Tunisie: Victime de discrimination au faciès, une universitaire dénonce la banalisation du racisme dans la rue

Tunisie: Victime de discrimination au faciès, une universitaire dénonce la banalisation du racisme dans la rue

Victime il y a quelques jours de propos racistes alors qu'elle tentait simplement de monter dans un taxi avec les membres de sa famille début août 2025, une enseignante universitaire, Fatma Ben Barka Messaoudi, a publié sur les réseaux sociaux un témoignage poignant sur le racisme en Tunisie et sa banalisation dans les rues.

Dans une interview qu'elle vient d'accorder à "Nawaat", la victime raconte une altercation avec un taxiste, sur fond de racisme décomplexé, assumé et justifié même par une soi-disant loi.

Alors qu'elle montait dans un taxi avec sa belle-mère, elle entend le chauffeur baragouiner quelque chose et lui demande: "vous êtes tunisiens ou pas". Et l'universitaire étonnée par la question, tente de comprendre et répond du tac au tac: "Et si on n'était pas Tunisiens", "Je ne vous prends pas", lance le chauffeur sans la moindre vergogne. Il tente même de se justifier en invitant une prétendue loi qui interdirait de prendre les... "Africains".

Irritée et vexée, Fatma descend du taxi et demande ironiquement au chauffeur s'il venait d'Europe de l'Est, car visiblement la Tunisie ne se trouve pas sur le continent asiatique ou européen.

En colère et se sentant humiliée par cette discrimination, Fatma se révolte et explique à "Nawaat". "Je veux savoir l'existence de cette loi. Et si une loi pareille existe, j'aimerais savoir. Car cela voudrait dire qu'en tant que Tunisiens noirs, nous devons constamment nous justifier et présenter nos pièces d'identité aux transporteurs. Et comment les chauffeurs de taxis feraient la différence entre un Tunisien noir et un Subsaharien. Parce que visiblement, certains ne prennent même pas la peine de s'arrêter pour les mélanodermes. C'est une pratique très courante vécue par les Noirs en Tunisie, qu'ils soient tunisiens ou étrangers.

"Et quand une personne subsaharienne est en situation régulière, comment réagissez-vous ? Et nous, les Tunisiens noirs, que devons-nous faire ?", lance Fatma qui dénonce avec force un racisme insupportable vécu par de nombreux Tunisiens noirs. L'universitaire qui rejette cette discrimination dangereuse fondée sur la couleur de la peau, lance un appel aux juristes pour connaître ce prétendu " texte de loi que les chauffeurs disent appliquer".

"Je veux comprendre quel est ce texte de loi que les chauffeurs de taxi affirment appliquer ? Ce que j’ai vécu n’est pas un incident isolé. D’autres Tunisiens noirs y sont confrontés. Ceux qui cherchent à minimiser ou à justifier, ayez honte", lance-t-elle sarcastique.

Sur les réseaux sociaux, l'universitaire a bénéficié d'une vague de soutiens d'internautes. "Je souhaite d’abord exprimer toute ma solidarité à Dr Fatma Ben Barka Messaoudi, et à et ceux qui subissent des discriminations raciales en Tunisie. Refuser l’accès à un service public parce qu’on présume, à tort, l’origine subsaharienne d’une personne est un acte de racisme intolérable qui heurte profondément nos valeurs d’égalité et de fraternité", lance une internaute.

Et d'ajouter: "Il est essentiel de reconnaître que la « charge raciale » existe bel et bien en Tunisie, même si nombre de nos concitoyens le nient encore. Le racisme constitue une atteinte aux droits humains et doit être combattu sans relâche. Que jamais plus une personne ne soit jugée ou exclue pour la couleur de sa peau, c’est ainsi que nous bâtirons une Tunisie plus juste et plus fière de sa richesse plurielle".

Notons que depuis la vague d'arrivées de Subsahariens dans nos murs, le racisme et les pratiques discriminatoires se sont banalisées. Raison pour laquelle, Fatma a lancé ce cri du coeur pour dénoncer avec force ces comportements d'un autre âge, ce racisme décomplexé qui est devenue monnaie courante dans les rues de Tunis.

O.D.

Pour suivre l'interview en entier sur Nawaat.org, cliquer : ICI
 

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