Pakistan: Un séisme fait jaillir du fond de la mer l'île "Zalzala Koh"
Les habitants de Gwadar, port civil et militaire dans le sud-ouest du Pakistan, ont déjà baptisé la nouvelle île qu'ils peuvent admirer depuis trois jours de la plage : Zalzala Koh. Un nom tout à fait approprié puisqu'il signifie "la montagne du séisme".
Cette bosse géante émergée de la mer d'Arabie, est apparue après le tremblement de terre de magnitude 7,7 qui a durement frappé le pays, mardi 24 septembre. Ressenti jusqu'en Iran et en Inde voisins, le séisme a provoqué des centaines de morts.
Selon les premiers témoignages recueillis à Gwadar, Zalzala Koh mesurerait environ 80 mètres de long et 30 de large. Les pêcheurs et les curieux qui se sont approchés de ce monticule marin d'une hauteur de près de 20 mètres parlent "d'une île de boue, de sable et de roches, parsemée d'algues et de pierres jaunes et constellée de poissons morts".
Une naissance d'autant plus étonnante que Gwadar est à des centaines de kilomètres de l'épicentre du séisme situé à Awaran, ville de la province du Baloutchistan.
Cette distance importante fait dire aux spécialistes que Zalzala Koh ne provient pas des déplacements classiques et souvent définitifs de la terre au voisinage d'une faille, car au-delà de 200 kilomètres, les mouvements deviennent minimes pour un tremblement de terre de cette magnitude.
UNE ÎLE À L'ESPÉRANCE DE VIE LIMITÉE
Il pourrait plutôt s'agir d'une conséquence de la propagation des ondes sismiques. Cette énergie qui se déplace est susceptible de déstabiliser un sol sous-marin peu consolidé, ouvrir des fractures à sa surface et libérer les poches de méthane qui y sommeillent. Le méthane est un gaz très répandu puisque toute matière organique qui se décompose en produit.
"Si cette hypothèse de volcan de boue se confirmait, on pourrait imaginer que de la brèche ouverte à la surface des fonds sous-marins aurait jailli une sorte de mélange liquide et solide, un fluide comme un ciment léger, qui serait remonté à la surface", explique Pascal Bernard, chercheur à l'Institut de physique du globe, à Paris, qui veut toutefois rester prudent.
Zalzala Koh aurait donc été créée par un amas des sédiments marins, de boue et de roches, poussé à l'air libre sous la pression du gaz. L'équipe de l'institut pakistanais d'océanographie qui s'est rendue sur l'île a d'ailleurs indiqué y avoir trouvé de fortes concentrations de méthane. Pour preuve, les bulles qui remontent à la surface s'enflamment dès qu'on approche une allumette.
A la différence de nos îles de granit, Zalzala Koh ne devrait pas avoir une espérance de vie très longue. Elle pourrait se disperser d'ici à plusieurs mois. A Gwadar, certains se souviennent d'une île qui avait aussi jailli des eaux après un séisme, il y a quatre ans. Mais elle avait vite disparu.
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