Bras de fer entre l’OIT et Esprit: Où est le ministère ?

Bras de fer entre l’OIT et Esprit: Où est le ministère ?

Face à la passivité étonnante du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, qui ne s’est jusqu’à présent pas exprimé au sujet du bras de fer entre l’Ordre des Ingénieurs Tunisiens et certaines écoles de formation d’ingénieurs, dont particulièrement la plus prestigieuse (à savoir ESPRIT), le différend est en train de s’amplifier et de prendre une tournure inquiétante pour les étudiants et leurs parents.

Perdus, ces derniers ne savant plus à quel saint se vouer et suivent avec inquiétude les accusations échangées entre l’OIT et ESPRIT, en se demandant pourquoi le ministère n’est jusqu’à présent pas intervenu pour clarifier les choses et définir les prérogatives de chaque partie concernée.

Il est à rappeler dans ce cadre que ce différend entre l’OIT et certaines écoles de formation d’ingénieurs n’est pas à son premier épisode et qu’il se répète presque à l’aube de chaque année universitaire.

Le dernier épisode a éclaté à la dernière semaine du mois d’août, lorsque le Doyen de l’OIT Kamel Sahnoun, a déclaré que les diplômes délivrés par certaines écoles privées d’ingénierie ne seraient plus reconnus par son instance, affirmant que l'une des prérogatives essentielles de son « Ordre » consiste à veiller à la promotion de la profession et à veiller sur la qualité de la formation.

C’est pour cela qu’il a procédé à une évaluation de la qualité des formations dispensées par les écoles d’ingénieurs privées en Tunisie, à travers des visites de terrain effectuées entre mai et juillet pour s’assurer de la conformité avec les cahiers des charges de ces établissements privés.

Le Doyen de l’OIT a accusé deux écoles d’avoir refusé d’accueillir les inspecteurs de l’Ordre, ajoutant qu’elles n’auront plus l’accréditation de son instance.

Or, si l'on prend en considération que l’article premier des conditions requises pour exercer le métier d’ingénieur en Tunisie dit clairement que l’ingénieur doit être obligatoirement inscrit au tableau de l’Ordre des Ingénieurs Tunisiens et que celui qui exerce le métier d’ingénieur sans être inscrit au tableau de l’OIT est considéré comme un usurpateur d’identité, passible de poursuites prévues dans l’article 159 du code pénal, on comprend clairement que les diplômés de certaines écoles risquent de ne pas être reconnus et inscrits à l’Ordre.

Ce qui veut dire que les ingénieurs issus des meilleures écoles reconnues par l’Etat sont menacés de ne pas avoir leurs accréditions pour exercer ce métier ou pour postuler aux concours nationaux de recrutement en Tunisie et à l’étranger.

Face à cette confusion inquiétante à quelques jours de la rentrée universitaire, c’est le fondateur de l'École supérieure privée d'ingénierie et de technologie (ESPRIT), Tahar Belakhdar qui a réagi à travers une série d’interviews pour clarifier la situation et demander au ministère de remettre chacun à sa place.

Selon lui, cette tempête n’a pas lieu d’être, car seul le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique qui accorde les autorisations est habilité à reconnaître et à contrôler les écoles d’ingénierie qui ne respectent pas le cahier de charge et à s’assurer de leurs engagements à offrir une formation de qualité.

Il a ajouté que le ministère a son système d’évaluation des écoles privées d’ingénieurs pour examiner leur adhésion aux cahiers des charges, en fonction de quelques critères essentiels dont le niveau de l’étudiant à l’inscription, le taux des enseignants permanents et leurs niveaux, le taux d’encadrement des étudiants, la qualité des espaces et des équipements dédiés à la formation.

Belakhdar a déclaré respecter l’OIT et ses prérogatives, mais il a insisté que l’Ordre n’a pas le droit d’exercer ce contrôle puisque son rôle est de défendre les ingénieurs et de veiller à leur assurer de meilleures conditions de travail.  

Le Doyen d’ESPRIT a rappelé que son école a une triple accréditation internationale ajoutant : « 2000 ingénieurs sortent chaque année de notre école. 80% parmi eux sont embauchés à l’étranger. Ce qui dénote la qualité de la formation préconisée reconnue à l’échelle internationale et je ne permettrais ni à Mr Sahnoun, qui veut semble-t-il se lancer dans la politique, ni à quiconque de mettre en doute la qualité de notre formation. »

Entre-temps et au moment où l'on s’attendait à une réaction claire et précise du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, c’est l’OIT qui vient de revenir à la charge en éditant un communiqué, à travers lequel il clame haut et fort son habilitation à évaluer les établissements privés.

Pire encore, l'Ordre s’est montré menaçant et a lancé un avertissement aux établissements refusant l'évaluation, insistant que ses prérogatives lui ont été confiées par l’Etat et en vertu de la Loi n° 82-85 du 02 décembre 1982, ratifiant le décret-loi n° 82-12 du 21 octobre 1982 portant création de l'ordre des ingénieurs.

Face à cette tournure inquiétante des événements, il est plus que jamais nécessaire que le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique intervienne et tranche car il est le seul habilité à contrôler ces écoles qu’il a autorisé à exercer sur le territoire tunisien afin de s'assurer de leur respect du cahier de charge et de la qualité de leur formation.

H.B.M. 
 

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