Drame de Lampedusa, non à l'instrumentalisation !

Drame de Lampedusa, non à l'instrumentalisation !

Naguère, les images indécentes, abjectes et malséantes, celles d’une cohorte de jeunes Africains en guenilles, tentant avec l’énergie du désespoir, de rejoindre l’Europe au grand péril de leur vie, choquaient plus d’un. Désormais, le phénomène s’empare de plus en plus de la Tunisie où les jeunes, attirés par l’eldorado européen, se jettent dans l'antre de la mer dans l’espoir d’atteindre les rives opposées de Mare Nostrum.

Parqués dans des embarcations de fortune et dans des conditions, le moins qu’on puisse dire, inhumaines, ces voyageurs de l’incertain, tenus en laisse par des passeurs sans vergogne, n’hésitent plus à vendre leur âme au diable pour l’«eldorado».

Il n’est pas besoin d’être un foudre d’intelligence pour comprendre que ce sont les difficultés économiques, le chômage et le rêve de revenir un jour au pays avec beaucoup d’oseille qui poussent de plus en plus de jeunes à cette aventure suicidaire.

Une fois encore, le drame vient de frapper de plein fouet, plongeant des familles entières dans le deuil. Le témoignage des rescapés (telle cette jeune femme enceinte de 27 ans qui a vu son frère de 5 ans se noyer) est si insoutenable qu’il vous fend le cœur. Mais ce qui a choqué, par-dessus tout, l’opinion publique, c’est cette indifférence du gouvernement et des medias qui n’ont réagi que trois jours après la catastrophe.

Nous avons eu affaire à des médias trop frileux qui n’ont pas hésité à reléguer l’info au second plan, tandis que le gouvernement, imperturbable, s’occupait ...d’hyménées. Nombre de journaux (nous étions les premiers à dénoncer cette attitude) n’ont pas pris de gang pour relever cette erreur de casting digne d’un amateurisme inacceptable.
Mais cette réaction tardive du gouvernement, aussi critiquable qu'elle puisse être,  ne devrait pas constituer une aubaine pour certains partis politiques qui ont sauté sur l’occasion pour instrumentaliser l’affaire. Cela pourrait faire naître chez les familles de victimes une animosité viscérale. La morale défend de se servir du malheur des autres pour arriver à ses fins politiques.

En ces moments de tristesse et de recueillement, l’heure n’est pas aux incriminations à outrance et aux attaques personnifiées, mais il faut qu’on se dise la vérité. Inutile de jeter la pierre à quiconque, car les responsabilités sont partagées. Gouvernants, populations, familles, médias,associations, passeurs… tous responsables.
Il urge désormais de passer la vitesse supérieure en mettant en place une vraie campagne de sensibilisation sur fond de débat national, afin de faire reculer ces tentatives de suicide, à défaut de pouvoir les circonscrire à jamais.

El Hadj Oumar