Drogue en Méditerranée : la Tunisie au cœur d’un trafic régional et international

De Tunis à Casablanca, d’Alger à Marseille, la carte du trafic de drogue dessine une Méditerranée en proie à des flux criminels de plus en plus massifs et sophistiqués. En Tunisie, il ne se passe pas un jour sans que la police ou la douane n’annonce le démantèlement d’un réseau de trafic de drogue. Zatla, cocaïne, comprimés d’ecstasy… les saisies se succèdent à un rythme effréné, souvent accompagnées de la confiscation de véhicules, de zodiacs ou encore de bateaux de pêche utilisés comme moyens logistiques. Les bilans cumulés suffisent à donner le vertige et à alerter sur l’ampleur d’un phénomène qui dépasse largement les frontières tunisiennes.
Tunisie : saisies record et nouvelles méthodes
En 2024, les forces de l’ordre tunisiennes ont procédé à l’arrestation d’environ 5 000 trafiquants, contre 3 165 en 2023. Sur les sept premiers mois de 2025, les autorités ont saisi 168 000 comprimés psychotropes, 154 kg de cannabis et 58 kg de cocaïne.
En août 2025, un réseau international opérant entre Mahdia et Ben Arous a été neutralisé : 14 arrestations, la saisie de 370 000 comprimés d’ecstasy, 12 kg de cocaïne, treize voitures et près de 550 000 dinars en espèces. Au port de La Goulette, un véhicule en provenance de Gênes contenait clandestinement 36 kg de résine de cannabis.
Les trafiquants tunisiens adoptent des méthodes sophistiquées : cargaisons jetées en pleine mer et récupérées grâce à des balises GPS, zodiacs rapides hors zones portuaires, voire drones maritimes capables de déposer ou ramasser des colis. La saisie de téléphones satellitaires et de matériel nautique high-tech confirme cette évolution inquiétante.
Une jeunesse particulièrement exposée
Au-delà du transit, la consommation locale progresse. Une enquête a révélé que 9,2 % des élèves tunisiens des collèges et lycées ont déjà expérimenté une drogue, tandis qu’une autre étude montrait que près de 31 % des adolescents de 15 à 17 ans en avaient consommé au moins une fois. Cannabis, psychotropes, ecstasy : les cours d’école deviennent un terrain de diffusion.
Algérie : psychotropes en masse et saisies records
L’Algérie n’est pas en reste. En 2022, l’Office national de lutte contre la drogue et la toxicomanie (ONLCDT) a saisi 58,2 tonnes de résine de cannabis, dont plus de la moitié dans l’Ouest du pays. La même année, 11,3 millions de comprimés psychotropes ont été interceptés, une hausse de 115 % par rapport à 2021.
En avril 2025, une saisie spectaculaire a marqué les esprits : 1,65 million de comprimés d’ecstasy, vraisemblablement expédiés depuis Marseille, ont été interceptés. Neuf personnes liées à un réseau opérant entre le Maroc, l’Algérie et la France ont été arrêtées.
Maroc : producteur et point de transit
Le Maroc, premier producteur mondial de résine de cannabis, reste au centre du dispositif régional. Outre cette production, il sert de point de passage pour d’autres substances. À Casablanca, une opération a permis de saisir environ 1,3 tonne de cocaïne, dissimulée dans une cargaison de produits de la mer importés d’Espagne. Le port stratégique de Tanger Med est régulièrement cité dans les enquêtes internationales comme un hub majeur pour le transit de drogues en direction de l’Europe.
France : explosion des saisies de cocaïne et d’ecstasy
La France, destination privilégiée d’une partie de ces flux, enregistre des saisies record. En 2024, les autorités françaises ont intercepté 53,5 tonnes de cocaïne, soit une hausse de 130 % par rapport à 2023. Les drogues de synthèse explosent également : plus de 9 millions de comprimés d’ecstasy saisis (+123 %) et 618 kg d’amphétamines et méthamphétamines (+133 %).
Au total, 111 tonnes de stupéfiants ont été saisies en 2024 sur le territoire français, un volume inédit qui illustre l’ampleur d’un trafic transnational
Un combat à plusieurs fronts
La guerre contre la drogue se joue à la fois au niveau sécuritaire, pour intercepter cargaisons et réseaux ; technologique, face à des trafiquants innovants ; et social, pour endiguer la consommation des jeunes. Si les saisies record témoignent d’une vigilance accrue, elles révèlent aussi l’ampleur d’un marché criminel qui fait de la Méditerranée un espace stratégique majeur pour les trafiquants.
Avec IA
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