Tunisie: Mégaprojet d'Enfidha, quels enjeux ?

Tunisie: Mégaprojet d'Enfidha, quels enjeux ?

 

Afin  de revenir sur la scène politique, l’ancien président français a créé en 2013 un fonds d’investissement, d’un capital cible de 1 milliard d'Euros. Pour ce faire, il a pris son carnet d’adresses et commença à prospecter les grandes fortunes et les fonds souverains du Moyen-Orient et d'Asie, démarchant émirs et nababs.

Il a déjà obtenu un engagement de 200 millions d'euros du Qatar, et le fonds souverain d'Abou Dhabi s’est aussi engagé, pour un montant non annoncé... Il compte ainsi séduire les électeurs français, en investissant dans une France  ruinée, obérée par les dettes et en faillite non annoncée, sur fond de montée du chômage et une politique d’emploi qui n’a pas donné les résultats escomptés.

Du Projet de la Voiture 100% tunisienne au Méga Projet d’Enfidha

En Tunisie, septembre 2014, à l’issue des travaux de la rencontre «Invest in Tunisia, Startup Democracy », auquel a participé le Premier ministre français, on annonce en grande pompe le lancement d’un mégaprojet à Enfidha baptisé le « Tunisia Economic City » d’un coût global de 50 Milliards USD censé créer 200 000 emplois d’ici à l’horizon 2017.

DES EMPLOIS POUR DES CHOMEURS, ISSUS D’UN ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR QUI FAIT PÂLE FIGURE DANS LES ÉVALUATIONS INTERNATIONALES, ET D’UN SYSTÈME DE FORMATION PROFESSIONNELLE EN FAILLITE.

Pour mémoire, le gigantesque projet immobilier du lac a été abandonné, suite au différend entre l’administration tunisienne et les investisseurs du Golfe sur l’emploi de cadres tunisiens, jugés non qualifiés par les promoteurs.

Pour mémoire aussi, le projet d’Enfidha, annoncé par un ressortissant tunisien émigré en Arabie, ressemble à s'y méprendre au fameux projet de la voiture 100% tunisienne. Des projets à effet d’annonce et non réalisables.

DES PROJETS PLUTOT DESTINÉS A PERMETTRE A CERTAINS DE FAIRE SOUCHE DANS LA POLITIQUE LOCALE, QUI ESTIMENT À TORT QUE PATRIOTISME ET PROFITS PEUVENT FAIRE BON MÉNAGE.

D’où proviendrait tout cet argent, dans un contexte de crise mondiale aggravé par les conflits de l’Ukraine et les ravages de l’ISI. La destruction de l’ISI requiert la mobilisation de dizaines de milliards de dollars USD par les pays du Golfe, principaux bailleurs de fonds dudit projet.

Le projet touristique de Hammamet Sud a coûté seulement 2 milliards USD, un montant dont la majeure partie proviendrait de réseaux mafieux, une opération de blanchiment d’argent de grande envergure, tolérée par le régime déchu…..

Une diarrhée de Mégaprojets Avortés !

Je pourrais énumérer des projets, de tailles plus ou moins importantes, jusqu’à la nausée…tous abandonnés, des projets à effet tapageur et à visée purement politique, qui ont rendu riches plusieurs petits affairistes dont l’honnêteté n’est pas une vertu cardinale. Je citerais :

•Le projet « Taparura » à Sfax, d’un coût de 100 Millions USD, qui a englouti des millions de TND, dépensés principalement dans les études de faisabilité et les pré-études. Ce projet a été abandonné suite aux diverses malversations. Le financement de ce projet fut assuré par un prêt de 34 Millions d’Euros. Un prêt que le contribuable tunisien continue de rembourser. On a eu vent que le gouvernement provisoire compte le relancer !

•Le projet de « Tunis Sports City », un investissement émirati, pour un coût total de près de 5 Milliards USD. Projet abandonné suite à des conflits d’intérêt entre les investisseurs et des caciques du régime déchu suite à des spéculations immobilières et qu’on a voulu, derechef, relancer en 2012.

•Le projet « Tunis Financial Harbor », ou Port financier de Tunis, lancé en grande pompe en 2009, par des investisseurs du Bahreïn, fut aussi abandonné. Le coût du projet était de 5 Milliards USD, censé créer entre 6 000 et 16 000 emplois et qu’on essaye de ressusciter par le projet d’Enfidha !

