Nidaa-Ennahdha: Profond malaise dans les deux camps !

Nidaa-Ennahdha: Profond malaise dans les deux camps !

 

Les résultats des élections législatives, bien qu'ils aient accouché de la victoire des deux plus grands partis politiques en Tunisie, à savoir Nidaa Tounes et Ennahdha, avec respectivement 86 sièges (devenus 90 avec l'arrivée de 4 nouveaux députés) et 69, n'ont fait que plonger ces deux partis dans une situation, le moins qu'on puisse dire, très délicate.

En effet, à première vue, tout porte à croire que Nidaa Tounes, ayant le plus grand nombre d'élus au Parlement, aurait la plus grande facilité dans la désignation d'un Chef de gouvernement, qui constituera une formation ministérielle à même de diriger les rouages du pays dans les 5 prochaines années mais aussi dans la désignation du président du futur Parlement.

Mais ceci, sans compter la complexité de l’expérience tunisienne et les dernières évolutions de la scène politique, qui, justement ont été marquées par le déroulement du premier tour comptant pour l'élection présidentielle. Élection qui a accouché de la qualification des deux candidats, Béji Caïed Essebsi et Mohamed Moncef Marzouki, pour un second tour, qui s'annonce très serré.

C'est dans ce contexte que les deux partis vivent un profond malaise, qui risque de compliquer encore la situation, surtout que les décisions stratégiques et les éventuelles alliances divisent, que ce soit chez Nidaa Tounes que chez Ennahdha.

Avec le très bon score que le candidat Marzouki a réalisé, certaines voix se sont élevées au sein de Nidaa pour accuser le mouvement Ennahdha de l'avoir soutenu et pour appeler à ne pas composer avec le parti islamiste. Ces personnes ont considéré qu'Ennahdha a apporté discrètement et indirectement son soutien au Président sortant et que pour cette raison, il n'est pas question de faire confiance au parti islamiste.

Cette frange surtout de la gauche de Nidaa a tout simplement sauté sur l'occasion pour essayer de couper le pont sous les pieds des voix qui appellent pour un gouvernement d'union nationale.

Toutefois, le leader du mouvement, Béji Caïed Essebsi, ne voit semble-t-il pas les choses avec la même intransigeance. Fort de son expérience, Essebssi qui est soutenu par Mohamed Ennaceur opterait pour la raison et le consensus, plutôt que d'aller dans le sens du clash. Il privilégie la Patrie avant le parti et n'a pas comme objectif de seulement écarter les islamistes contrairement à certains Nidaouis durs.

Bien évidemment, dans le camp adverse, à savoir chez Ennahdha, tous ces nouveaux éléments ont été accueillis négativement par le clan dur.

Chez Ennahdha aussi, on accuse Nidaa Tounes de n'être pas clair et de vouloir prendre le mouvement islamiste de court. Ce clan accuse Nidaa de vouloir jouer au plus fin avec Ennahdha et le court-circuiter alors qu'il n'a rien entrepris pour mettre à mal les prévisions et projets de Nidaa.

Mais chez Ennahdha aussi, c'est Rached Ghannouchi, appuyé par Abdelfattah Mourou, qui essaie de faire prévaloir la raison et la sagesse tout en essayant de minimiser les impacts négatifs qu'un tel comportement peut avoir pour la prochaine étape que vivra le pays. Et il semblerait qu'à l’égard d'Essebssi-Ennaceur, Gannouchi et Mourou ont du mal à calmer les durs de leurs partis qui accusent Nidaa de vouloir isoler les islamistes.

En somme, une effervescence et des accusations à tout-va entre les deux formations politiques les plus importantes du pays. Encore faut-il qu'Essebsi et Ghannouchi, forts de leurs soutiens respectifs au sein des deux partis, puissent faire prévaloir la raison et la voie du chemin de l'entente et du consensus.

Néanmoins, une chose est sûre, c'est que les deux partis vivent un profond malaise et une crise de confiance majeure existe désormais entre eux. C'est dans ce sens qu'il faut tout le tact des deux renards de la politique tunisienne pour en sortir indemne, il y va de l'intérêt national.

Le problème c'est que cette crise dépasse le cadre des deux partis et même celui de la politique en général. En effet, certains citoyens, modérés, très importants par le nombre, ont peur de cette situation qui ne peut que favoriser la division et le discours haineux dans le pays. Une situation qui fait également peur au plus haut point les hommes d'affaires influents dans le pays.

Les prochains jours seront très certainement riches en rebondissements et en nouveaux enseignements. Pourvu que ce soit un nuage qui ne fera que vite se dissiper, car si l'entente entre les deux camps ne se réalise pas, c'est vers le blocage le plus total que l'on se dirige et la suite des événements pourrait être tragique...! Affaire à suivre...

Slim Maâtoug