Voilà pourquoi Chedly Ayari pourrait terminer son mandat à la tête de la BCT

Voilà pourquoi Chedly Ayari pourrait terminer son mandat à la tête de la BCT

Il ne fait aucun doute la responsabilité de la BCT et plus précisément celle de son gouverneur Chedly Ayari, en sa qualité de président du « comité d’analyses financières » est évidente dans ce nouveau « blacklisting » de la Tunisie parmi « les pays tiers susceptibles d’être fortement exposés au blanchiment de capitaux et au financement du terrorisme ». Mais l’on ne peut admettre qu’une seule personne aussi importante soi-elle ou encore une seule institution de l’Etat assument à elles seules l’entière responsabilité d’un tel gifle qui tombe au mauvais moment. Comme elle ne peut pas être su seul ressort du gouvernement actuel étant donné que la demande émise par le « Groupe d’action financière internationale » (GAFI) à la Tunisie pour se conformer aux critères édictés date de 2012 et que le rapport n’a été réalisé qu’en 2017, soit cinq ans plus tard.

Inutile de revenir sur la responsabilité de la « Troïka » dans la recrudescence du terrorisme et son laxisme face à la circulation de l’argent sale. La déficience de notre système est criarde sur ce point précis et le financement occulte des partis politiques et de ces milliers d’associations, caritatives notamment, qui ont poussé comme des champignons n’est qu’un secret de Polichinelle.

Toutefois, la réaction « spectaculaire » du chef du gouvernement d’annoncer le limogeage du gouverneur de la banque centrale comme si on voulait l’humilier, n’honore pas son auteur. D’autant plus que la décision finale ne lui revient pas, non plus, mais plutôt à l’Assemblée des représentants qui doit entériner par une majorité absolue de 109 voix au moins, cette décision, ou plutôt cette proposition. Les procédures de nomination ou de limogeage du gouverneur de la Banque centrale sont assez complexes et compliquées. L’article 78 de la Constitution du 27 janvier 2014 stipule, en effet, que « le Président de la République procède, par voie de décret présidentiel à la nomination du Gouverneur de la Banque centrale sur proposition du Chef du Gouvernement et après approbation de la majorité absolue des membres de l’Assemblée des représentants du peuple. Il est mis fin à ses fonctions selon les mêmes modalités ou à la demande du tiers des membres de l'Assemblée des représentants du peuple et l’approbation de la majorité absolue de ses membres ».

Il faut revenir six ans en arrière, Chedly Ayari a été proposé en juillet 2012 par le président provisoire Moncef Marzouki après accord avec le chef du gouvernement de la Troïka Hamadi Jebali. Marzouki voulait se débarrasser de Nabli à qui il reprochait d’avoir été ministre de Ben Ali. Ayari s’était à cette période rapproché du mouvement Ennahdha qui a fait appel à lui pour superviser son programme économique en 2011. Et c'est sur son instigation que son nom a été proposé pour diriger la prestigieuse institution financière. Economiste de renom, ancien doyen de la faculté de sciences économiques de Tunis et plusieurs fois ministre sous Bourguiba, il avait également dirigé la BADEA(Banque arabe de développement économique africaine. Son mandat court jusqu’au mois de juillet 2018.

Or, selon certaines sources dont les deux députés Mondher Belhaj Ali et Sahbi Ben Fredj, la destitution « n’est pas garantie ». Le mouvement Ennahdha a été surpris d’apprendre la nouvelle de la «révocation » de Chedly Ayari ». Comme, semble-t-il, il n’ait pas été consulté à propos de la proposition de Marouane Abbasi pour lui succéder. Avec la fin de « consensus » annoncé unilatéralement par le mouvement Nidaa Tounes, la partie s’annonce difficile le 15 février au sein de l’hémicycle. Car, sans le soutien du groupe parlementaire d’Ennahda, Chedly Ayari pourrait terminer son mandat et rester à sa place jusqu’au 24 juillet prochain.

Cependant, d’autres sources, cette fois-ci proches de Monplaisir, pensent que la chef du gouvernement a obtenu l’accord préalable de Rached Ghannouchi le président d’Ennhdha avant d’annoncer sa « décision-proposition ». Elles n’excluent pas, également, que lors de sa rencontre, le 1er février avec le chef de l’Etat Béji Caid Essebsi, la question du remplacement du Chedly Ayari, qui était déjà dans l’air, ait été évoquée entre amis. En plus de cela, les deux super conseillers  auprès du chef du gouvernement, chargés du dossier économiques, Tawfik Rajhi et Ridha Sai sont « nadhaouis » et ont leurs bureaux à la Kasbah depuis le gouvernement Hamadi Jebali en 2012.

C’est pourquoi la plénière de jeudi 15 février qui sera consacrée à l’examen de la demande du président de la République de révoquer Chedli Ayari et d’approuver la nomination de son successeur Marouane Abbassi, sera chaude. Jusqu’ici les partis de la majorité comme de l’opposition ne se sont pas prononcés sur la proposition. Ce sera probablement une occasion pour mettre à l’épreuve la coalition actuellement au pouvoir et qui rassemble particulièrement Nidaa Tounes et Ennahdha.

B.O

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