La Tunisie l’a échappée belle, mais de grâce épargnons-nous cette théorie du complotisme à deux sous

 La Tunisie l’a échappée belle, mais de grâce épargnons-nous cette théorie du complotisme à deux sous

 

Le 27 juin 2019 la Tunisie a vécu une journée des plus mouvementées de son histoire. Cela personne ne peut le contester, puisque deux attentats dirigés contre les forces de sécurité ont eu lieu presque simultanément en plein Tunis, alors qu’au même moment on apprenait que le président de la République a été transporté dans un état critique à l’Hôpital militaire suite à un malaise aigu.

Ce fut une véritable épreuve pour les Tunisiens tenus en haleine devant ce coup dur du destin. Y avait-il un lien entre l’aggravation de l’état de santé du chef de l’Etat, commandant suprême des forces armées et les deux attentats.

D’aucuns ont tenté de tirer sur la comète en tentant de trouver des liens. Pour les uns le président de la République a eu son malaise en apprenant les informations sur les attentats de Tunis. Pour les autres, ayant su le malaise du chef de l’Etat puisqu’il a été transporté une première fois au même établissement hospitalier, les groupes terroristes ont mis en exécution un plan de déstabilisation en lançant leurs attaques simultanées au moment où la nouvelle de son grave malaise a été rendue publique.

Evidemment ces spéculations sinon ces élucubrations n’ont pas de sens. D’abord, du fait que le risque terroriste n’existe pas et qu’une action du genre de celle ayant eu lieu jeudi dernier est tout à fait prévisible. Les groupes terroristes ayant vu leur capacité de nuisance se réduire comme peau de chagrin du fait de la vigilance des forces sécuritaires et militaires, pouvaient à tout moment tenter des actes spectaculaires contre ces forces par esprit de vengeance et parce que leur marge de manœuvre se réduit de jour en jour.

Mais ils ne pouvaient que recourir à des actes lâches qui ne peuvent qu’échouer devant la détermination des vaillants gardiens de la République. Du reste le bilan des deux attentats kamikaze a fait plus de victimes parmi les assaillants que parmi les sécuritaires ou les civils visé. Certes, un martyr c’est un mort de trop et on aurait souhaité qu’il n’y ait point de perte. Ça ne donne que plus de valeur au sacrifice des hommes et des femmes qui sont dans les premières lignes de défense de la patrie.

La Tunisie l’a échappée belle, disent certains. C’est certainement vrai, car l’épreuve était dure et le moment était particulièrement éprouvant. Mais c’est dans ces tréfonds que notre pays a trouvé les réserves pour faire échouer les plans machiavéliques de ceux qui lui veulent du mal. Les Tunisiens se sont levés comme un seul homme pour condamner ces attentats lâches.

Au moment où le kamikaze actionnait sa ceinture explosive dans une artère commerçante de Tunis, ils étaient nombreux à entonner l’hymne national et à crier leur colère contre ces terroristes qui ne réussiront jamais à porter atteinte à ce vivre-ensemble bien tunisien qui n’est jamais affecté par les tentatives d’une minorité qui n’a pas sa place dans le tissu social.

La meilleure réponse, les Tunisiens l’ont donnée en vaquant sans crainte à leurs occupations et en investissant jusque tard dans la nuit les rues, les cafés et les commerçants de l’Avenue Habib Bourguiba la bien nommée.

La Tunisie l’a échappée belle parce que les institutions ont fonctionné comme un métronome peut être même mieux que d’ordinaire. Les services de sécurité, l’armée, la justice étaient sur le qui-vive aux aguets pour que rien ne puisse se passer qui mettrait en danger le pays et sa population.

Pour certains trois hommes ont émergé du lot pour défendre la Tunisie en ces heures difficiles. On a cité dans l’ordre le ministre de la défense nationale, Abdelkrim Zbidi, le président de l’Assemblée des représentants du peuple, Mohamed Ennaceur et le secrétaire général de l’UGTT, Noureddine Taboubi. On ne peut que se féliciter que des patriotes de la trempe des grands hommes d’Etat se soient mobilisés au service de la patrie à un moment crucial où on a besoin d’eux.

