L’écrivain juif tunisien Albert Memmi est décédé à l’orée de son centenaire

L’écrivain juif tunisien Albert Memmi est décédé à l’orée de son centenaire

 

L’écrivain juif tunisien Albert Memmi a tiré sa révérence dans la nuit du vendredi à samedi à Paris à l’orée de son centenaire qu’il aurait fêté le 15 décembre 2020.

Natif de la Hara, le quartier juif de Tunis, ayant passé ses premières années à l’impasse de Tronja, dans le quartier de Bab Souika, Albert Memmi fut élève du Lycée Carnot avant d’y enseigner la philosophie. Même s’il a soutenu le combat pour l’indépendance de la Tunisie il décida à l’indépendance de quitter son pays natal pour s’installer en France.

Ses écrits restent cependant marqués par cette époque. Ses deux livres phares sont : La statue de Sel a été préfacé par le prix Nobel de littérature Albert Camus et Portrait du colonisé précédé du portrait du colonisateur, préfacé par le grand philosophe Jean-Paul Sartre.

Faisant son éloge dans sa page facebook, l’ambassadeur de France Olivier Poivre d’Arvor écrit :

« Albert Memmi n’est plus, parti dans la nuit de Paris de ce vendredi 22 mai, une nuit de shabbat, entre celle du Destin et de l’Aïd el Fitr. Paix à son âme !

Il est parti loin de Tunis où il était né, il y a exactement 100 ans, loin du quartier de la Hara, et de l’impasse Tronja. Loin de cette Tunisie qui l’a tant façonné et a fait éclore une œuvre unique, magnifique, puissante, complexe et parfois incomprise, tant l’arrachement à la terre natale et la marque de sa judéité y sont forts. « Un écrivain de la déchirure », comme le dit si bien Guy Dugas à qui l’on doit un travail remarquable sur l’auteur et l’édition de son journal intime, à compter de la seconde guerre mondiale.

Né en 1920, disparu en 2020, élève de Jean Amrouche au lycée Carnot, enseignant de philosophie à Tunis, Albert Memmi nous a donné de grands livres. La Statue de Sel, préfacé par Albert Camus, et Portrait du colonisé, précédé du portrait du colonisateur, préfacé par Jean-Paul Sartre… mais aussi le Nomade Immobile et tant de beaux textes.

Contemporain des combats de Frantz Fanon et d’Aimé Césaire, Albert Memmi a accompagné et soutenu avec conviction le mouvement nationaliste et l’indépendance tunisienne mais quittera son pays natal en 1956.

J’espérais, depuis trois ans, qu’il puisse venir rencontrer une fois encore ses amis tunisiens et nous parler de cette œuvre-vie si imposante. Lors d’une dernière correspondance, il y a quelques semaines, il avait décliné cette offre, en raison de son grand âge, mais adressait à la Tunisie de son cœur et de sa chair un salut chaleureux.

Après Leïla Menchari, il y un peu plus d’un mois, c’est un immense monstre sacré qui vient de disparaître, un passeur de ces deux rives, entre Tunis et Paris, entre nos deux pays, nos langues, nos croyances, notre Méditerranée. Avec sa disparition, c’est un continent d’Histoire et de cultures partagées qu’il nous appartient, face à l’ignorance, au repli sur soi et au refus de l’Autre, de faire vivre plus que jamais avec intensité ».

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