Hafedh Caïd Essebsi à la présidence de l’ARP : est-ce bien raisonnable !

  Hafedh Caïd Essebsi à la présidence de l’ARP : est-ce bien raisonnable !

 

L’information s’est répandue comme une trainée de poudre : Hafedh Caïd Essebsi le directeur exécutif de Nidaa Tounés a l’intention de présenter sa candidature à l’Assemblée des représentants du peuple pour prendre la place laissée vacante par le député Hatem Ferjani nommé secrétaire d’Etat chargé de la diplomatie économique à la faveur du récent remaniement ministériel.

Jusque là rien d’anormal même si une élection partielle est rarissime s’agissant d’un mode de scrutin de liste où les vacances sont pourvues par les suivants. Sauf que Hatem Ferjani est élu de la circonscription de l’Allemagne réservée aux Tunisiens de l’étranger. Ce parachutage, quand bien même il est juridiquement possible pose des problèmes sur les plans éthique et politique. Car il prive les émigrés tunisiens habitant l’Allemagne d’avoir leur propre représentant au Parlement comme la loi le leur offre la possibilité.

Parachuter un chef de parti dans une circonscription de l’étranger ne peut être aisément admis par l’opinion publique qui y verra un moyen détourné utilisé par les hommes politiques pour se partager les postes de responsabilité.

L’on se rappelle cependant que Hafedh Caïd Essebsi qui n’était alors que chargé des structures à Nidaa Tounés avait été placé tête de liste de Tunis1 aux élections législatives de 2014. Mais ce choix avait soulevé à l’époque un tollé tel que le président du parti son propre père Béji Caïd Essebsi avait dû le faire remplacer.

Cet épisode explique qu’à la première élection partielle venue, le désormais numéro 1 du parti vainqueur des élections de 2014 ait voulu prendre sa revanche sur le sort et rallier l’assemblée des représentants du peuple pour ce qui reste de son mandat qui prend fin en octobre-novembre 2019.

Mais de là à suggérer comme l’ont fait certains que Hafedh Caïd Essebsi lorgne la présidence de l’ARP et que son entrée au Parlement à la faveur de cette élection partielle est une première étape dans son offensive pour occuper le Perchoir, au Palais du Bardo, c’est aller trop vite en besogne.

Car Mohamed Ennaceur le président de l’ARP a été élu pour toute la durée de la législature. Pour le remplacer, il faut, selon l’article 20 du règlement intérieur de l’assemblée, lui retirer la confiance par la majorité absolue des membres (c'est-à-dire 109) par la plénière sur la base d’une demande écrite dûment justifiée adressée au bureau de l’assemblée par un tiers au moins de ses membres (soit 71 députés).

Des conditions difficiles à remplir à moins que le président de l’ARP ne démissionne de ses fonctions, ce qui rend les choses beaucoup plus faciles. Mais cette éventualité semble exclue, car le président de l’ARP n’est pas du genre à déserter.

Il ne faut pas oublier cependant que l’élection présumée d’un successeur à Mohamed Ennaceur ne donne forcément pas un président nidaïste. Car en 2014, c’est parce que le groupe du Nidaa était le plus nombreux que la présidence lui a échu. En 2018, car il faut 90 jours après la vacance pour organiser une élection partielle, il n’en sera pas de même. Désormais c’est Ennahdha qui est le premier groupe à l’Assemblée et peut-être juge-t-il qu’il est de son droit de prétendre au Perchoir.

Mais même si le parti islamiste cède sa place, peut-on imaginer un instant que le président intérimaire de la république, en cas de vacance de la magistrature suprême pour une quelconque raison soit le propre fils du président en exercice. Cela ne s’est jamais vu nulle part et encore moins dans une démocratie naissante.

Alors de grâce, que ceux qui cherchent à faire répandre de telles informations jugent les effets pervers de ce qu’ils propagent sur une opinion publique déjà bien saturée de politique-fiction.

RBR

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