Immigration clandestine: La tragédie des jeunes africains continue
« Nous sommes tous des immigrés, il n'y a que le lieu de naissance qui change. »
L’immigration clandestine de jeunes africains vers l’Europe est devenue un véritable fléau ces vingt dernières années. Elle a engendré des milliers de morts et de disparus depuis lors. La Méditerranée se pose aujourd’hui comme la principale voie de sortie pour ces populations fuyant, pour certains, les affres de la guerre dans leurs différents pays, ou la famine, et pour d’autres, le chômage, ou à la recherche d’une vie meilleure.
Des chiffres effrayants
Plus de 3 000 migrants sont morts l'an dernier en mer alors qu'ils tentaient de rejoindre l'Europe, soit le double du bilan enregistré en 2020, a indiqué l'ONU vendredi. « Sur ce total, 1 924 personnes ont été déclarées mortes ou disparues sur les routes de la Méditerranée centrale et occidentale, tandis que 1 153 autres ont péri ou ont été portées disparues sur la route maritime de l'Afrique du Nord-Ouest vers les îles Canaries », a déclaré une porte-parole de l'agence de l'ONU pour les réfugiés (HCR) à Genève, Shabia Mantoo. En 2020, 1 544 décès avaient été signalés pour les deux routes.
« Fait alarmant, depuis le début de l'année 2022, 478 personnes supplémentaires ont péri ou ont été portées disparues en mer », a relevé Mme Mantoo. Selon le Haut-Commissariat de l'ONU pour les réfugiés, la pandémie de Covid-19 et les fermetures de frontières qui en ont découlé ont eu un impact sur les flux migratoires, de nombreux réfugiés et migrants se tournant vers des passeurs pour tenter de rejoindre malgré tout l'Europe.
La plupart des traversées en mer se font à bord de bateaux gonflables bondés et en mauvais état, indique le HCR. Nombre de ces embarcations se dégonflent ou chavirent, entraînant le décès des occupants. « Le voyage en mer depuis les États côtiers d'Afrique de l'Ouest, tels que le Sénégal et la Mauritanie, et les îles Canaries est long et périlleux et peut durer jusqu'à 10 jours », a souligné la porte-parole du HCR, lors d'un point de presse régulier des agences de l'ONU à Genève. De nombreux bateaux ont dévié de leur route ou ont disparu sans laisser de traces dans ces eaux.
Il y a une semaine, au moins 17 migrants ont péri dans le naufrage de quatre embarcations devant les côtes du centre-est de la Tunisie, on a appris ce dimanche 24 avril. Les bateaux, des embarcations de fortune en très mauvais état, étaient partis des côtes proches de Sfax dans la nuit du 22 au 23 avril. Selon les témoignages des migrants secourus, « il y avait entre 30 et 32 personnes sur chacune des embarcations ».
Quelles solutions pérennes ?
Empêcher l’immigration est impossible. Au Royaume-Uni, l’ancien premier ministre David Cameron, en France, l’ancien Président Nicolas Sarkozy, ont voulu le faire, mais naturellement ils étaient incapables. Les frontières sont poreuses, on ne peut pas éviter que des gens entrent. Les autorités en sont conscientes mais n’osent pas le dire. C’est un non-dit en Europe. Bien des politiciens parlent encore de sceller les frontières. Les discours nationalistes et populistes présentent les pays comme des maisons dont on pourrait fermer les portes et les fenêtres. Mais cette image est trompeuse : un pays est plutôt comme une ville, on peut difficilement bloquer toute entrée. A moins bien sûr de placer un soldat tous les dix mètres avec ordre de tirer à vue !
Les solutions proposées par la classe dirigeante européenne ne sont pas à la hauteur des enjeux, relevant en grande partie de la communication et d’enjeux électoraux.
L'avenir de ces gens est chez eux et nul part ailleurs. Il faut une « arme économique » pour juguler l’hémorragie des flux migratoires et stopper l’obsession des jeunes Africains d’émigrer à tout prix. Une arme à dégainer rapidement, sans modération et avec toutes sortes de munitions (annulation de la dette, suppression des subventions, augmentation de l’aide réelle au développement...) car la solution à ce problème passe par la lutte contre la pauvreté sur le continent africain.
L’Afrique doit pouvoir vivre de ses cultures et de ses ressources ; aussi est-il nécessaire de revoir les politiques de subventions des produits agricoles occidentaux, qui pénalisent les agriculteurs africains, de revoir la cotation des produits africains à partir des bourses européennes qui fixent leurs prix, et de promouvoir des mesures visant à l’abolition ou à l’abaissement de barrières douanières qui entravent les importations des produits africains en Europe.
Il faut renforcer les capacités gouvernementales des Africains à lutter contre la pauvreté. A cet égard, il a lieu d’encourager les forces de changement sur le continent, pour l’émergence de nouveaux dirigeants issus d’élections libres et transparentes, ayant à cœur de sortir leurs concitoyens de la misère et utilisant les ressources internes et externes pour endiguer cette pauvreté.
Il faut aussi arrêter de soutenir des dirigeants corrompus qui pillent les États africains pour alimenter leurs comptes en banque, ou les réseaux maffieux franco-africains qui usent des élections frauduleuses et de la répression pour perdurer au pouvoir, n’offrant aucun espoir à la jeunesse sur ce continent.
Ce n’est qu’avec une telle arme économique, en soutien à des gouvernements démocratiques engagés résolument dans la lutte contre la pauvreté, que l’on pourra freiner ces drames de l’émigration qui défraient toutes les chroniques et alimentent l’actualité internationale.
Je finirai par rappeler que « nous sommes tous des immigrés, il n'y a que le lieu de naissance qui change ».
A.K
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