Tunisie-service militaire : il n’y aurait pas d’autres solutions ?

Si vous avez plus de 20 ans, peu importe que vous soyez diplômé ou pas, fraîchement sorti de l'université ou chômeur

de longue durée, travaillant dans une société ou pour votre propre compte, dans tous les cas votre profil nous intéresse. C'est l'annonce que devrait faire le ministère de la défense dans sa campagne de recrutement des personnes à passer une année dans le château de la "Military Academy" plus connue sous le nom de la caserne.

Ca ressemble beaucoup à un casting pour participer à une émission de télé-réalité à la seule différence que pour la sélection il y a beaucoup plus de places que de candidats.

Sur un plan juridique, la constitution Tunisienne a clairement stipulé dans son article 15 que "Tout citoyen a le devoir de protéger le pays, d’en sauvegarder son indépendance, sa souveraineté et l’intégrité du territoire national. La défense de la patrie est un devoir sacré pour chaque citoyen".

En des termes simples, l'Etat tunisien dit clairement qu'il n'y a pas d'amour mais plutôt des preuves d'amour pour sa patrie. Pour ce faire, chaque tunisien est dans l'obligation de remplir "son devoir national" en s'engageant dans le service militaire.

Il est vrai qu'en période de colonisation cette initiative était d'une importance capitale et que tout homme libre, en bonne santé, se devait d'être soldat par définition.

Grâce au patriotisme militaire de ses combattants et de ses martyrs, la Tunisie s’est libérée depuis 53 ans du fardeau de la colonisation et a réussit depuis à faire son bonhomme de chemin grâce aux choix politiques de ses leaders et de ses élites qui ont construit et construisent encore le pays.

Dans une période, où l'on ne se défend plus avec des fusils pour éloigner le danger mais plutôt avec le savoir pour éviter la colonisation économique qui sévit sauvagement, la Tunisie a fait le bon choix de miser sur l’édification d'une économie du savoir au détriment d'investissements dans les armes. Et c’est tant mieux.

Les temps changent et les choses évoluent, et nous sommes en droit de se poser des questions sur l'intérêt d'accomplir le service militaire. Surtout quand on constate que cette incorporation sous les drapeaux en tant que soldat pendant toute une année ou même pour 21 jours (quand il s'agit de faire son service national dans le cadre des affectations individuelles) est très impopulaire en Tunisie. S’agit-il d’un manque de patriotisme ? Je n’en suis pas si sûr ! Peut-être que le patriotisme revêt d’autres formes comme ce qu’on appelle le patriotisme économique (le fait de consommer des produits locaux) ou encore faire en sorte d’être plus productif au travail etc.

Il existe certes des dérogations pour bien des cas. Sous certaines conditions le jeune est en droit d'obtenir un sursis et parfois même une dispense de l'accomplissement du service national.
Mais curieusement, parmi les conditions aucune ne parle des jeunes entrepreneurs qui essayent tant bien que mal de développer leurs activités afin de hisser haut le tissu économique et qui ne peuvent se permettre d'arrêter le travail ne serait-ce qu’une seule journée.
Par ailleurs, certains se demandent pourquoi dans un pays où on cherche à instaurer une égalité homme-femme, on n’oblige pas la femme à faire le service militaire. S'agit-il juste d'égalité dans les droits et non dans les obligations ?

Autre point important, bien que nous ayons eu l'information, d'une source informée, qu'il n'existe pas de contingent en terme de nombre d’incorporés, il est étonnant de voir la rigueur et l'intransigeance de certains policiers qui assurent les vérifications de papiers dans les rues.

Pas plus tard que mercredi matin du côté du Mourouj, deux agents de la circulation ont arrêté une voiture qui comptait à son bord un chauffeur accompagnant deux personnalités étrangères dont les noms figurent au Guiness Book des records.

Après le contrôle de routine, il s'est trouvé que le chauffeur n'avait pas effectué son service militaire.  Et voilà que le monsieur se fait rafler sous les yeux des deux étrangers qui, choqués, ont dû attendre près de 45 minutes, le temps qu'un nouveau chauffeur les récupèrent. Et l’image de notre pays dans tout cela!
 
Et la solution ?

Convaincu des orientations judicieuses et de la politique éclairée de la Tunisie  qui a adopté un processus de réforme continu afin d'édifier un avenir meilleur et compte tenu du travail acharné auquel s'adonne les membres du gouvernement je suis persuadé qu'en matière de service national, le ministère de la défense étudiera (si ce n'est déjà fait) de nouvelles formules à même d'arranger tout le monde.

Ainsi, on devrait peut-être donner une dérogation aux jeunes entrepreneurs, supprimer les rafles dans les cafés et les rues et surtout instaurer un service militaire volontaire.

Un service militaire volontaire, certes, mais tout en faisant en sorte que les personnes éligibles payent leur participation pécuniaire (entre 30% et 50% du salaire pendant un an) sans avoir à arrêter leur travail. N'est ce pas une belle façon de dire merci à son pays que de partager son salaire afin de renflouer les caisses de l'Etat d’autant plus que ce genre de système consolide le principe d’égalité entre les citoyens. A méditer!

Par Mohamed-Hamza Lakhoua