Interdiction des sacs en plastique: Vers un compromis entre les industriels et l’administration

Interdiction des sacs en plastique: Vers un compromis entre les industriels et l’administration
 
 
Au commencement, une décision du ministre de l’Environnement et du Développement Durable, Néjib Derouiche. Celle-ci consiste à interdire, par une loi en cours d’élaboration, l’importation, la fabrication et la distribution des sacs en plastique non biodégradables et à infliger aux contrevenants une amende allant jusqu’à 12 mille dinars. 
 
Cette décision, attendue logiquement au regard d’initiatives similaires prises par l’Union européenne et par plusieurs pays africains, n’a pas été du goût de la Chambre syndicale nationale des fabricants-transformateurs de plastiques relevant de la centrale patronale (UTICA) qui l’a qualifiée de « décision hâtive, arbitraire et non responsable ». 
 
Et pour cause. L’industrie du plastique en Tunisie contribue à 3% du PIB, compte plus de 100 entreprises et procure 30.000 emplois directs. Pour toutes ces raisons, la Chambre estime que cette industrie « ne peut pas être, du jour au lendemain, rayée du tissu industriel».
 
Les experts, généralement, partisans généralement des solutions à rendement économique se sont ragés du côté des industriels et ont déploré la précipitation avec laquelle cette décision a été prise et sur la fâcheuse tendance du ministère de l’environnement à camper  sur ses positions. 
 
Hassine Rhili, expert en développement durable, estime, dans une déclaration à l’Agence TAP,  que «la promulgation d’une loi interdisant l’usage des plastiques ne se fait que par étapes et à long terme, pour pouvoir se débarrasser progressivement de cette matière non biodégradable». Il a tenu à souligner la dimension sociale de cette industrie, rappelant que « des milliers des familles tunisiennes gagnent leur vie de la collecte des plastiques ». 
 
Une solution pointe à l’horizon
 
Dans la perspective de contenir le problème et d’atténuer la tension entre le ministère de l’environnement et les professionnels du plastique, Le ministre de l’Industrie Zakaria Hamad a reçu, mercredi 17 février 2016, des représentants de la fédération nationale de chimie et de la Chambre syndicale nationale des fabricants transformateurs de plastique.
 
Sans remettre la décision de son collègue laquelle pèche par son timing, Zakaria Hamed a assuré que son département « soutiendra les industriels du secteur et oeuvrera à trouver les solutions requises pour sauvegarder le secteur à travers un programme de soutien, de mise à niveau, de recherche et d’innovation  et notamment en les encourageant à produire des produits biodégradables qui préserve la nature ».
 
De leur côté, les représentants de la profession, tout en adhérant au principe de cette décision, ont formulé une seule demande celle « de retarder l’application de cette décision jusqu’à la constitution d’une commission mixte pour trouver des solutions alternatives permettant de sauvegarder les acquis de ce secteur ». Ce qui est fort sage et fort raisonnable.
 
En France, la législation interdisant les sacs en plastique a été adoptée en 2006 mais elle n’a tété appliquée que le 1er janvier 2016. C’est seulement le 4 novembre 2013, que La Commission européenne a adopté une proposition qui impose aux États membres de réduire l'utilisation des sacs plastique légers.
 
Conséquence : les professionnels tunisiens sont dans leur droit d’exiger qu’on leur donne le temps matériel requis « pour se préparer à cette nouvelle donne et pour étudier avec l’administration « des solutions de rechange pour fabriquer des sacs en plastique biologiques et solubles».
 
La décision sera retardée mais elle sera irrévocable
 
Au final, il semble qu’un compromis pointe à l’horizon entre les deux parties. Car autant les professionnels ont besoin de temps pour se réparer autant la décision du ministre de l’Environnement est bien fondée et se défend bien.
 
Est-il besoin de rappeler que s’il ne faut qu'une seconde pour fabriquer un sac en plastique, ce sac sera utilisé seulement 20 minutes en moyenne mais polluera les écosystèmes pendant des siècles ? 
 
Effectivement, les sacs plastiques posent de gros problèmes pour la biodiversité marine : dans la mer, ils ressemblent beaucoup trop aux méduses et sont donc mangés, entre autres, par les cétacés : dauphins, tortues marines et oiseaux qui s'étouffent ou s'étranglent. 
 
Pour y remédier, certaines entreprises ont donc mis au point des sacs plastiques dégradables, fragmentables, bio fermentables, oxodégradables ou des sacs en plastique EPI. Seulement, avec le temps, ces sacs de seconde génération se sont avérés à leur tour inefficaces.  Ils se fragmentent en millions de particules sous l'effet des vagues, du vent et du soleil puis se concentrent au gré des courants marins pour former ce que les écologistes appellent  "soupes de déchets". 
 
En outre, ils sont avalés par les animaux marins (oiseaux, poissons, crustacés...) qui les confondent avec le plancton avec comme corollaire, les toxines et plastiques ainsi ingérés finissent dans nos assiettes et nous empoisonnent à notre tour...  A y penser, quel cauchemar ! 
 
Face à cette pandémie du plastique, plusieurs pays africains ont pris l’heureuse initiative d’interdire l’usage des sacs en plastique. Il s’agit, entre autres,  de l’Afrique du sud, Rwanda, Érythrée, Ouganda, Tanzanie, Gabon, Kenya, Togo, Maroc, Mauritanie. L’Algérie et la Tunisie se sont engagées, depuis le mois de janvier 2016, à élaborer des législations interdisant l’utilisation des sacs en plastique. 
 
Il s’agit, à la fois, d’un coup dur pour les contrebandiers en ce sens où 80%  des sacs vendus en Tunisie sont importés illégalement d’Algérie, mais aussi d’une opportunité heureuse pour relancer la confection artisanale du couffin classique.
KIM
 
 

Votre commentaire