Partenariat public privé: contrats de concession (BOT)

La loi n°2008-23 du 1er avril 2008, relative au régime des concessions, objet d’une conférence internationale

organisée récemment à Tunis, à l’initiative du Centre de Conciliation et d’Arbitrage de Tunis, est l’un des maillons de la chaîne de la réforme législative engagée dans le domaine économique pour renforcer l’efficience économique et optimiser la gestion des deniers publics en particulier.

Tel que institué par ladite loi, le régime de la concession repose sur un ensemble de principes de base visant à asseoir des fondements solides pour le partenariat entre les secteurs public et privé. Il vise à préserver la propriété publique à travers la préservation par l’Etat de sa propriété.

La loi tunisienne a en effet choisi le régime BOT (Build- Operate – Transfer), c’est-à-dire le concessionnaire procède dans une première phase à la construction des installations et des créations sur le domaine public. Puis il transfert cette propriété à l’Etat et l’exploite par la suite dans le cadre du contrat signé avec la partie publique.

Selon ce régime, le concessionnaire est obligé de rendre à l’Etat le domaine public sur lequel sont construites les installations, objet d’exploitation.

De cette façon, l’Etat garde durant toutes les étapes du régime de la concession la propriété de l’immobilier ainsi que les bâtiments qui y sont construits et tout particulièrement, lorsqu’il est question du domaine public maritime, inaliénable par nature aux personnes privées.

Le régime tunisien repose également sur la transparence et la liberté de la concurrence. Ainsi le choix du concessionnaire ne se fait pas qu’après appel à la concurrence.

La loi a également mis en œuvre des exceptions limitées et bien étudiées pour le principe de la concurrence.

Selon l’article 4 de ladite loi, le concessionnaire peut être choisi soit après consultation ou par voie de négociation directe lorsque l’appel à la concurrence a été déclaré infructueux, ou lorsqu’il y a urgence à assurer la continuité du service public ou même lorsque l’exécution de l’objet du contrat se rapporte à des prestations dont l’exécution ne peut être confiée qu’à une personne déterminée ou à une activité dont l’exploitation est exclusivement réservée à un porteur de brevet d’invention.

De l’autre côté, le régime tunisien garantit pour les concessions les droits légitimes du concessionnaire qui consistent notamment en la déduction de la valeur des bâtiments construits du montant devant être versé aux organismes publics et en le droit à réclamer un dédommagement en cas de la résiliation non justifiée du contrat ou en cas de non respect des procédures et des délais juridiques requis.

Contrôle continu
En effet, le régime de la concession reconnaît à l’autorité concessionnaire le droit de contrôler de manière continue les modalités d’exploitation du service public, d’intervenir dans la fixation des prix arrêtés à l’intention des consommateurs et de réviser les clauses du contrat de concession chaque fois que la conjoncture économique exige..

En tout cas ces nouveaux principes sur lesquels repose la loi de l’année 2008, l’ont rendu une loi référentielle à l’échelle maghrébine.

La concession peut-elle être qualifiée d’investissement ?

Selon la loi en vigueur, « le concessionnaire peut bénéficier d’incitations et d’avantages et transférer les gains de ses investissements réalisés dans le cadre de la concession.

La participation des étrangers au capital de la société créée pour la réalisation de la concession est possible par voie d’importation de devises et ce, conformément à la réglementation des changes et à la législation en vigueur relative aux investissements étrangers ».

Ceci étant la loi en vigueur permet aux concessionnaires de bénéficier des avantages et des investissements prévus dans les législations relatives aux investissements en vigueur.

Il s’agit essentiellement du code d’incitations aux investissements tel que promulgué par la loi 93-120 du 27 décembre 199, dont le champs d’application s’étend aussi bien aux tunisiens qu’aux étrangers.

D’autre part, l’article 5 de la loi de l’année 2008, autorise les étrangers à participer aux concessions. Cette participation se fait par « importation de devises » afin de participer au capital de la société créée pour la réalisation de la concession.

Ainsi, la voie de la participation des étrangers aux concessions est l’importation des devises en Tunisie pour participer au capital d’une société.

L’article 5 ne vise pas explicitement le cas de réinvestissement, lorsqu’une entreprise au lieu de transférer son bénéfice ou son capital à l’étranger décide de le réinvestir en participant à des opérations de concessions.

Dans la mesure où la finalité économique est la même, il semble que le réinvestissement est admis..

Plusieurs Etats réalisent des investissements à l’étranger directement ou par le biais d’entités publiques.

Récemment, plusieurs fonds d’investissements publics – en particulier ceux des Etats du Golfe ou de la Chine – sont devenus enclins à réaliser des investissements à l’étranger.

En outre, il n’est pas exclu que certaines organisations internationales ou des entités publiques internationales seraient intéressées par des concessions en Tunisie.

On peut citer à cet égard la société arabe d’investissement constituée par 18 Etats arabes dont l’objectif est d’investir les fonds arabes dans différents secteurs économiques.

Il faut dire que les concessions sont des investissements risqués et sensibles. Risqué, car l’investisseur ne peut rentabiliser son investissement qu’après une période d’exploitation qui pourrait être longue.

Sensible, parce que les concessions sont intimement liées à la souveraineté et l’activité étatique. Le contrat est conclu avec une personne publique.

Il concerne les services publics, matière dont la gestion pourrait changer selon le temps et les gouvernements. Le besoin de sécurisations et de garanties est primordial pour la réussite de la concession.


CH.KH