Fatma Naït Yghil:«Le guide numérique doit présenter différents objets du musée du Bardo»

Fatma Naït Yghil:«Le guide numérique doit présenter différents objets du musée du Bardo»

Le 17 juin dernier, l’opérateur Orange a lancé une application à télécharger sur smartphone ou tablette concernant le Musée national du Bardo. Il a même institué des guides numériques que l’on peut trouver à l’accueil du musée.

Cette application permet de visiter le musée sur place ou de n’importe où. Elle propose trois parcours : «Mosaïques», «Découvertes» et «Enfants». Nous avons pris attache avec Fatma Naït Yghil, chargée de recherche en histoire et archéologie romaine, responsable scientifique de la collection de mosaïques, conservatrice au Musée national du Bardo, archéologue et historienne, pour nous parler de ce projet auquel elle a grandement participé.

Comment est venue l’idée de présenter le Musée national du Bardo dans une guide numérique ?

Orange a voulu faire un guide numérique. Il a laissé  libre le musée de choisir les circuits, les thèmes  montrer aux visiteurs. Le guide doit présenter différents objets du musée : la céramique, la sculpture, l’époque punique, romaine, etc. Puisque la mosaïque est la collection qui domine au musée, j’ai préféré travailler sur ma spécialité, à savoir les loisirs.

C’est pour cela que, dans le guide, on trouve beaucoup de loisirs, notamment dans le circuit pour les enfants…

Oui, c’est pour les attirer, pour créer un lien avec la collection, avec le patrimoine. Les mosaïques représentent des animaux, donc les enfants sont intéressés par ce type de représentations. Il y a des mosaïques qui représentent  des spectacles d’amphithéâtre, la chasse des bêtes sauvages. Nous avons quelques mosaïques avec des animaux qui sont présentés avec leur nom. C’étaient des animaux célèbrent dressés pour ce genre de jeu. Les enfants sont plus intéressés par ce genre de mosaïques que par celles qui parlent, par exemple,  de Dionysos.

Les loisirs sont une partie qui n’a pas bien été traitée auparavant. Les gens  viennent  ici pour voir des divinités, comme Vénus, Neptune, etc. Ces mosaïques sont plus célèbres que celles représentant les thèmes de spectacles, de sport, de différents types de loisirs.

Avez-vous emmené un gamin sur le parcours «Enfants» pour tester sa réaction face à certaines mosaïques ?

Nous avons un service éducatif auquel j’ai donné le même circuit. Il l’a essayé avec des enfants et des adolescents. Le résultat a été probant. D’ailleurs, il continue à travailler avec ce même circuit.

Les mosaïques sont romaines et byzantines, mais pourquoi, par exemple, une s’intitule «Triomphe de Dionysos», alors que ce dernier est un dieu grec ? Pourquoi pas Bacchus ?

Parce que Dionysos est plus connu que Bacchus [auprès des personnes lambda] même si les deux noms sont utilisés.

Douze mosaïques sont présentées dans le circuit «Mosaïques» du guide. Pourquoi ce choix ?

Nous avons choisi ces mosaïques selon leur état de conservation, les couleurs, l’importance pour l’Histoire, leur provenance,  leur place dans le musée. Nous avons essayé de guider au mieux le visiteur.

Que signifie «importance» ?

Par exemple si l’on prend la mosaïque «Virgile», elle est unique car c’est la seule mosaïque qui représente le fameux poète romain. Il a été identifié grâce au 8e vers de l’Enéide, écrit sur le parchemin posé sur ses genoux. C’est important pas seulement pour la Tunisie. Cette mosaïque est d’une importance internationale. Beaucoup de visiteurs étrangers viennent pour la voir.

Il y a aussi une mosaïque de la période islamique…

Oui, nous n’avons qu’une seule mosaïque de cette période-là. Elle a été découverte par Adnan Louhichi, Directeur général de l’INP. Elle  est de forme géométrique, en deux fragments, et datable du Xe siècle. Mais la plupart sont romaines, du Haut-Empire, c’est-à-dire Ie, IIe et IIIe siècle. Dans l’époque romaine nous avons une petite période qui est l’époque tardive et chrétienne. Les thèmes des mosaïques deviennent d’ordre religieux, consacrés au christianisme.

Combien avez-vous travaillé de temps sur le parcours «Mosaïques» ?

Nous avons eu plusieurs versions. C’était assez difficile car il n’y avait pas de cahier de charge qui nous imposait des critères. Tout dépendait de l’objectif du projet ou de l’idée qu’on veut atteindre. J’ai fait quatre ou cinq versions. Au début, nous n’avions pas un nombre limité dans les mosaïques. Nous avons travaillé sur le choix d’une cinquantaine. Puis, nous avons été dépendants de la technologie. Le travail nous a pris quatre à cinq mois.

Charm ATA