La main invisible de la corruption

La main invisible de la corruption

Par Nouredine Ben Mansour (*)

Aucun pays n’est à l’abri de la corruption et ses effets néfastes sur la société. Elle empêche la population de profiter de la richesse du pays surtout celle provenant des ressources naturelles et le cas du pétrole du sud tunisien est un bon exemple. Les barils sont remplis de pétrole sans passer par des compteurs de débits.

La corruption est la même dans tous les pays avec une différence qu’elle est de moindre importance dans les pays démocratiques où la loi est bien appliquée sans aucun privilège ou distinction.
  
La corruption  ne respecte pas les frontières et se déplace sans visas ou autorisation. Elle touche tous les aspects de la vie et tous les domaines. Elle ne fait pas de distinction économique ou d’importance de la personne. Elle agit vite et invisiblement. Elle est partout et prend toujours de différentes formes et ses manipulations sont diverses et compliquées. 

Presque tous les pays sont affectés par ce fléau à différents degrés de gravité et d’ampleur. C’est un phénomène qui touche tous les pays tous régimes confondus. 

La corruption était un phénomène  ancrée depuis l’antiquité et ses impacts sont différents selon les régimes, les temps et les circonstances. Elle est destructrice sur tous les niveaux sans distinction de priorité. C’est un moyen illégal d’enrichissement et de là il est devenu pour plusieurs circonstances un corridor et un moyen d’autorité indirecte pour les malfaiteurs et les corrompus surtout dans les pays comme la Tunisie où les lois ne sont pas encore bien  respectées convenablement et ce pour certaines raisons subjectives. 

Cette gangrène est l’une des plus dangereuses armes pour la sécurité du pays et aussi elle fausse le pas des autorités publiques et encourage la criminalité et la vengeance aveugle. Aussi, cette défaillance est à l’origine du gaspillage des ressources de l’Etat et freine l’évolution du pays au sens général.
 
Dans l’ensemble, la corruption affaiblit la capacité des honnêtes responsables étatiques à exécuter leurs tâches convenablement sans peur ou partialité. Certains fonctionnaires d’État pourraient être tentés de favoriser certains projets juteux qui rapportent du Bakchich au détriment de ceux qui sont plus rentables économiquement. 

Cette avalanche de fonctionnaires est devenue une habitude bien ancrée dans certaines administrations. Une monnaie courante et un commerce ambulant. Qui paye le plus ou autrement qui graisse les roues comme dit le proverbe. Ces manœuvres corruptives  a bien handicapé l’économie nationale et son développement économique d’une manière qui a créé un chaos social et a sapé les vertus civiques. Surtout les riches et une bonne partie d’hommes d’affaires ainsi que ceux de la libre activité ne payent pas correctement et justement leurs impôts. 

L’ensemble du système perd  sa légitimité et son existence. Le mécontentement de la majorité des citoyens face au régime de Ben Ali bien connu par la corruption et la dictature était une cause principale qui a  ranimé le feu du soulèvement contre ce régime. 
 
Nous sommes actuellement dans la pire phase de la corruption car elle s’intensifie de jour en jour d’une manière qu’elle est devenue une partie intégrante des affaires de toutes natures. 

Pour encadrer ce fléau, une instance nationale de lutte contre la corruption a été mise en place (INLUCC)  ainsi que d’autres lois à savoir  la loi protégeant les lanceurs d’alerte contre les fraudeurs et les corrompus. 

L instance de lutte contre la corruption installée depuis un bon moment n’a en réalité  rien accompli de grand. C’est une sorte de boîte à lettres. Les causes sont multiples et surtout le manque de compétences nécessaires et aussi elle n’était pas en mesure de s’attaquer en temps réel aux faits de corruption bien présents dans la société dans ses diverses activités. 

Le président de l’instance de lutte contre la corruption a dénoncé en été dernier la libanisation de la vie politique du pays et la guerre par procuration de puissances régionales qui fianceraient certains partis politiques locaux. Cette instance a eu les moyens nécessaires pour un bon fonctionnement. Elle abrite vingt bureaux régionaux et 260 personnes actifs. Le président de la dite instance a été limogé par l’ancien chef de gouvernement Fakhfakh et on ne connait pas exactement les causes de cet acte.

Est-ce que c’est un règlement de comptes ? Des soupçons et des attaques des uns et des autres. Où est la vérité ? Patience on l’aura avec le temps.

