COP28 - ONU : Un plan pour transformer les systèmes agroalimentaires en puits de carbone

COP28 - ONU : Un plan pour transformer les systèmes agroalimentaires en puits de carbone

Alors que la COP28 entame ses derniers jours de travaux à Dubaï, l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) a présenté dimanche un plan révolutionnaire qui vise à transformer les systèmes agroalimentaires mondiaux en puits de carbone d’ici à 2050.

La FAO a identifié 10 domaines prioritaires, tels que l'élevage, les sols et l'eau, les cultures, les régimes alimentaires et la pêche. L’objectif est de transformer les systèmes agroalimentaires -qui englobent la façon dont les aliments que nous consommons sont produits, transportés et éliminés- d’émetteurs nets de gaz à effet de serre en puits de carbone, capturant 1,5 gigatonnes d’émissions par an.

Cette révolution contribuerait à éliminer la faim dans le monde sans pousser la planète au-delà de la limite de 1,5 degré Celsius de réchauffement climatique fixée par l’Accord de Paris sur le climat adopté en 2015.

En marge de la Conférence des Nations Unies sur le climat à Dubaï (COP28), ONU Info s'est entretenu avec David Laborde, Directeur de la Division de l'économie agroalimentaire à la FAO, qui a déclaré que la feuille de route est conçue pour éviter le « pessimisme » et offre des pistes pour agir aujourd'hui d’une manière qui peut profiter à tous.

« Nous avons besoin que les décideurs politiques agissent. Nous avons besoin que la société civile soit mobilisée et que le secteur privé comprenne que faire de meilleurs choix aujourd’hui signifie rendre les investissements plus durables et plus rentables pour demain », a-t-il dit.

Même si 120 points d’action peuvent sembler beaucoup, M. Laborde a souligné que l’objectif final est de parvenir à « une transformation du système où chacun doit jouer un rôle ».

« Un bon point de départ »

Parallèlement, l'Economiste en chef de la FAO, Maximo Torero, a déclaré à ONU Info que l'objectif de cette feuille de route est de transformer les systèmes agroalimentaires grâce à des actions climatiques accélérées pour « contribuer à assurer la sécurité alimentaire et la nutrition pour tous ».

Avec environ 738 millions de personnes souffrant de malnutrition chronique dans le monde, M. Torero a estimé que l'alimentation doit faire partie du débat sur le climat et doit attirer les investissements climatiques, qui se situent actuellement à seulement 4%.

Selon un rapport publié dans le cadre de la feuille de route, la FAO note que les financements climatiques destinés aux systèmes agroalimentaires sont étonnamment faibles et continuent de diminuer par rapport aux flux financiers mondiaux pour le climat, à un moment où ce type de financement est nécessaire de toute urgence.

Maximo Torero a déclaré que le travail effectué à la COP28 est « un bon point de départ » et que cette feuille de route peut fournir des orientations pour la mise en œuvre de la Déclaration des Émirats arabes unis sur l'agriculture durable, les systèmes alimentaires résilients et l'action climatique, qui a été présentée à l'ouverture de la COP28.

Accélération de la mise en œuvre

L'initiative de la FAO a été présentée lors de la journée consacrée à l'alimentation, à l'agriculture et à l'eau à l'Expo City de Dubaï, où les ministres et autres hauts fonctionnaires sont réunis pour discuter des moyens de mettre en œuvre cette Déclaration des Émirats arabes unis, désormais signée par plus de 150 États membres.

Dans un message adressé à l'événement de haut niveau, la Vice-Secrétaire générale de l'ONU, Amina Mohammed, a souligné que la Déclaration est une « déclaration puissante de volonté politique pour conduire les transitions dont nous avons besoin » alors que l'échéance pour réaliser le Programme de développement durable à l’horizon 2030 approche à grands pas.

« Alors qu’il nous reste sept ans pour atteindre nos objectifs en matière de développement durable et de climat, nous devons de toute urgence renforcer nos efforts collectifs en utilisant les systèmes alimentaires comme levier pour accélérer la mise en œuvre », a-t-elle dit.

Mme. Mohammed a ajouté que toute voie permettant de réaliser pleinement les objectifs à long terme de l’Accord de Paris doit inclure l’agriculture et les systèmes alimentaires, d’où émanent plus d’un tiers des émissions.

Une « révolution des algues »

Les algues, « la plus grande ressource inexploitée dont nous disposons sur la planète », constituent une solution innovante à certains des défis mondiaux les plus urgents auxquels l’humanité est confrontée aujourd’hui.

C'est ce qu'a déclaré Vincent Doumeizel, Conseiller principal sur les océans auprès du Pacte mondial des Nations Unies. Il a expliqué à ONU Info lors de la COP28 qu'il menait la « révolution des algues » qui pourrait aider à lutter non seulement contre la crise climatique, mais aussi contre les crises alimentaire et socio-économique.

M. Doumeizel a souligné l'énorme capacité des algues à absorber le carbone et à constituer un substitut durable aux plastiques, ce qui en fait un excellent outil pour l'atténuation du changement climatique et la restauration de la biodiversité.

« Les algues peuvent pousser très vite – jusqu’à 40 centimètres par jour pour atteindre 60 mètres de haut. Il s’agit donc d’une véritable forêt et elle absorbe plus de carbone que la forêt amazonienne », a-t-il dit.

L’expert des océans a déclaré que les systèmes alimentaires obsolètes sont parmi les plus grands contributeurs au changement climatique, à la perte de biodiversité, à la rareté de l’eau, à l’épuisement des sols et à l’injustice sociale.

Selon lui, la culture d'algues en Afrique de l'Est a déjà prouvé sa capacité à créer des emplois et à autonomiser les femmes en Afrique de l'Est, où « 80% des revenus vont aux femmes ».

M. Doumeizel a noté que, bien qu'elles soient riches en nutriments et en protéines, presque toutes les algues que nous consommons aujourd'hui sont ramassées sur les plages.

Il a souligné la nécessité de « changer le récit » de peur et de malheur présenté aux générations futures et de « leur donner de l’espoir et de l’optimisme ». « Je crois que si nous apprenons à cultiver l’océan, on se souviendra de nous comme de la première génération sur la planète capable de nourrir l’ensemble de la population tout en atténuant le changement climatique, tout en restaurant la biodiversité et en réduisant la pauvreté ».

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