication pourrait en être aussi corrélative : plus la coopération iranienne augmente, plus l’ampleur de l’embrigadement sous la houlette des brigades perses augmente.

L’hypothèse théorique sous-jacente  se présenterait dans ces termes : les deux variables : coopération et endoctrinement, varieraient dans le même sens et de manière parallèle. Dans les cinq pays arabes reconquis, l'inféodation et la subordination à l'Iran augmenterait proportionnellement au niveau de coopération avec l'entité perse.

L’hypothèse de travail ou appliquée s'exprimerait ainsi  : l’Iran aurait d'abord soutenu le parti Chaab et le candidat Kais Said, tous deux acquis à sa cause. Il aurait ensuite dépêché son ambassadeur le plus controversé, réputé va-t-en-guerre. L'iran aurait enfin augmenté sa coopération culturelle et médiatique….. Or ce niveau très élevé de coopération serait corrélatif d’une reconquête sur les réseaux sociaux et dans les sphères associatives et culturelles de frais émoulus du révisionnisme sunnite....

Un modèle prédictif

Qu'il soit causal ou corrélatif, le design empirique aura été formulé à nouveaux frais mais de manière verbale par le professeur Merzouki. Il pourrait plus tard le modéliser sous forme mathématique.

Toujours est-il que la raisonnement suivait une démarche plutôt empirique. Si les hypothèses de travail viendraient à être confirmées par lui, une voie nouvelle pourrait être ouverte. Il pourrait aller plus loin vers une modélisation et cela pourrait constituer non pas simplement un modèle explicatif mais proprement prédictif.

Nous voilà rendus à une conclusion (révolutionnaire et progressive) éloignée de la paranoïa (réac) des préposés à la révolution permanente. Ce qui tourne au conspirationnisme ( conservateur) chez un néo nihilimse d'une cyber dissidence, soudainement docile et en rang d'oignons derrière le président idéal, gagnerait à continuer le travail de recherche de Marzouki plutôt que de le combattre !

J.H.

Votre commentaire