Tariq Ramadan reste en prison en France

 Tariq Ramadan  reste en prison en France

 

L'islamologue suisse controversé Tariq Ramadan, inculpé pour viols, reste en prison en France après le rejet ce jeudi par la Cour d'appel de Paris de son recours contre sa détention provisoire pour raison de santé, a appris l'AFP de sources judiciaire et proche du dossier. Avant de se prononcer, la chambre de l'instruction avait désigné un expert médical, qui a jugé l'état de santé de l'intellectuel musulman compatible avec sa détention à la prison de Fleury-Mérogis, en banlieue parisienne.

Ecroué le 2 février, le théologien suisse de 55 ans dit souffrir d'une sclérose en plaques et d'une neuropathie périphérique. Il a refusé d'être extrait de la prison et de comparaître à cette audience à huis clos ce jeudi. Dès son arrivée à Fleury-Mérogis, Tariq Ramadan s'était plaint de crampes, de fourmillements et picotements, selon une source proche du dossier.

Demandant sa libération, il avait saisi la justice qui avait suspendu sa décision dans l'attente des résultats d'une expertise médicale. Cette dernière a finalement jugé l'état de santé de l'islamologue suisse compatible avec sa détention provisoire, selon des sources proches du dossier. L'incarcération de l'intellectuel a suscité un vif émoi parmi ses partisans dans une partie des rangs musulmans, certains dénonçant l'impression d'un "deux poids, deux mesures" voire d'un "complot" contre une des rares figures médiatiques de l'islam européen.

Ramadan a été inculpé le 2 février pour viols, dont l'un sur personne vulnérable, après les plaintes de deux femmes fin octobre qui ont débouché sur une information judiciaire. L'intéressé conteste les accusations. Ce petit-fils du fondateur de la confrérie égyptienne islamiste des Frères musulmans, accusé par ses détracteurs de promouvoir un islam politique et de manier le double discours, avait fustigé "une campagne de calomnie" au début de cette affaire.

Les deux femmes ont confié aux enquêteurs l'"emprise mentale" qu'aurait exercée sur elles ce "maître spirituel". Elles ont décrit des rendez-vous ayant soudainement basculé dans des rapports sexuels d'une grande violence, sous la contrainte, dans des hôtels en marge de conférences à succès de l'islamologue, le 9 octobre 2009 à Lyon (est) et en mars-avril 2012 à Paris.

Ces accusations, que Tariq Ramadan conteste, s'inscrivent dans le cadre de la libération de parole survenue à la suite du scandale Weinstein aux Etats-Unis. La justice a ordonné son placement en détention provisoire car elle craint une fuite à l'étranger ou d'éventuelles pressions sur les plaignantes ou d'autres femmes ayant témoigné sous X - un dispositif destiné à protéger le témoin - lors de l'enquête préliminaire. Pour demander sa sortie de prison, Tariq Ramadan a fourni des certificats établis à Londres et Genève faisant état d'une sclérose en plaques et d'une neuropathie périphérique mais ces résultats sont contestés par un neurologue désigné pour une expertise indépendante.

Dans ses conclusions rendues lundi, il pointe des incohérences dans les certificats de ses confrères, selon des sources proches du dossier. "Le diagnostic de ces pathologies à ce jour reste incertain", juge-t-il. Mais la défense fait valoir que l'expert n'a pas eu accès au dossier médical complet. "L'état neurologique clinique et le questionnement diagnostique ne sont pas incompatibles avec une détention et peuvent être menés en ambulatoire", conclut aussi l'expert. D'autant que ces maladies "ne peuvent en aucun cas s'aggraver brutalement".

Maladie dégénérative du système nerveux, la sclérose en plaques est incurable mais son évolution peut être ralentie pendant plusieurs années. L'expert estime néanmoins nécessaire de réaliser "un bilan neurologique complet et sérieux". Après l'examen mené par cet expert, Tariq Ramadan, qui se plaignait de graves fourmillements dans les jambes, a été hospitalisé le 16 février et pendant quatre jours.

Une source proche du dossier a expliqué à l'AFP que le compte-rendu d'hospitalisation conclut à des douleurs neuropathiques accrues pouvant être liées à "des facteurs psychologiques" liés à la détention ou à l'arrêt de soins pratiqués habituellement, dont des massages et du stretching. Dans un mémoire transmis à la justice, la défense de Ramadan critique un examen effectué "sommairement" et fait valoir que le médecin ne disposait pas du dossier médical de Ramadan.

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