En vidéo: Abdelaziz Belkhodja répond à la polémique sur la statue d’Hannibal

Suite à la grande polémique suscitée par la statue d'Hannibal, dont la maquette vient d'être présentée au Président de la République, Espace Manager a voulu en savoir davantage en rencontrant l’un des membres du Club Hannibal, en l'occurrence l’écrivain Abdelaziz Belkhodja.

Belkhodja a déclaré être fier que les Tunisiens soient aussi jaloux de leur histoire et qu’ils tiennent avec autant de vigueur à ce que sa représentation soit digne de sa dimension. Il nous rappelle que même pour l’emplacement de la statue, il y a eu une terrible polémique entre le Port punique et la colline de Carthage Byrsa et que ce sont les scientifiques qui ont tranché. 

La critique concerne à la fois le côté artistique, historique et symbolique. Belkhodja a tenu à préciser que la maquette en plâtre qui a été présentée à la Présidence est très peu représentative du monument, la statue définitive sera en bronze, haute de 7 mètres et sera posée sur un bloc de marbre de 9 m. Le travail de préparation a été réalisé par un parterre d'historiens, d'archéologues et d'artistes, des présentations ont été faites avec les différentes statues réalisées au cours de l'histoire et les différents éléments devant figurer sur le monument qui sera réalisé dans quelques mois.

Pour le visage, le choix a été fait entre le buste de Naples, montrant un Hannibal vieux, et la monnaie carthaginoise d'Espagne montrant un Hannibal jeune. Pour les habits, les officiers carthaginois s’habillaient de la sorte et la cuirasse est proche de celle qui est exposée au musée du Bardo et que portait l’un des généraux d’Hannibal. Il faut préciser qu’au temps d'Hannibal c'était la période hellénistique et les tenues étaient les mêmes que celles des Grecs, c'est une donnée qui est attestée par tout le monde.

Concernant la symbolique, la statue d’Hannibal va, selon l'écrivain, corriger la désinformation subie depuis plusieurs siècles. Les ennemis de Carthage ont voulu représenter Hannibal uniquement comme un génie tactique qui a traversé les Alpes à dos d'éléphant et qui a vaincu les Romains aux batailles de la Trebbie, Trasimène et Cannes pour finir par être battu chez lui par Scipion.

En réalité, Hannibal avait un projet politique à portée universelle, celui de libérer les italiques dominés par Rome et de tuer dans l'œuf l'impérialisme en fédérant les peuples autour d’un projet commun. Il a d’ailleurs présenté, au lendemain du triomphe de Cannes, au roi de Grèce de l'époque, Philippe 5 de Macédoine, un "Traité de Confédération" dont le texte nous est parvenu et qui expose la vision pacifique et universelle d’Hannibal.

C'est ce projet qu’Hannibal, dans sa représentation, brandit de la main droite alors que la main gauche est sur le fourreau de l'épée, pour défendre la civilisation contre l’impérialisme, la corruption et la violence.

Aujourd'hui, 23 siècles plus tard, alors qu'Hannibal a échoué à cause de la corruption des sénateurs carthaginois, l'humanité est encore au même point, d'où la modernité et la nécessité du projet d'Hannibal que nous allons tenter de réaliser de façon grandiose. C'est cet Hannibal défenseur de la civilisation, le véritable Hannibal, qu'un groupe d'archéologues, d'historiens, d'artistes, accompagnés de la Présidence de la République et des ministères de la Défense, des Affaires Etrangères, de la Culture, du Tourisme, de la Mairie de Carthage et du Club Hannibal, ont voulu présenter aux Tunisiens.

« Leur réaction est légitime et nous tiendrons compte des critiques », a déclaré Belkhodja qui a tenu à ajouter que personne ne pourra s’arroger l’idée de ce monument car cette idée est le patrimoine commun de tous les Tunisiens et Tunisiennes. Il faut préciser que la statue sera réalisée par le sculpteur Hechmi Marzouk qui a sculpté Bourguiba et Ibn Khaldoun et bien d’autres œuvres qui gagneraient à être connues.

Interview réalisée par Cheker Berhima

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