Jamil Sayah: "Un risque de somalisation de nos frontières se précise sous nos yeux"

 Jamil Sayah: "Un risque de somalisation de nos frontières se précise sous nos yeux"
 
 
Alors que les supputations vont bon train quant à l'éventualité d'une frappe aérienne en Libye, les inquiétudes se font de plus en plus grandes quant aux répercussions d'une telle opération sur la Tunisie. Une opération militaire qui semble imminente "avec ou sans notre accord". Pour Jamil Sayah, président de l'observatoire tunisien de la sécurité globale, le risque d'une "Somalie" à nos frontières n'est pas exclue.
 
Dans une interview accordée à La Presse et parue ce vendredi 12 février, le président de l'observatoire nous dresse la situation réelle en Libye, les principaux motifs d'inquiétude pour la diplomatie tunisienne et les risques réels de passages de combattants à travers nos frontières.
 
Pour Sayah, l'implantation croissante de Daesh doit sérieusement nous inquiéter. Allons nous laisser la situation se dégrader comme en Syrie ou en Irak sans réagir? se demande-t-il. "Nous pouvons maintenant, alors que la menace se précise, regretter de n'avoir pas anticipé cette situation, notamment sur le plan diplomatique en restant à la traine et en s'accrochant à une double chimère: l'option attentiste passive et des alliances peu fiables", lance-t-il.
 
Vu le nombre de combattants qui seraient plus de 5 mille, sans compter d'autres qui ne cessent d'affluer venant de Syrie où le mouvement est en perte de vitesse, la Tunisie a de réels motifs d'inquiétude. "Cette situation se complique car nous avons quelque 4 mille Tunisiens combattants dans les rangs de Daesch", selon Sayah. Et d'ajouter que " l'hypothèse de l'émergence d'une Somalie est en train de se préciser à nos frontières".
 
A la question de savoir ce que doit faire la diplomatie tunisienne, Jamil Sayah se montre réaliste. "Malheureusement, dit-il, notre marge de manoeuvre s'est rétrecie. Nous avons perdu la main. Il faut revenir très vite sur le terrain diplomatique. Or, en la matière, c'est toujours la même dialectique entre le politique et le militaire qui semble à l'oeuvre. Nos moyens militaires sont modestes pour soutenir notre cause dans le champ diplomatique. Il faut chercher à créer un front diplomatique uni à trois avec l'Algérie et l'Egypte. Pour ce faire, il faut se rapprocher des Italiens. Ils sont très présents sur le terrain par le renseignement. De plus, une intervention militaire semble imminente avec ou sans notre accord. Car l'Italie ne va jamais accepter de laisser s'installer une organisation terroriste à 350 kilomètres à peine de l'île italienne Lampedusa et il y a des risques de passage des combattants vers le territoire italien par beau temps." 
 
 

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