La Femme Tunisienne aux premières loges des combats nationaux

La Femme Tunisienne aux premières loges des combats nationaux

 

La Tunisie célèbre non pas une, mais deux fois ses femmes dans l’année: le 8 mars (journée internationale des Droits de la Femme)  et le 13 août, à l’échelle nationale pour célébrer le Code du statut personnel (CSP).

Le Code du Statut Personnel  (CSP) consiste en une série de lois progressistes tunisiennes, promulguées le 13 août 1956 par décret beylical puis entrées en vigueur le 1er janvier 1957, visant à l’instauration de l’égalité entre l’homme et la femme dans nombre de domaines. Le CSP est l’un des actes les plus connus du Premier ministre et futur président Habib Bourguiba près de cinq mois après l’indépendance de son pays.

Il donne à la femme une place inédite dans la société tunisienne et dans le monde arabe en général, abolissant notamment la polygamie, créant une procédure judiciaire pour le divorce et n’autorisant le mariage que sous consentement mutuel des deux époux.

Soixante et un ans après sa promulgation le 13 août 1956, le CSP mérite-t-il encore que l’on s’y intéresse ? Force est d’admettre qu’après plus d’un demi-siècle, il fait toujours figure d’exception et continue d’occuper dans la région arabe et maghrébine une place tout à fait à part. Aucun des codes du statut personnel ou de la famille qui lui ont succédé ne peut lui être comparé, pas même la Moudawwana marocaine (المدونة), remaniée en 2004. Plus que par ce qu’il accorde, le CSP est remarquable par ce qu’il rejette. C’est qu’il a poussé, à nul autre pareil, sa logique séculière en refoulant le droit musulman du champ des sources de légalité et en l’évacuant du système de validité formelle de ses prescriptions, donnant ainsi au droit de la famille tunisienne vocation à l’autonomie législative et à l’émancipation normative. Aucune condition d’islamité ou de conformité à la chariâ ou à une quelconque école juridique de l’islam ou à une opinion prévalente d’un rite n’est exigée.

Le successeur de Bourguiba, Zine el-Abidine Ben Ali, ne remet pas en cause le CSP et lui apporte même des modifications qui le renforcent, en particulier avec l’amendement du 12 juillet 1993.

La loi « historique et pionnière » contre les violences faites aux femmes.

Le 26 juillet 2017, la Tunisie vote une loi « historique et pionnière » adoptée par l’Assemblée des Représentants du Peuple (ARP). Elle renforce la protection des femmes victimes de violences et abolit des dispositions rétrogrades, comme la possibilité pour un violeur d'épouser sa victime mineure pour éviter les poursuites. Selon le nouvel article 227 bis, est puni de 6 ans d'emprisonnement quiconque a des rapports sexuels avec une mineure de moins de 16 ans avec son consentement, de 5 ans d'emprisonnement quiconque a des rapports sexuels avec une fille de plus de 16 ans et de moins de 18 ans avec son consentement. Autre mesure, l'interdiction d'employer des mineures en tant qu'aides ménagères qui sera dorénavant sanctionné de 3 à 6 mois de prison.  L'âge de la maturité sexuelle a été pour sa part élevé à 16 ans au lieu de 13 ans.

Mais cette politique féministe et d’égalité, s’inscrivant incontestablement dans une politique de modernisation du pays, reste confrontée aux mentalités conservatrices d’une partie de la société tunisienne influencée par la montée de l’islamisme politique.

Présentes aux premières loges lors du combat pour l’indépendance, dans la construction de la Tunisie moderne et lors de la Révolution qui a chassé Ben Ali, les femmes tunisiennes dont le statut avant-gardiste a toujours été  considéré comme un cas à part au Maghreb, dans les pays arabes redoutent sa remise en cause et mis en danger par les islamistes qui veulent la renvoyer au foyer et à la soumission.

Détenant le taux de participation le plus élevé de femmes au parlement dans le monde arabe, la Tunisie a reçu le prix du Forum mondial des femmes parlementaires au titre de l’année 2015. L’Assemblée des Représentants du Peuple compte 67 femmes sur un total de 217 députés soit un taux de 30,88% qui représente le taux le plus élevé dans le monde arabe mais aussi en Afrique. Le premier gouvernement  Youssef Chahed compte 8 femmes (6 ministres et 2 secrétaires d'Etat) sur 41. Ca fait presque les 20%. On est encore loin de la parité parfaite.

Dans sa participation héroïque à la vie de la nation, se mêle le courage, la ténacité et l’amour de la patrie qui sont autant  de qualités que possède la femme tunisienne. Celle-ci  doit plus que jamais être considérée comme un acteur politique économique et social à part entière, ayant les mêmes droits et les mêmes devoirs que  l’homme, particulièrement dans cette période de reconstruction du pays.

Les tentatives de faire reculer les droits de la femme, le13 août sera encore une fois l’occasion de faire entendre sa voix. Mais au-delà de ce symbole, il s’agit d’un message adressé à tous ceux qui doutent encore aussi bien de la volonté de la femme tunisienne que de ses capacités à affronter tous les défis actuels et à venir.

Chacune de vous est la mère patrie. Vous êtes la fierté et l'avenir de la Tunisie.  

Bonne fête à vous Mesdames. Le combat pour l’égalité des droits continue pour supprimer les dispositions discriminatoires envers les femmes qui existent encore dans la loi tunisienne, concernant l’héritage notamment.

A.Klai

 

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