Municipales : Voter « utile » ou s’abstenir c'est se laisser manipuler

Municipales : Voter « utile » ou s’abstenir c'est se laisser manipuler

Dimanche 6 mai, la Tunisie s'apprête à vivre sa première expérience d'élections municipales postrévolutionnaire. Il s'agit de la désignation de citoyens qui auront l'honneur et le privilège de diriger la destinée des 350 municipalités pour les cinq prochaines années . Ces élections entament les premiers pas des politiques de décentralisation qui ont pour objectifs d’améliorer le cadre de vie des Tunisiens qui s'est nettement dégradé ces six dernières années.  Le code des collectivités locales qui définit les compétences et qui garantit une autonomie financière et administrative des collectivités a été adoptée, le 26 avril 2018 par l’Assemblée des Représentant du Peuple, dans son intégralité avec 147 voix pour, 10 abstentions et sans aucune opposition.

Ces élections sont, non seulement, une obligation constitutionnelle, c'est un besoin, parce que le citoyen tunisien a besoin d'avoir des municipalités efficaces, légitimes et élues au suffrage universel pour qu'elles puissent réellement réussir leur mission. Ce n'est pas normal du tout qu'on ait des structures provisoires qui dépassent les six ans et qui fonctionnent mal.

Si vous demandez aux Tunisiens ce qu’ils attendent des prochaines élections municipales, la quasi-totalité d’entre eux diront espérer une amélioration de leur environnement quotidien.

L’environnement est « une affaire locale une affaire de proximité » par excellence. La gestion des déchets, l’assainissement, la gestion des parcs et des espaces verts, la gestion et l’entretien des routes de la ville, de la circulation dans les villes, l’aménagement des plages et la police municipale doivent être des compétences déléguées aux municipalités. Nous pouvons rajouter d’autres compétences, les maisons de Culture et de Jeunesse, les bibliothèques médiathèques municipales, les crèches et les assistantes maternelles, les cinémas municipaux, les centres aérés, le plan local d’urbanisme et la mise en œuvre de l’Agenda 21.

Vote utile, obstacle au changement

Nous avons constatés, au cours des 3 semaines de campagne, que le vote utile est le refrain servi par les deux grands partis à la longueur de la journée pour servir leurs listes électorales !

Dans une élection, on appelle « vote utile » un vote que l'on considère comme le plus efficace pour vaincre une liste que l'on ne souhaite pas voir élire. Il ne tient pas nécessairement compte des convictions politiques profondes des électeurs. C'est une tendance que l'on rencontre chez une partie des électeurs dans les systèmes où règne un bipartisme de fait.

Le vote « utile » est un obstacle au véritable changement : c'est bien pour ça qu'il est mis en avant par ceux qui ne veulent rien changer ou juste changer un peu mais pas trop.

Une démocratie qui préconise le vote « utile », est-ce encore une « réelle démocratie maintenant » ? Le vote utile ne renvoie pas à une quelconque « utilité », mais à la peur. Le concept de vote utile est un instrument vicieux, habilement manié par les deux grands partis politiques tunisiens qui gouvernent ensemble le pays depuis 2014.

En 2014 le vote utile subi par les électeurs a abouti à la crise grave actuelle que traverse la Tunisie où l’immobilisme règne en maître absolu. Si nous votons encore utile aujourd’hui, qu’est-ce que ce sera la prochaine fois ? Le vote « forcé », le vote « qui rend service », le vote « opportun », le vote « profitable » ?

Une abstention record à craindre !

Les différents sondages laissent croire que le prochain scrutin municipal sera marqué par un taux d’abstention très élevé.  Cette abstention profitera aux deux grands partis et non aux listes indépendantes au regard du mode suffrage choisi la proportionnelle au plus fort reste déjà utilisée lors des législatives de 2014.

L'abstention peut ainsi être considérée comme un aiguillon démocratique. Mais il ne faudrait pas que la défiance vis-à-vis de la politique finisse par déboucher sur une coupure entre les citoyens et leurs représentants. Si la représentation politique n'a plus de légitimité, le risque serait alors grand d'une rupture du pacte démocratique lui-même. Et d'un retour à d'autres formes de régimes politiques, autoritaires, dictatoriaux. Il y a donc urgence à recrédibiliser l'action politique.

En démocratie, le peuple est souverain, c’est à dire qu’il décide son représentant par le vote.

Demain, laissons le libre choix aux électeurs en leur demandant de voter, en leur âme et conscience, au plus près de ce qu'ils pensent meilleur pour leur pays, pour leur ville,  et pour eux-mêmes, que l'on respecte l'idéal démocratique. Voter, ce n'est pas « donner sa voix à... », C’est « choisir un programme et une équipe. « 

Les concitoyens doivent voter massivement pour mettre fin à cette situation chaotique qui règne dans nos municipalités depuis 7 ans. Votons pour un programme et pour une équipe dynamique, compétente et désintéressé. C’est ça le vote utile au service de la Tunisie et de ses concitoyens.

Aux urnes citoyennes, on ne boude son plaisir d’être acteur dans la vie de sa commune.

A.K

 

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