Guerre Iran Israël : les vrais enjeux du conflit

Donald Trump et Benyamin Netanyahou ressemblent à ces bonimenteurs de foire, qui grugent tout le monde en laissant penser qu’ils ne sont pas d’accord. Deux bateleurs qui se sont distribués les rôles pour parvenir à leurs fins. Le problème est que dans cette partie de poker menteur, la paix au Moyen-Orient et, plus largement dans le monde, est en jeu.

L'ancien Premier ministre écossais Hamza Youssouf : « Ils ont menti sur l'Irak et maintenant ils veulent vous faire croire que l'Iran est la prochaine menace. Ils nous ont dit que Saddam Hussein possédait des armes de destruction massive. Cette guerre a tué plus d'un million de personnes. À la fin, il n'y avait plus d'armes de destruction massive, juste des mensonges, du pétrole et des effusions de sang sans fin. C'est maintenant au tour de l'Iran, qui possède l'une des plus grandes réserves de pétrole au monde. Cela ne vous rappelle-t-il pas quelque chose ? »

Dans la nuit du 13 juin 2025, Israël a lancé l’opération “Rising Lion”, un raid aérien massif et ciblé contre l’Iran. En riposte, des centaines de missiles et drones iraniens se sont abattus sur Israël, plongeant la région dans une crise aux proportions inédites.

Israël a mobilisé près de 200 chasseurs F-35, ciblant à la fois des infrastructures de commandement des Gardiens de la Révolution et des sites nucléaires à Natanz, Fordow, Ispahan et Téhéran. L’État hébreu a justifié cette attaque comme une "action préventive", destinée à enrayer une capacité de frappe imminente de l’Iran.

Les raisons de cette guerre :

Depuis quinze ans maintenant, les gouvernements israéliens successifs ont fait de l’Iran leur bête noire, la mère de tous les maux en annonçant que l’Iran tiendra la bombe dans deux semaines.

Mais qu’est-ce qui explique qu’aujourd’hui que cette guerre a été déclenchée ?

1 Pétrole et gaz :

L'Iran est le 3e producteur mondial de gaz naturel après les États-Unis et la Russie. L'Iran produit environ 275 milliards de mètres cubes (mmc) de gaz par an, soit environ 6,5 % de la production mondiale, et le consomme sur son territoire, les sanctions l'empêchant d'exporter du gaz. L'Iran partage ce gisement avec le Qatar, qui l'appelle North Field.

L'Iran représente environ 3 % de la production pétrolière mondiale. La moitié de ses exportations — soit près de deux millions de barils par jour — est destinée à la Chine. Toute perturbation de cette production entraînera donc des répercussions notables sur les marchés.

2 L’Iran membre BRICS

À partir du 1er janvier 2024, l’Iran rejoint les BRICS.

Les BRICS+ sont un groupe de dix pays qui se réunissent en sommets annuels : le Brésil, la Russie, l'Inde, la Chine, l'Afrique du Sud, l'Iran, l'Égypte, les Émirats arabes unis, l'Indonésie et l'Éthiopie, ayant pour but de rivaliser avec le Groupe des sept (le G7).

Ensemble, les pays des Brics ont une population de 3,24 milliards d'habitants et leurs revenus nationaux combinés s'élèvent à 26 billions de dollars. Cela représente 26 % de l'économie mondiale.

Donald Trump a donc prévenu ses adversaires et les a même menacés. « Le temps où les pays BRICS essaient de se détourner du dollar pendant que nous restons les bras croisés est terminé. Nous exigeons que ces pays s'engagent à ne pas créer une nouvelle monnaie BRICS, ni à soutenir une autre monnaie pour remplacer le puissant dollar américain, sinon ils seront confrontés à des droits de douane de 100 %. » En clair, les pays refusant d'utiliser le dollar se verront de facto interdire l'accès à la première économie du monde qui représente près d'un quart du PIB de la planète.

3- Un partenaire clé pour la Chine

La République populaire de Chine trouve dans l'Iran un débouché pour ses exportations et une source d'approvisionnement pour ses besoins croissants en énergie.

Pékin, qui achète 90 % du pétrole exporté par l’Iran

 « L’action militaire d’Israël contre l’Iran a provoqué une escalade soudaine des tensions au Moyen-Orient, ce qui inquiète profondément la Chine. Nous nous opposons à toute action qui porte atteinte à la souveraineté (…) d’autres pays », a déclaré, mardi 17 juin, le président chinois, Xi Jinping.

4- Un partenaire d’avenir pour la Russie

L'Iran et la Russie sont des alliés stratégiques et forment un axe dans le Caucase aux côtés de l'Arménie. La Fédération de Russie est également le principal fournisseur d'armes et d'armements de l'Iran.

Les échanges commerciaux entre les deux pays ont atteint 4 milliards de dollars américains en 2023 et ont enregistré une augmentation de 12,4 % au cours de la période de janvier à août 2024.

5- Un point de passage crucial de la route de la soie

Après être devenue première économie mondiale en 2014, la Chine cherche à accélérer ses échanges avec l’ensemble des États du continent eurasiatique, et a donc pour nouvelle ambition de faire revivre les anciennes routes de la Soie. L’Iran est un point crucial dans ce projet.

6- L’Iran et la dédollarisation.

Les Brics ont été créés pour trouver des moyens de réformer les institutions financières internationales telles que le FMI et la Banque mondiale dominées par les américains et les européens, afin de permettre aux économies émergentes de mieux se faire entendre et d'être mieux représentées. Le bloc des BRICS ambitionnait depuis plusieurs années de réduire sa dépendance au dollar américain via un plan de dédollarisation sur dix ans.

En particulier, la Russie et l'Iran ont presque totalement éliminé l'utilisation des devises étrangères dans leurs échanges bilatéraux. Plus précisément, au cours des huit premiers mois de l'année, plus de 96 % de la valeur des échanges a été réglée en monnaie nationale.

Israël est le bras armé des USA dans la région pour bloquer l'émergence d'un pôle multipolaire et le mouvement en marche de la dédollarisation. Les USA veulent changer le pouvoir en place par un pouvoir soumis à ses diktats et qui sert la sécurité de son unique allié stratégique Israël.

La victoire de l’Iran serait une victoire pour l'Eurasie et une défaite pour l'ordre atlantiste.

La guerre est une poursuite de l'activité politique par d'autres moyens. Comme toutes les guerres, ce conflit n'est pas religieux mais stratégique énergétique et financier.

 Abdessatar Klai