Les déclarations de Kaïs Saïed : les messages et leurs significations
Les déclarations faites par le président Kaïs Saïed lors d’une audience décidée à la dernière minute avec le chef du gouvernement Elyès Fakhfakh et le Secrétaire général de l’UGTT, Noureddine Taboubi recèle un ensemble de messages qu’il importe de déchiffrer :
-Le président de la République est le garant du texte et de l’esprit de la Constitution et il se soucie scrupuleusement de s’y tenir, comme il en a fait le serment lors de sa prise de fonction
-Même si c’est lui qui a choisi Elyès Fakhfakh pour remplir les fonctions de chef de gouvernement, il l’a fait en vertu des dispositions constitutionnelles qui lui accordent cette latitude, Fakhfakh ayant été jugé par lui comme le plus apte à former un gouvernement. Il a toujours répété que le gouvernement Fakhfakh n’est pas le gouvernement du président comme on veut le faire accroire et qu’il est le gouvernement de la Tunisie.
-En écartant toute concertation au sujet d’un éventuel remplaçant d’Elyès Fakhfakh comme le Mouvement Ennahdha en a l’intention, le président de la République exclut trois options inscrites par la Constitution : la démission du chef du gouvernement puisque ce dernier est conforté par celui qui l’a nommé, la possibilité pour ce dernier de demander lui-même un vote de confiance du Parlement, il n’en a plus besoin et enfin la latitude pour le président de la République de demander un vote de confiance pour le chef de gouvernement. Ce dernier cas n’a pas été évoqué par Kaïs Saïed dans ses déclarations.
-Donc reste pour le Mouvement Ennahdha une seule et unique possibilité, celle de déposer à l’encontre du gouvernement une motion de censure.
A cet effet l’article 97 de la Constitution stipule : « Une motion de censure peut être votée à l’encontre du gouvernement, suite à une demande motivée présentée au Président de l’Assemblée des représentants du peuple par le tiers de ses membres au moins (soit 73 députés). La motion de censure ne peut être votée qu’à l’expiration d’un délai de quinze jours après son dépôt auprès de la présidence de l’Assemblée. Le vote de défiance à l’égard du gouvernement est conditionné par l’approbation de la majorité absolue des membres de l’Assemblée, et la présentation d'un candidat de remplacement au Chef du gouvernement, dont la candidature devra être approuvée lors du même vote. Auquel cas, le candidat de remplacement sera chargé par le Président de la République de former le gouvernement, selon les modalités de l’article 89. Si cette majorité n’est pas atteinte, la motion de censure contre le gouvernement ne peut être à nouveau présentée avant six mois. »
-La présence de Noureddine Taboubi à cette rencontre montre la haute importance qu’accorde le président Kaïs Saïed à la centrale syndicale qui est pour lui un allié de poids sur la scène nationale. En le prenant pour témoin, il réconforte Taboubi dans les attributions d’un modérateur attitré entre les forces politiques et sociales dans le pays.
Le Secrétaire général de l’UGTT n’en est que plus renforcé. Si un dialogue national sera un jour indispensable pour surmonter des crises éventuelles, il devra être confié à la centrale ouvrière. Un rôle du reste historique que Kaïs Saïed reconnait et veut amplifier.
RBR
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