En coupant la poire en deux, Mechichi joue l’apaisement, mais la crise demeure

En coupant la poire en deux, Mechichi joue l’apaisement, mais la crise demeure

 

Le chef du gouvernement Hichem Mechichi a évité le passage en force que les plus radicaux des composantes de sa « ceinture politique » l’ont incité à y recourir. Pour autant il n’a pas renoncé pas au remaniement ministériel auquel il a procédé.

Ainsi, il a décidé de couper la poire en deux. Puisque les ministres nommés et confirmés par le Parlement ne sont pas désignés à leurs postes faute d’avoir été nommés par décret présidentiel et d’avoir été invités à prêter serment devant le président de la République.

Le chef du gouvernement a même décidé de surseoir à la restructuration du gouvernement qui a pourtant fait l’objet d’une délibération en conseil des ministres comme le prévoit la Constitution.

Néanmoins, les ministres ayant été visés par le réaménagement gouvernemental ont été révoqués et leurs départements confiés à des ministres en place à titre intérimaire. Ainsi la ministre de la fonction publique, Hasna Ben Slimane hérite du ministère de la Justice. Le ministre des Affaires religieuses, Ahmed Adhoum se retrouve à la tête du ministère des Domaines de l’Etat et des Affaires foncières, un département qu’il a déjà chapeauté. Le ministre du Commerce et du Développement des exportations, Mohamed BouSaïd est porté à la tête du ministère de l’Industrie, de l’Energie et des Mines. Le ministre des Technologies de la communication, Fadhel Kraïem prend la tête du ministère de l’Agriculture, des ressources hydrauliques et de la pêche et enfin la secrétaire d’Etat aux sports Sihem Ayadi est promue à la tête du ministère de la Jeunesse, des Sports et de l’Intégration professionnelle.

Seul le ministre de la Santé, Faouzi Mehdi se trouve épargné par ces révocations en masse, puisqu’il est maintenu dans ses fonctions. Les efforts qu’il a déployés ces dernières semaines notamment sur le front de l’approvisionnement du pays en vaccins semble avoir donné ses fruits.

Il faut dire que ce ministre, médecin de son état issu des rangs de l’armée n’a pas jeté l’éponge alors qu’il était remplacé dans ses fonctions et a gardé un rythme de travail qui a beaucoup étonné. Son maintien est une bonne décision, car le changement de ministres en pleine pandémie n’a pas été admis par l’opinion publique. On n’aurait pas toléré qu’un cinquième ministre soit nommé à la tête de ce ministère en une année.

En jouant l’apaisement relatif puisqu’il évite le passage en force auquel on l’incitait à recourir, Hichem Mechichi n’a pas, pour autant, réglé la crise institutionnelle qui l’oppose au président de la République Kaïs Saïed qui voit la plupart des ministres qui lui sont proches écartés du gouvernement. Sa démarche peut néanmoins être considérée comme une victoire du chef de l’Etat qui a opposé son véto à la nomination de ministres sur lesquels pèsent selon lui des soupçons de corruption ou de conflits d’intérêt.

Cependant, si les partis soutenant le gouvernement vont accepter même de mauvaise grâce la démarche de Hichem Mechichi, ils ne voudront pas que le veto du président de la République devienne jurisprudence. Ce ne sera à leurs yeux qu’une solution provisoire à la crise. Ils reviendront certainement à la charge pour imposer leurs poulains.

Les partis et blocs formant l’opposition ne seront pas contents non plus, car « le gouvernement du président » auquel ils se cramponnent n’en sera plus un. Hichem Mechichi s’est émancipé définitivement de l’emprise du Palais de Carthage et cela ne satisfait nullement ni le Courant démocrate, ni le Mouvement Echâab qui ont pris la partie de Kaïs Saïed.

Qu’en pensera l’UGTT qui a appelé à l’apaisement ? Cela ne fait pas ses affaires, car le Dialogue national qu’il a appelé de ses vœux se trouve définitivement enterré.

RBR

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