Mais ils n’étaient pas les seuls. Je citerai pour ma part et en premier le Chef du gouvernement Youssef Chahed qui, toutes affaires cessantes est allé à la salle des opérations du ministère de l’Intérieur avant de se rendre sur l’Avenue Bourguiba avec courage et sans crainte. Chahed s’est rendu au chevet du président de la République et a tenu à rassurer les Tunisiens au moment où les rumeurs les plus folles sur l’état de santé du chef de l’Etat circulaient sur certains médias malintentionnés et étaient reprises par les réseaux sociaux.

La contribution d’un autre homme a été aussi déterminante. Je veux parler du ministre du Tourisme René Trabelsi. Après avoir fait une longue promenade sur l’Avenue Habib Bourguiba pour montrer que la sécurité y était bien assurée, il s’est rendu à Paris pour faire une excellente interview sur une chaine française d’information en continu Cnews où il a eu les mots justes pour rassurer les touristes étrangers. Fait sans précédent, les Tour-operators étaient nombreux à lui téléphoner pour l’assurer de leur solidarité, puis aucune annulation de réservation n’a été enregistrée.

Certes des défaillances de la communication ont été constatées notamment au niveau de la présidence de la République avec un communiqué alarmant sur la santé du chef de l’Etat et une compétition qui n’a pas de raison d’être entre deux des conseillers de la présidence. La Kasbah n’a pas été sans reproches lui aussi puisqu’aucun point de presse n’a été organisé pour mettre fin aux spéculations. Mais on peut trouver des circonstances atténuantes aux uns et aux autres, occupés qu’ils étaient à colmater les brèches.

Néanmoins laisser se propager la théorie du complot est tout à fait contraire à la réalité des faits. Certains ont franchi allègrement les lignes rouges en parlant d’intoxication sinon d’empoisonnement du Chef de l’Etat. Peut-on croire de telles divagations ?

Maintenant qu’il est sorti d’affaire et qu’une amélioration de son état de santé laisse penser à une guérison que nous espérons la plus prompte possible, il n’est pas possible de laisser dire n’importe quoi. Certains ont aussi cru que même le président de l’ARP Mohamed Ennaceur était visé puisque c’est à lui qu’échoit la présidence par intérim en cas d’empêchement total du président de la République.

Mais comme l’a expliqué fort bien le 1er vice-président de l’Assemblée Abdelfattah Mourou, si le président de l’ARP était lui aussi empêché ce n’est pas le vice-président qui le supplée mais l’assemblée se doit d’élire un président. Le reste n’est que des extrapolations absurdes et déraisonnables.

Mais il y a un fait que l’on doit relever c’est que l’absence de la Cour Constitutionnel s’est fait sentir de façon on ne peut plus claire. S’il y a quelque chose qui doit être faite et sans délai c’est que les différents groupes parlementaires se mettent d’accord le plus rapidement possible sur les trois membres de la Cour qui restent à élire afin que le processus s’enclenche pour l’élection des membres par le Conseil supérieur de la magistrature. Il deviendra alors facile l’installation du CC puisqu’il ne restera plus que les membres à désigner par le président de la République. Il est dès lors possible la mise en place de cette Cour Constitutionnelle avant les échéances électorales.

A quelque chose malheur est bon dit fort justement le dicton. Les rudes épreuves que la Tunisie a dû traverser en une journée ont montré que notre pays a de solides ressorts pour traverser les turbulences. Mais de grâce, épargnons –nous la théorie du complotisme à deux sous et œuvrons à rendre plus fort et plus uni notre front intérieur. C’est notre cohésion et notre unité qui sont le mur le plus solide sur lequel viennent s’échouer les velléités des ennemis de la nation.

RBR

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