•Le projet touristique de Kerkennah déclaré en 2009, repris en 2011 et en 2014, connaissant l’île et la zone, ce projet est voué à l’échec, seulement les spéculateurs y ont à gagner sur la valeur des terrains dont les propriétaires ont été contraints de vendre pour seulement 1 TND le m2 à une société privée œuvrant pour des proches de l’ancien régime et qui a encore droit de cité.

•Le lancement en 2012 d’un projet d’un centre arabo-chinois pour l’attraction des touristes chinois.

•Le projet « Diar Qatar » au sud tunisien d'un montant de 80 Millions USD lancé en fanfare en 2010...un projet mort-né, on peut encore voir sa pierre inaugurale transformée en pierre tombale, mais que l’on veut aussi relancer !
 
Décidemment, l’œil rivé sur les prochaines élections, le personnel politique, et les affairistes de tous acabits ne manquent pas d’imagination pour garder leurs emplois. Ces projets n’ont fait qu’attirer divers affairistes et spéculateurs pour s’enrichir comme leurs prédécesseurs, sur les dépenses indirectes…et corrompre, au passage, l’administration et le personnel politique…

Pourquoi Le Projet d’Enfidha ?

Est-ce une occasion pour le blanchiment de milliards de USD mal acquis qui ont servi aussi à financer les actes criminels qu’on dénomme indument par le vocable « Terrorisme » : 50 Milliards USD, une belle aubaine ?… alors que, ironiquement, un projet de loi pour lutter contre le terrorisme et le blanchiment d’argent, qui n'en est qu'au début d'un long parcours législatif, est en train d’être finalisé à l’ANC !

Même si avéré, quelles concessions devraient faire la Tunisie pour ce projet ? Abandonner sa souveraineté, abandonner tous ces grands marchés qu’offre la Russie suite à l’embargo sur les produits européens et US : Huile d’olive, agrumes, tourisme, énergie… ? Autant de questions qui méritent réponses.

Dans ce contexte, n’a-t-on pas annoncé l’exportation de 25 000 tonnes d’huile d’olive vers la Russie…Est-ce annulé ? Une affaire à suivre. Ces providentiels investisseurs, des pétromonarchies arabes, pierre d'angle des relations entre les USA et le monde, nous obligeraient-ils à nous joindre à l’embargo imposé à la Russie, et surtout après les derniers accords commerciaux conclus par la voisine Algérie avec la Russie, qui ont fait grincer leurs dents aux pays occidentaux, une Algérie forte par ses 400 Milliards USD de réserves ?

L’ORDRE MONDIAL IMPOSÉ PAR L’OCCIDENT, EST EN COURS DE CHANGEMENT. UN CHANGEMENT ÉPIQUE MENÉ PAR LE FAMEUX BRICS. LA TUNISIE DOIT CHOISIR SON CAMP !

La Russie a dernièrement abandonné l’USD et l’Euro dans tous ses échanges commerciaux avec ses partenaires. Une décision courageuse qui causerait une chute vertigineuse de cette monnaie imposée depuis 1949 par les USA, sortie gagnante de la 2eme guerre mondiale, comme monnaie principale dans les échanges commerciaux, et ce contre le gré de l’URSS et de la Chine….

Des mégaprojets en Tunisie, au Maroc, ou en Afrique, ne feront que redonner de la vigueur au billet vert ! Déjà, les USA mènent leur guerre économique et commerciale dans toute l’Afrique contre la Chine alliée principale de la Russie. La France aussi, très va-t-en-guerre, a mené ses croisades dans plusieurs pays: Mali, Centrafrique…

En épilogue, je dirais que si le projet d’Enfidha est conclu, sur papier, c’est que les USA espèrent un effet de ricochet dans plusieurs pays africains, en quête d’investissements étrangers, boostant ainsi le billet du « In God We Trust » en se joignant à l’embargo contre le grand ours Russe.

POUR L’HEURE, IL NE FAUT PAS ÊTRE SIMPLEMENT SUR DES HYPOTHÈSES, IL FAUT ÊTRE SUR DES CERTITUDES, QUE SEUL L’AVENIR POURRAIT PORTER, TOUT EN RAPPELANT QUE LA MISSION PREMIÈRE DES GOUVERNEMENTS EST D’ALIGNER ENTRE L’INTERÊT DES INVESTISSEURS ET L’INTÉRÊT NATIONAL,  ET FAIRE FACE AUX EXCÉS D’UN CAPITALISME SANS GARDE-FOU.

Farouk Ben Ammar