Abdelkarim Zbidi sur Al-Hiwar Ettounsi : des idées claires, une communication qui laisse à désirer

Abdelkarim Zbidi sur Al-Hiwar Ettounsi : des idées claires, une communication qui laisse à désirer

 

Le ministre (démissionnaire) de la Défense nationale Abdelkarim Zbidi s’est livré ce jeudi soir à sa première prestation télévisée de candidat à l’élection présidentielle, en étant l’invité de Myriam Belkadhi sur Al-Hiwar Ettounsi.

Si l’homme est paru avoir des idées claires sur les défis de la fonction qu’il aspire à remplir ainsi que sur les projets qu’il compte mettre en œuvre, il a montré des insuffisances certaines dans la manière de les présenter. Les mots lui manquaient et ses hésitations faisaient mauvaise impression. D’où la nécessité pour lui d’être coaché car on le voit mal tenir un discours improvisé, ni prendre part à un débat dont il sortira perdant devant des candidats plus aguerris.

Cela ne l’a pas empêché de défendre avec une certaine conviction sa candidature en tant qu’indépendant ce qui le met au-dessus des partis et à égale distance de chacun d’eux, de quoi lui donner la marge de manœuvre nécessaire pour faire aboutir ses projets notamment législatifs et faire de lui un arbitre lorsque des crises surviennent.

Tout en étant indépendant, il ne rejette pas pour autant les soutiens des partis politiques, des organisations de la société civile et des personnalités indépendantes. Il en fait même un motif de fierté ainsi que la preuve de sa capacité de rassembler autour de lui des parties diverses et variées, ce qui peut lui être utile lorsqu’il accède à la magistrature suprême pour mettre en œuvre ses idées.

Homme politique ou pas homme politique, la question qui taraude les Tunisiens, pour lui est simple à déchiffrer. « Si la politique, c’est de mentir, de diffamer et d’insulter les autres, je refuse d’y adhérer, si c’est agir pour le bien commun, être au service des autres, j’en ai fait depuis toujours, a-t-il estimé

Tout en étant favorable à une « entente nationale » entre toutes les parties, sur le modèle de la politique conduite par le défunt président Béji Caïd Essebsi, il estime que ce n’est pas son rôle de mettre en place un gouvernement de consensus entre des forces politiques aux antipodes les unes des autres. « Cela relève de la responsabilité du parti qui arrivera en tête lors des prochaines élections législative » a-t-il affirmé.

Sur la Constitution, ses idées sont claires également. Dans le monde il y a deux régimes politiques, le présidentiel et le parlementaire, mais chez nous le choix a été fait d’adopter un régime qui n’est ni l’un ni l’autre, « un régime compliqué » qui est à la base des problèmes que connait le pays.

Il s’est engagé dans la première année de son mandat à engager des concertations pour le choix du régime auquel adhère le plus grand nombre de Tunisiens au sein du Parlement et si nécessaire par la voie d’un référendum populaire. Il n’a pas dit néanmoins quel régime politique a ses faveurs.

« Je ne sais pas gazouiller et je ne suis donc l’oiseau rare de personne » a été sa réponse quand la journaliste lui a dit qu’on le considérait comme proche d’Ennahdha. Cependant s’il a reconnu des amitiés personnelles au sein du parti islamiste comme celle qui le lie à Lotfi Zitoun depuis que je l’ai connu lorsqu’il était conseiller de Hamadi Jebali à la Kasbah, il n’a pas été tendre envers le mouvement islamiste, puisque selon lui il y a un rapport entre l’appareil secret d’Ennahdha et les assassinats politiques des martyrs Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi.

Sans interférer dans les affaires de la justice ni dans celles des investigations menées par les services sécuritaires il a affirmé sa volonté d’accélérer « la recherche de la vérité » dans ce dossier auquel il accorde la priorité. Le suivi de cette question sera un point permanent à l’ordre du jour du Conseil de la sécurité nationale, a-t-il souligné.

Elever la représentation diplomatique entre la Tunisie et la Syrie au niveau des ambassadeurs figure parmi ses priorités au lendemain de son élection. L’objectif étant d’encadrer la communauté tunisienne forte de 5000 à 6000 âmes, de développer la coopération avec Damas y compris dans le domaine sécuritaire et de desserrer l’étau autour de la Syrie, a-t-il affirmé.

Interrogé sur sa démission de ses fonctions de ministre de la Défense nationale, il a indiqué qu’il a remis sa lettre de démission au Président de la République par intérim, Mohamed Ennaceur du fait que son poste entre dans les prérogatives de ce dernier. « Le président m’a dit que la question serait réglée en même temps que celle concernant tous les membres du gouvernement qui sont candidats à la présidentielle et aux législatives » a-t-il ajouté en affirmant que son poste ne peut rester vacant et qu’il expédie les affaires courantes jusqu’à la nomination de son successeur.

Etant invité en direct sur le plateau de Myriam Belkadhi quelques minutes après l’annonce par le Chef du gouvernement Youssef Chahed de sa décision de déléguer ses prérogative au ministre Kamel Morjane, Zbidi a affirmé que cela « est tout à fait normal ». « Certes, cela n’est pas imposé par la loi, mais ça relève de l’éthique politique. D’ailleurs, les ministres candidats aux législatives doivent faire de même et le chef du gouvernement aurait dû prendre cette décision bien avant », a-t-il dit.

Attendue par ses sympathisantes comme par ses détracteurs, la prestation d’Abdelkarim Zbidi a donné de l’eau aux moulins des uns et des autres. Les premiers ont découvert un homme sage, pondéré, qui a des idées claires et inspire confiance. Les autres mettent l’accent sur ses hésitations, ses lenteurs et une capacité défaillante de communiquer.

Avare de déclarations, peu porté sur les médias, de caractère réservé, parlant peu à l’image de l’armée qu’on appelle « la grande muette» Zbidi récolte ce qu’il a semé.

S’il veut gagner son pari et accéder au sommet de l’Etat, il doit tout mettre en œuvre pour relever le défi de la communication. Ce n’est pas simple mais ce n’est pas impossible non plus.

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