Loi électorale : le Président Béji Caid Essebsi soumis à une forte pression
A peine a-t-il quitté l’hôpital militaire après y avoir séjourné suite à un malaise, le président de la république Béji Caid Essebsi a signé, deux jours après le décret portant convocation du corps électoral aux deux scrutins législatif, le 6 octobre et présidentiel le 17 novembre. Il a, également, décidé de proroger l’état d’urgence d’un mois. Ce faisant, il a coupé court à toutes les spéculations.
Le chef de l’état a profité de cette occasion pour adresser un message télévisé aux Tunisiens et au monde entier pour leur annoncer intelligemment qu’il reste le garant de la Constitution et que, en tant que tel, il se doit de respecter le processus électoral.
Reste maintenant la promulgation de la loi électorale sous sa nouvelle formule après son amendement par l’Assemblée des représentants du peuple et sa validation par l’Instance provisoire du contrôle de la constitutionnalité des projets de loi. Certaines conditions y ont été ajoutées à la dernière minute par la coalition au pouvoir comme pour exclure des adversaires politiques que les sondages d’opinions sont unanimes à placer aux premiers rangs. Il s’agit du candidat déclaré à la présidentielle Nabil Karoui et son parti « Au cœur de la Tunisie », d’Abir Moussi et son Parti destourien libre, le candidat indépendant Kais Saied ainsi que du mouvement « Aish Tounsi » et sa présidente Olfa Terras. Ces mêmes amendements ne sont pas bien vus par les principaux partenaires de la Tunisie, l’Union européenne en particulier, qui ont beaucoup misé sur la réussite de l’expérience tunisienne et qui veulent « sauver le soldat Tunisie », pour emprunter l’expression de l’ambassadeur de l’UE, Patrice Bergamini. D’ailleurs, ce dernier est sorti de sa réserve diplomatique pour dresser, dans un entretien au journal le Monde, un tableau presque noir de la situation tunisienne. Il a critiqué « les positions d’ententes et de monopoles qui entravent une transition économique aujourd’hui à la traîne par rapport à la transition politique ».
A leur tour, les médias européens, français notamment, ont commenté ces amendements qualifiés de controversés et « qui pourraient empêcher plusieurs candidats de poids de se présenter à la présidentielle ». C'est pour cela qui'ils ont, d'après ces médias, déclenché « d'importants remous politiques ».
Sur le plan interne, les résultats du dernier sondage d’opinons réalisé par Sigma Conseil et publié le 10 courant dans le journal le Maghreb, ont révélé que 62,5% des Tunisiens sont contre l’amendement de la loi électorale, alors que 17% seulement ont affirmé être pour. Dans un précédent article signé RBR, « Loi électorale, Essebsi signera, signera pas », il est clairement dit que « le texte est controversé puisqu’il comporte des dispositions qui ne font pas l’unanimité des spécialistes en droit constitutionnel puisqu’elles semblent taillées sur mesure pour barrer la route devant certains candidats. BCE a toujours plaidé contre l’exclusion et il s’agit d’une forme d’exclusion qui doit le mettre mal à l’aise. Le texte comporte aussi des dispositions portant sur la rétroactivité de la loi qui doivent indisposer le grand juriste qu’il est ».
C’est pourquoi, les regards se tournent vers le Président de la République pour l’appeler à ne pas promulguer cette loi considérée comme scélérate, voire liberticide.
Béji Caid Essebsi qui se relève lentement de sa maladie se trouve sous une forte pression. En vertu de l’article 81 de la Constitution, il dispose de quatre jours, à partir de la date de réception de la décision de l’IPCCPL, pour la promulguer telle quelle. Comme il peut la renvoyer pour une deuxième lecture devant l’ARP, et ce dans un délai de cinq jours. Elle doit, dans ce cas, être de nouveau adoptée par les trois cinquièmes des députés et obtenir au moins 131 voix. Ce qui pourrait prendre beaucoup de temps que prévu et, par conséquent, impacter le calendrier électoral déjà fixé par l’Isie. Les candidatures pour les élections législatives devront intervenir à partir du 22 juillet courant.
Le président a, également, devant lui une autre option : soumettre le projet au référendum. Mais elle semble exclue.
La décision du Président devrait tomber avant lundi prochain. Tout le processus en dépendra.
B.O
Votre commentaire