Recrudescence des braquages et autres actes violents : Que se passe-t-il vraiment ?

 Recrudescence des braquages et autres actes violents : Que se passe-t-il vraiment ?

 

Les Tunisiens n’ont que ce mot à la bouche. Les braquages, ce dont il s’agit est devenu leur hantise. La recrudescence de ce fléau leur donne raison. Que l’on soit dans la rue, en plein jour ou la nuit, que l’on soit dans les transports publics, le métro ou le bus, que l’on soit devant son école, son collège et son lycée ou sur le chemin qui y mène, on est susceptible d’être victime de braquages. De paisibles dames qui se faisaient teindre leurs cheveux un dimanche en début de soirée dans un salon de beauté se sont même retrouvées nez-à-nez avec un braqueur, un couteau à la main. Il les a détroussé de leurs biens et est reparti avec la voiture d’une cliente qui lui a remis les clefs sous la contrainte. Il est reparti tranquillement le visage découvert sans peur ni gêne.

Avec la recrudescence de ces actes non seulement délictuels mais carrément criminels, il y a lieu de se poser la question : que se passe-t-il en Tunisie. Cette vague de violence est-elle normale ? Evidemment pas. Est-elle admissible et acceptable. Encore non. N’est-elle pas le signe d’une banalisation de cette violence devenue notre lot quotidien ? Dans les discussions toujours animées, à bord de son véhicule dans la circulation, dans la rue, devant et au sein des établissements scolaires, sur les réseaux sociaux, et même dans les travées du Parlement la violence est présente quasi-quotidienne sans que personne n’y trouve à redire ! On a vu des enseignants, des directeurs d’école ou des proviseurs de lycée, eux-aussi victimes de violence de la part de parents ou d’élèves. Ce qui est une grave atteinte à la sacralité de l’acte éducatif.

Banalisation et impunité

Cette banalisation et l’impunité qui en découle sont certes pointées du doigt. La police et la justice sont les premiers remparts contre la violence. Mais celles-ci sont parfois dépassées, démunies, ne disposant pas de minimum de moyens pour faire face à cette vague de violence. Il est du devoir de l’Etat de les doter des instruments leur permettant d’appliquer la loi dans toute sa rigueur. Les instruments matériels mais aussi juridiques leur font parfois défaut. Il importe de dépoussiérer nos lois qui sont d’un autre temps, en vue de permettre aux forces de l’ordre de prendre en charge cette violence de type nouveau et de donner à la justice les moyens de sévir. Pour que l’on ne tombe plus dans ce dicton : la police arrête, et la justice remet en liberté.

Mais au-delà de l’aspect dissuasif purement sécuritaire, indispensable mais insuffisant il faut que la société elle-même secrète ses propres mécanismes de défense. Leur mise en place demande du temps et il importe de s’y mettre car le plus tôt serait le mieux. La famille doit se rendre compte qu’elle a démissionné de son rôle de pilier de l’éducation et doit reprendre la voix au chapitre. L’école donne certes des rudiments de l’éducation civique ou religieuse et offre de l’instruction mais n’inculque pas les valeurs et n’apprend pas les règles du vivre-ensemble.

A prendre à bras-le-corps

La société dans son ensemble doit prendre à bras-le-corps ce fléau qui interpelle et inquiète. Au-delà de l’aspect conjoncturel qui semble lié à des règlements de compte politiciens- car on imagine mal que cette recrudescence ne soit pas lié à la situation de vide institutionnel qui ne dit pas son nom entre deux gouvernements, l’un qui n’arrive pas à partir et l’autre qui ne parvient pas à s’installer- il y a un vrai problème dans le pays.

Il ne suffit pas d’instructions données en haut lieu aux institutions sécuritaire et judiciaire pour qu’il soit réglé. Néanmoins, il faut se féliciter que le président de la République Kaïs Saïed s’en soit préoccupé dans le cadre de ses attributions de premier responsable de la sécurité nationale en conférant avec le ministre de l’Intérieur d’un côté et avec le président du Conseil supérieur de la Magistrature et la présidente du conseil de la justice judiciaire de l’autre.

Il importe aussi qu’une instance soit mise en place rassemblant outre les corps judiciaire et sécuritaire, des juristes, des éducateurs, des hommes et des femmes de culture, des dirigeants sportifs, des responsables de la jeunesse ainsi que des représentants de la société civile en vue de mettre en place une stratégie nationale de lutte contre la violence et les phénomènes qui lui sont liés d’une manière ou d’une autre.

C’est une urgence nationale que le nouveau gouvernement doit l’inscrire parmi ses priorités, en y associant toutes les forces vives de la nation.

RBR

Votre commentaire