Habib Essid a-t-il tout dit ou cache-t-il son jeu ?

Habib Essid a-t-il tout dit ou cache-t-il son jeu ?

 

Malgré des figures de style et un sourire contrit, le chef de gouvernement Habib Essid est apparu ce mercredi soir au cours de son interview télévisée diffusée par la chaîne privée « Attessia » comme un homme blessé, mais également un homme conscient que son sort est scellé et qu’il n’a aucune chance d’obtenir le renouvellement de la confiance de l’ARP qu’il va pourtant solliciter solennellement au cours d’une séance plénière dont la date n’est pas encore fixée. Il ne manque pas de révéler que plusieurs personnes et des représentants du parti lui ont demandé de démissionner soit en s’adressant directement à lui soit en l’appelant directement à démissionner. L’un d’eux l’a même menacé d’être « malmené » s’il n’obtempère pas à cette injonction. Il s’est refusé d’en révéler l’identité ni l’appartenance partisane mais a tenu à dire qu’il ne s’agit pas d’un proche collaborateur du président de la république.

Marquant du début jusqu'à la fin sa considération et son respect au Chef de l’Etat dont il a défendu le droit de présenter l’initiative du gouvernement d’union nationale, il lui a néanmoins reproché  la manière dont il a présenté l’initiative sans en parler avec lui, ce qui nous aurait fait gagner beaucoup de temps ainsi que le timing choisi pour la rendre publique. « Nous étions à la veille du Ramadan et alors que les menaces terroristes étaient à leur niveau le plus élevé », a-t-il dit.

A aucun moment,  démissionner de ses fonctions n’a effleuré son esprit, a-t-il précisé. Par principe, mais aussi parce que je suis un soldat au service de la patrie et un soldat ne quitte jamais son poste l’arme à la main sinon il est considéré comme un déserteur et il est passé par les armes, dit-il dans une image qu’il veut parlante.

Il explique son choix de demander à l’ARP de lui renouveler sa confiance, par le fait qu’à part la démission qui est pour lui exclue c’est la voie la plus rapide pour régler la question. La motion de censure requiert des délais et la présentation d’un nouveau chef de gouvernement alors que la requête du président de la république de poser la question de confiance au gouvernement comporte un risque pour le président, explique-t-il.

Il estime néanmoins que la responsabilité de tout le gouvernement est engagée et que s’il y a échec il est collectif. C’est la raison pour laquelle il a choisi la voie parlementaire. Pour autant il prend sa part de responsabilité mais pas toute la responsabilité. Un message clair aux ministres appartenant aux partis politiques qui sont membres de son équipe. Tout en affirmant qu’il n’a pas entendu l’un de ses ministres dire que le gouvernement a échoué, sinon il aurait pris à son encontre  les mesures idoines ave  « vigueur », Habib Essid n’a pas semblé gêné par le comportement de ses ministres politiques. « Ils sont venus au gouvernement par la politique et c’est normal qu’ils agissent en politique », dit-il comme pour les excuser.

Le Chef de gouvernement a défendu le bilan de son gouvernement sur les plans de  la sécurité, de la paix sociale  et de l’achèvement des projets en suspens. « Comme je l’ai toujours dit notre bilan c’est le demi-verre plein et le demi-verre vide ». Il a ajouté pour l’anecdote  que depuis que l’initiative est sur la table, « le demi-verre plein est en train de s’évaporer ».  Interrogé sur le conseil  qu’il devrait dispenser à son successeur, il a dit usant de la même image « je lui demande de ne pas verser le contenu du demi-verre plein » comme pour dire que ce serait dommage de jeter  le bébé avec l’eau du bain.

Même s’il est conscient que son sort  est scellé puisqu’il adresse ses conseils à son successeur, quand bien même il se refuse de voir parmi ses ministres quelqu’un de la trempe à lui succéder, il dit qu’il n’est pas du  genre à se contenter d’une paisible retraite après son départ de la Kasbah. « Je dirai présent si mon pays a besoin de moi y compris pour être candidat à l’élection présidentielle », dit-il de la façon la plus claire.

Raouf Ben Rejeb  

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