Il y a deux ans, l'épopée de Ben Guerdane

Il y a deux ans, l'épopée de Ben Guerdane

« Il n'y a pas de forteresses imprenables, il n'y a que des citadelles bien protégées. »

Ben Guerdane est la principale ville tunisienne frontalière avec la Libye. A ce titre, elle est le baromètre des convulsions affectant le pays voisin, plongé dans le chaos depuis l’éclatement de la guerre civile de l’été 2014. L’économie locale est principalement fondée sur le commerce de contrebande – essence et biens libyens subventionnés s’écoulant généreusement sur le marché tunisien.

Ces dernières années, la frontière a aussi été traversée par des jeunes Tunisiens allant se former au djihad en Libye ou combattre en Syrie avant de revenir au pays fomenter des attentats. Ben Guerdane, plaque tournante du commerce informel et de réseaux terroristes : l’endroit a toujours été hautement volatil.

Dans ce contexte, la flambée de violence de lundi 7 mars 2016 est la conséquence indirecte de l’intensification de la pression militaire contre les bases de Daech en Libye même. Le grand tournant a été le raid aérien américain lancé le 19 février dans une ferme à proximité de Sabratha, ville libyenne située à une centaine de kilomètres de la Tunisie. Une cinquantaine d’extrémistes, liés à l’EI selon les autorités de Tripoli, ont été tués dans la frappe. Une grande partie d’entre eux étaient de nationalité tunisienne.

Le déroulement

L'attaque commence le 7 mars 2016, à l'aube. Les terroristes, divisés en plusieurs groupes et bénéficiant de la complicité de cellules locales, attaquent de façon coordonnée une caserne de l'armée tunisienne, un poste de police et le quartier général de la garde nationale. Dès le début de l'attaque, deux officiers de sécurité responsables de la lutte antiterroriste sont abattus à leur domicile. Des hommes sillonnent la ville avec des mégaphones en annonçant qu'ils sont l'État islamique et appellent la population à les soutenir.

Mais, après quelques heures d'affrontements, les djihadistes sont finalement repoussés. L'armée, la police, la garde nationale et la douane, appuyés par différente unités des forces spéciales arrivées en renfort, contre-attaquent et pourchassent les derniers assaillants qui ont pris la fuite. Les établissements scolaires et administratifs sont fermés et un couvre-feu nocturne est décrété13. Dans la journée, une cache d'armes est découverte à l'intérieur de la ville.

Le bilan

Au matin du 8 mars, le « bilan définitif » est de douze morts et quatorze blessés pour l'armée et les forces de sécurité, sept civils tués et 36 morts du côté de l'EI, ainsi que sept assaillants faits prisonniers

Après les combats, des soldats tunisiens se prennent en selfie avec des cadavres de djihadistes, ce qui suscite une polémique en Tunisie. Si de tels actes sont jugés « inacceptables » par le porte-parole du ministère de la Défense, Rachid Bouhoula, le ministre de l'Éducation d’alors, Néji Jalloul, les applaudit au contraire et promet le 10 mars d'acheter un tee-shirt avec le selfie imprimé.

A l’occasion du deuxième anniversaire de cette épopée, le 7 mars a été décrété jour férié à Ben Guerdane et jour de célébration de cette historique victoire contre le terrorisme islamiste.  

L’attaque de Ben Guerdane était un tournant majeur dans la guerre contre le terrorisme islamiste en Tunisie. Ecrasés par les forces armées ce jour-là, les terroristes ont compris  que la Tunisie est une citadelle  imprenable…

Il n'y a pas de forteresses imprenables, il n'y a que des citadelles bien protégées.

 Abdessatar Klai

 

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