Tunisie - Quel avenir pour Cactus Prod. et Attounissia TV ?
Depuis le lancement d’un mandat d’arrêt contre Sami Fehri, de nombreuses questions ont été soulevées quant à l’avenir de Cactus Prod. et de la chaîne Attounissia TV.
Pour répondre à ces questions, nous avons d’abord essayé de connaître la situation actuelle de cette société de production et de la chaîne.
Un début d'investigation montre que Cactus est une société de production audiovisuelle, qui dispose de ses propres studios, au nord de la capitale, sur la route de Bizerte.
C’est une société de droit tunisien expropriée à hauteur de 51% (actions de Belhassen Trabelsi) et à 49% sous tutelle judiciaire (les parts du producteur Sami Fehri). Donc l'Etat est majoritaire dans l’entreprise, et c’est pour cela qu’après l’expropriation et la mise sous tutelle, Cactus a été placée sous régime d’administration judiciaire.
Malgré le fait qu’on ait retiré à Sami Fehri toute gestion, la société a progressivement repris ses activités et ses tournages, tant pour son propre compte que pour le compte d’autres sociétés de production, mais sa situation financière ne s’est pas du tout améliorée en l’absence, paraît-il, de rentrées d’argent conséquentes, depuis sa mise sous séquestre.
Entretemps, de nouvelles sociétés de production ont été montées par certains journalistes de la boîte. Sociétés qui ont produit des émissions de qualité, prêtes à être diffusées sur Attounissia TV. Les producteurs ont élaboré les concepts, et assuré la production quitte à sous-traiter celle-ci à Cactus Prod. et utiliser ses studios et ses équipes de tournage extérieures.
Si les choses sont claires pour Cactus et les nouvelles sociétés de production qui collaborent avec elle, du moins au niveau des propriétaires et du financement, la situation n’est pas du tout claire pour Attounissia TV.
D'après certaines informations, il s’agirait d’une chaîne, diffusée à partir de la plateforme Nilesat et enregistrée dans l'Etat de Delaware aux USA. Elle appartient en réalité à la société Rainbow Media Tunisia LLC, société de droit américain, filiale à 100% de la société Rainbow Holding Company LLC (société de stock invest), détenue par une citoyenne… belge.
Attounissia TV, est quant à elle, dirigée par un citoyen français qui s’appellerait Pascal Piron. Certaines informations disent même que ce dernier l’a vendue le 24 mai dernier à un certain Jean-Marie Giffard ! Et il semblerait que Sami Fehri n'a aucune fonction dans les structures juridiques de Rainbow Holding.
Donc l'éditeur/diffuseur, la société Rainbow, n'est en rien une société tunisienne et/ou résidente, redevable au fisc, détentrice d'une autorisation d'exercice et de diffusion.
Le schéma identifié étant paraît-il le suivant : une (des) société(s) de production Onshore exporte(nt) sa (leurs) production(s) audiovisuelle(s) à une chaîne TV étrangère qui les diffuse en exclusivité et dont la totalité de la programmation est dédiée au marché local.
Ce schéma appelle normalement un mode de facturation, de rapatriement, de comptabilité et de régime de change appropriés. Et c’est probablement pour cela que suite à une plainte, déposée par une chaîne de TV privée de la place, pour concurrence déloyale et pour contournement de financement d'une société étrangère par les IP (investissements publicitaires), que les services de douane ont effectué la fameuse descente de contrôle au sein d'une entreprise saisie par l'Etat.
L’affaire a pris une autre tournure parce que le paiement de la contrepartie de la diffusion de spots publicitaires sur une chaîne étrangère est interdit sans l'accord de la Banque centrale.
… Entretemps, Cactus a été rattrapée par d’anciennes plaintes instruites du temps du gouvernement Ghannouchi déposées par la Télévision Tunisienne et ses syndicats, et sa situation s’est compliquée suite à l’arrestation de son fondateur.
Ainsi et pour revenir au devenir de Cactus Prod. et d’Attounissia TV, deux options sont envisagées pour la société de production :
Il s’agit de garder son statut actuel, étant sous administration judiciaire, quitte à changer d’administrateur si nécessaire et à recruter un nouveau directeur de production pour garantir la poursuite de ses activités.
Il s’agit aussi de procéder à la cession des parts de l’Etat (51%) qui ont été confisquées, à des investisseurs qui se chargeront de sa gestion.
Quant à Attounissia TV, bien que son lancement ait été lié à Cactus Prod. qui a produit la majorité de ses programmes, elle peut continuer à diffuser des productions achetées aux nouvelles sociétés de production de Moez Ben Gharbia et Naoufel Ouertani, et même à Cactus ou à n’importe quelle autre société de production.
A moins que ses propriétaires étrangers ne décident de la vendre à des investisseurs tunisiens qui sauteraient sur l’affaire non seulement du fait de la notoriété de cette jeune chaîne qui a pulvérisé des records d’audience en un laps de temps très réduit, mais surtout du fait de la liberté d’expression exceptionnelle dont elle bénéficie.
Attounissia TV étant diffusée de l’étranger, personne ne peut en effet intervenir sur son contenu à part ses propriétaires.
M.C.