En Tunisie, la corruption a pris une envergure jamais vue. Partout on parle de cette gangrène qui sévit presque sur tout le territoire du pays. On parle de sa gravité mais on ne fait rien de sérieux pour combattre ce mal qui avance à pas géants. Tous les domaines se plaignent  de cette maladie incurable pour le moment.  Le secteur public - étatique est bien touché à différents degrés. 

Le dossier de la corruption est le plus important dans l’actuelle période car c’est la base de tout le développement du pays au large sens. C’est le baromètre et le thermomètre de la paix sociale. Les causes de ce mal sont diverses mais l’objectif est le même : l’enrichissement par des moyens illégaux et tordus le plus rapidement possible. 

Une importante action urgente s’impose: changer le comportement actuel des services publics d’une manière qui fait disparaitre tout acte ou tentative de corruption,  s’attaquer pleinement et en continu à ce fléau à tous les niveaux des différents services publics et privés. 

La corruption est inhibitrice pour le développement dans le sens économique et social. Elle est le pire moyen de gaspillage des deniers public et encourage en continu et dans tous les temps à prendre les fausses et les  mauvaises décisions qui ont un impact négatif sur la bonne marche du pays dans ses divers domaines. C’est un diable à cornes. 

Par le temps plusieurs pays ont bien compris les conséquences de ces manœuvres corruptives surtout de la part des gens influents ; publics et privés. Du simple citoyen au plus instruit ; il  a remarqué et constaté que la corruption est le moyen le plus sûr qui engendre la misère et la pauvreté avec le temps. Aussi si la corruption s’intensifie l’État serait affaibli et fragilise tous les systèmes dans les divers domaines et de là par le temps on aura un peuple inconscient qui ne soucie plus de la bonne  marche du pays et ne fait plus confiance aux représentants de l’Etat et à ses diverses institutions.

Le manque de transparence alimente la corruption et intensifie ses effets néfastes sur toute la population et par le temps deviendra une habitude bien enracinée dans une partie des couches de  la société. 

C’est du cancer qui se propage sans visas ou obstacles. Du passe partout surtout auprès des pays du tiers monde. Le combat contre la corruption est un combat éternel sans merci. Les corrompus et les fraudeurs changent toujours de tactiques et de stratégies. Des fugitifs et des invisibles qui n’aiment pas la clarté et la lumière du jour. Tout se fait en nocturne et en silence ils agissent habilement et discrètement moyennant pots de vin et mercenaires  mis à leurs dispositions  en  exécutant les consignes sans discussion ou obstruction.

La corruption est une équation à  deux inconnus à savoir un corrompu et un corrupteur et dans un certain cas il y a un troisième inconnu : l’intermédiaire. Il est urgent de s’attaquer pleinement aux vrais problèmes d’impunité de certaines gens et hommes d’affaires qui se livrent à la corruption des hommes politiques  et les chaines télévisées dont certaines ne sont que l’arme secrète de ces fraudeurs et qui leur assurent une protection indirecte.

Chaque année mille milliards de dollars sont versés comme pots de vin et 2600 milliards représentant un taux de 5% du PIB mondial sont détournés de plusieurs façons et moyens illégaux. La corruption est la cause principale de la gouvernance défaillante et  encourage les réseaux criminels en employant des moyens et des méthodes sophistiques.

Il est bien connu qu’une fois la corruption se focalise dans un pays ses conséquences négatives se focalisent sur l’Etat de droit et fragilise la vie sociale y compris la sécurité dans son large sens.

Aussi il ne faut oublier que certaines  corruptions passent par deux formes, à savoir  une  lors des négociations des affaires surtout étatiques sous forme de pots-de-vin et une deuxième au moment de mettre en application des contrats sous forme de facilitations.

Malgré les progrès réalisés, la lutte contre la corruption en Tunisie présente encore des lacunes. Les critiques déplorent ainsi les compétences insuffisantes de ladite instance et craignent qu’elle ne soit pas en mesure de s’attaquer de manière systématique à la corruption.En outre, le gouvernement tunisien a adopté une stratégie  de lutte contre la corruption mais en réalité  ce n’est qu’une image de propagande et de publicité. Rien d’important n’a été réalisé. La justice manque  aussi de moyens humains et financiers et ne peut donc pas mener la lutte contre la corruption de manière optimale.

(*) Dr.Ing.Gen.

 

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