Que se passe-t-il entre la Tunisie et l’Algérie : Les signes inquiétants s’amoncellent ?!

 Que se passe-t-il entre la Tunisie et l’Algérie : Les signes inquiétants s’amoncellent ?!

Une petite phrase prononcée par le président algérien, Abdelmadjid Tebboune lors de sa visite d’Etat à Rome a-t-elle été le révélateur d’un malaise, qui ne dit pas son nom dans les relations entre la Tunisie et l’Algérie

« Il y a une convergence totale dans nos positions diplomatiques et politiques. Nous partageons les problèmes de la Tunisie. Nous sommes prêts, les deux, à aider la Tunisie à sortir de l’impasse et ce jusqu’à qu’elle retrouve la voie démocratique », a déclaré le président algérien, à Rome lors de sa conférence de presse conjointe avec son homologue italien.
Le président algérien a ajouté dans la foulée que la situation en Libye a été également évoquée, ce qui rend ses propos encore plus inquiétants, car cela veut dire que la Tunisie est devenue un cas d’ordre sécuritaire pour les deux pays voisins.

Se rendant compte de leur impair et même si aucune réaction officielle tunisienne n’a été enregistrée-alors qu’habituellement Kaïs Saïed est prompt à dénoncer avec véhémence l’ingérence dans les affaires internes de notre pays- les autorités algériennes se sont activées à dissiper le malaise.

En effet une source officieuse algérienne a tenté de désamorcer la crise en estimant que les déclarations du chef de l’Etat algérien ont donné lieu à des « interprétations hypothétiques » qui ne correspondent pas à l'expression explicite de la solidarité réelle du président de la République algérienne avec la Tunisie et les Tunisiens pour les aider à surmonter les difficultés auxquelles ils sont confrontés. "L'Algérie demeure fidèle à son principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des pays (...) Nous faisons confiance au génie des Tunisiens pour trouver des solutions à la hauteur de leurs aspirations, en toute souveraineté et loin des interventions étrangères", a souligné dans la même veine la source officieuse

Le ministre algérien des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra a profité de sa rencontre, quelques jours plus tard avec son homologue tunisien Othman Jerandi en marge du Sommet extraordinaire de l’Union africaine tenu à Malabo, capitale de la Guinée équatoriale, pour affirmer que l’Algérie restera toujours aux côtés de la Tunisie qui fut et demeure encore un appui pour l’Algérie compte tenu du passé, du présent, de l’avenir et du destin commun des deux pays. Le chef de la diplomatie algérienne a, selon le communiqué du ministère tunisien des Affaires étrangères mis l’accent sur la volonté commune qui anime les deux chefs d’Etat de hisser les relations bilatérales aux plus hauts niveaux dans tous les domaines.

Si les deux parties se sont évertuées à désamorcer ce qui aurait pu conduire à une crise dans les relations bilatérales, c’est que des signes inquiétants montrant que les choses n’allaient pas bien entre Tunis et Alger se sont accumulés ces dernières semaines. Ainsi les Tunisiens ont noté avec inquiétude que la situation dans leur pays est devenue un des sujets récurrents dans les entretiens des responsables algériens avec des interlocuteurs tiers. L’identité de vues entre les diplomaties des deux pays s’agissant des relations régionales et internationales qui a constitué un fort et solide lien entre les deux pays n’est plus de mise. Cela s’est manifesté particulièrement sur le dossier libyen, car au moment où la Tunisie plaide pour un règlement libyo-libyen dans une stricte neutralité entre les factions libyennes, l’Algérie a choisi son camp en soutenant le gouvernement d’union nationale et son chef Abdelhamid Dbeïba. De même, au moment où la Turquie reçoit en grande pompe et déroule le tapis rouge au chef de l’Etat algérien, le président turc Recep Tayyip Erdogan lance des piques acérées à l’adresse de la Tunisie et de son président, en défendant ses alliés de l’intérieur le Mouvement Ennahdha et son chef Rachid Ghannouchi.

Sur le plan bilatéral, les choses n’allaient pas mieux non plus. Ainsi on a remarqué la réticence de la société d’Etat algérienne des hydrocarbures SONATRACH à répondre à la demande de la Société tunisienne de l’électricité et de gaz (STEG) de lui fournir du gaz naturel en vue de faire tourner ses centrales électriques, en justifiant cela par le non-paiement par la société tunisienne de ses factures auprès de la partie algérienne. Alors qu’on aurait dû attendre des frères algériens d’accourir à aider la Tunisie dans ces circonstances difficiles pour ses finances publiques, le traitement d’un dossier aussi important d’un point de vue purement commercial a beaucoup ulcéré les Tunisiens. Pour montrer leur bonne volonté, les Algériens ont convoqué le comité bilatéral de coopération dans le domaine énergétique qui s’est réuni à Alger sous la co-présidence des deux ministres chargés de l’énergie. Néanmoins, ce comité n’est pas parvenu à un accord sur les quantités à fournir à la partie tunisienne puisque le procès-verbal de cette session prévoit "la poursuite des discussions et les consultations autour de la demande d'augmentation des volumes contractuels des livraisons de gaz naturel pour satisfaire la demande tunisienne, ainsi que la demande d'augmentation des quantités en GPL et en gaz butane".

Mais ce qui suscite davantage l’inquiétude des Tunisiens c’est la persistance de la fermeture des frontières terrestres entre les deux pays. Si le prétexte invoqué est la propagation du covid-19, ceci n’est plus de mise puisque la pandémie est maitrisée des deux côtés des frontières. La fermeture n’a plus dès lors qu’une seule explication et elle est éminemment politique.

Au moment où la saison touristique bat son plein, cette fermeture prive des centaines de milliers de touristes algériens de la possibilité de venir en Tunisie par voie terrestre comme ils en ont pris l’habitude, interrompue seulement par la covid-19. Sans un retour massif des Algériens, le tourisme tunisien sera privé aussi de l’apport de nos voisins et frères dans une conjoncture particulièrement difficile.

On ne cesse depuis plusieurs mois d’évoquer la tenue prochaine de la haute commission mixte tuniso-algérienne que président les deux chefs de gouvernement. Il faut espérer que cette commission se tienne dans les meilleurs délais pour mettre en œuvre concrètement la solidité des relations bilatérales, mettre en exergue les liens de fraternité unissant les deux pays et l conférer une dimension stratégique à la coopération tuniso-algérienne comme on ne cesse de le souligner dans tous les communiqués rendant compte des entretiens ayant lieu .entre les hauts responsables des deux pays.
RBR

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