Première formation "Droits humains, droits culturels et statut de l'artiste" en Tunisie par l'association L'Art Rue

Première formation "Droits humains, droits culturels et statut de l'artiste" en Tunisie par l'association L'Art Rue
 
 
L’Association tunisienne L’Art Rue en partenariat avec Artwach Africa d'Arterial Network a organisé du 12 au 15 juillet 2016 une formation sur les droits humains, les droits culturels et artistiques en Tunisie.
 
La nécessité d'une formation spécialisée 
 
Pour L’Art Rue cette formation a toute sa pertinence sur le territoire tunisien au moment où le Ministère de la Culture et de la Sauvegarde du Patrimoine poursuit le travail entamé dès 2011 au sujet de la mise en place de nouvelles lois autour du statut de l’artiste en Tunisie. 
 
Pour les artistes tunisiens,le constat est le suivant : précarité économique de leur situation, absence de statut et, pour certains, difficultés réels à exercer leur art pour des raisons d'atteinte à la liberté d'expression artistique.
 
Des candidats au parcours complémentaires originaires des régions 
 
L’appel à candidature de formation lancé par l'association L'Art Rue en collaboration avec ArtwatchAfrica a rencontré un vrai succès ce qui confirme le besoin pour le territoire tunisien de comprendre et d'avoir des nouveaux outils légaux à propos de la question des droits culturels. Sur 55 candidatures, une vingtaine ont été retenues en fonction de critères précis relatifs de la pertinence de leur parcours associatif ou artistique, de leur motivation... Au final, les 22 candidats proviennent pour la majorité des régions (Gafsa, Hammamet, Kairouan, KalaaSghira, Kebili, Medenine, Menzel Bourguiba, Sfax, Sidi Bouzid, Soliman, Sousse, Tataouine, Zarzis et Tunis) et avaient des parcours variés et complémentaires : artistes plasticiens, photographes, comédiens, musiciens, cinéastes, journalistes, bloggeurs, activistes dans le domaine des droits de l’Homme, opérateurs culturels…
 
Ils se sont tous retrouvés en juillet 2016 dans la médina de Tunis, au siège de l'association L’Art Rue, pour suivre une formation de 4 jours.
 
Une formation de sensibilisation aux droits humains, droits culturels
 
La formation animée et encadrée par Malik Chaoui (membre du groupe de travail sur la politique culturelle en Algérie) est basée sur une méthodologie interactive et participative faisant appel à des expériences émotionnelles pour approcher et comprendre le concept de droits humains et par extension celui de droits culturels. L'objectif de cette formation est de sensibiliser les artistes, membres d'associations, activistes, etc. à leurs droits ainsi qu'au panel juridique existant relatif à la question des droits humains et culturels. 
 
Il s'agit de renforcer les capacités des membres de la société civile en les outillantlégalement afin qu'ils soient capables d'identifier une atteinte aux droits humains, d'alerter la société etde se défendre. Ils deviennent ainsi les meilleurs ambassadeurs sur leur territoire (ville, région, pays) de la défense des droits humains et des droits culturels.
 
Une méthodologie interactive et un temps public 
 
La formation s'est déroulée à travers différents temps forts : 
- Sensibilisation des participants au concept de base du droit humain au cours des 2 premiers jours. L'objectif est de permettre la compréhension de cette notion et de celle de droits culturels qui en découle. Le formateur introduit et définit les notions de base telsque celle de Culture, d'Art, d'artiste. Ce dernier se révèle être un individu comme un autre qui bénéficie en tant que tel de ses droits universels. La liberté est sa matière 1ère pour créer d'où sa vulnérabilité par rapport à cette question. 
 
Il s'agit ensuite d'introduire les instruments légaux de manière à savoir quels sont les articles qui concernent les droits culturels dans chaque charte et déclaration liées aux droits humains (Déclaration universelle des droits humains ; Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ; Pacte international sur les droits civiques et politiques ; Déclaration de Fribourg ; Déclaration universelle sur la bioéthique et les droits de l'homme...) 
 
Cette 1ère partie de la formation aboutit à un exercice pratique de mise en situation et d'utilisation des instruments légaux acquis : simulation d'une audience à propos de la censure d'une œuvre d'Art. Les participants de la formation sont alors répartis en deux groupes chargés l'un de l'accusation et l'autre de la défense. 
 
- Temps public exclusivement dédié au statut de l’artiste en Tunisie à travers l'organisation le 3ème jour d'une table-ronde d'experts réunissant Mme Sonia M’Barek - Ministre de la Culture et de la Sauvegarde du Patrimoine, M. Bilal Aboudi - Coordinateur au sein du Ministère de la Culture et de la Sauvegarde du Patrimoine du Programme d'Appui au Secteur de la Culture en Tunisie et Maître Omar Labiadh - avocat spécialisé sur la question des droits artistiques. Madame la ministre a tenu à ce que son cabinet et les juristes qui travaillent sur le statut de l’artiste soient présents pour entendre et répondre aux questions des participants pendant la table-ronde mais aussi au cours des groupes de travail. Cette table-ronde a permis aux participants d’acquérir des connaissances sur les textes juridiques, les conventions ratifiées par la Tunisie en matière de Droits Humains et de susciter la réflexion sur la diversité en Tunisie et la situation des groupes vulnérables. 
 
 
 
Les groupes de travail ont été définis selon 8 branches d'activités recouvrant tous les aspects constitutifs du quotidien de l'artiste : promotion sociale et légale ; liberté de création et le journalisme culturel ; production, distribution et diffusion ; entreprenariat et financement ; accessibilité, réseaux et mobilité ; éducation et formation ; développement et citoyenneté ; espace public. Ces ateliers ont débouché sur une série de recommandations concrètes car il s'agit de partir des constats du local pour déterminer une ligne de conduite globale. 
 
- Etude de cas à partir d'une réflexion sur le territoire le dernier jour de formation. Les participants sont alors répartis en 4 groupes par le formateur, chaque groupe doit faire l'étude d'un cas réel tunisien d'atteinte aux droits humains et/ou culturels et présenter celui-ci de manière construite devant un jury constitué de membres actifs de la société civile. Il s'agit alors pour chaque participant soit d'approfondir une réflexion soit de sortir de sa zone de confort en défendant un cas touchant aux droits humains, aux droits à la vie privée, à la liberté d’expression, au droit d’accès aux espaces publics pour des activités associatives et 
artistiques.
 
Une formation à réaliser en région avec la collaboration du Ministère de la Culture et de la Sauvegarde du Patrimoine 
 
Cette 1ère formation de 4 jours en Tunisie sur les droits humains et droits culturels est un point de départ important. L'implication, la capacité de travailler en commun et de se remettre en question des participants ont été salués par le formateur qui forme déjà en Algérie et en Mauritanie. 
Le constat de l'association L'Art Rue au sortir de ce temps fort est à présent la nécessité de réitérer sous peu et régulièrement cette formation en région de manière à sensibiliser et à mobiliser le territoire tunisien dans son ensemble au sujet de la question des droits humains et des droits culturels. Il s'agit également de permettre à la société civile de toute la Tunisie de témoigner de sa réalité régionale et de formuler viacette méthodologie de travail leurs recommandations au Ministère de la Culture et de la Sauvegarde du Patrimoine. 
 
La formation fera l'objet d'un rapport plus détaillé mettant en avant les recommandations des participants sur différents aspects des droits humains et droits des artistes.
 

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