Législatives en France : une marée mauve et une abstention record

Législatives en France : une marée mauve et une abstention record

 

« Qui l’eût cru ? Qui l’eût dit ? Une formation politique qui n’existait pas il y a deux ans est donc en passe de rafler une insolente majorité à l’Assemblée nationale, bouleversant du même coup un paysage politique que l’on a longtemps pensé immuable », Paul-Henri du Limbert

Les quelque 47 millions d’électeurs français étaient appelés à voter, dimanche 11 juin, pour désigner, lors du premier tour des législatives, leurs représentants à l’Assemblée nationale.

Les résultats : la marée macroniste emporte le vieux monde

Les sondages l’annonçaient depuis plusieurs semaines : La République en marche est arrivée en tête du premier tour des élections législatives. Avec 32,32% des voix, la formation d’Emmanuel Macron se place loin devant ses concurrents.

Le score du mouvement de Macron n’est pas un Tsunami comme l’ont répété en boucle les médias français et les sondeurs. Ce mouvement n’obtient que 14% des inscrits sur les listes électorales. Mais profitant du grand nombre de candidats par circonscription, de la division de la Gauche et d’un scrutin majoritaire, le mouvement Macron devrait rafler une grande majorité de sièges dimanche prochain.

Nuances de Candidats

Voix

% Inscrits

% Exprimés

Nb Sieges

La République en marche

6 390 866

13,43

28,21

1

Les Républicains

3 573 381

7,51

15,77

 

Front National

2 990 583

6,29

13,2

 

La France insoumise

2 497 640

5,25

11,02

 

Parti socialiste

1 685 796

3,54

7,44

 

Ecologiste

973 826

2,05

4,3

 

Modem

932 231

1,96

4,11

 

Union des Démocrates et Indépendants

687 162

1,44

3,03

1

Divers droite

625 423

1,31

2,76

 

Parti communiste français

615 553

1,29

2,72

 

Divers

500 608

1,05

2,21

 

Divers gauche

362 326

0,76

1,6

1

Debout la France

265 457

0,56

1,17

 

Régionaliste

204 080

0,43

0,9

 

Extrême gauche

175 442

0,37

0,77

 

Parti radical de gauche

106 287

0,22

0,47

 

Extrême droite

68 326

0,14

0,3

 

 

Avec des projections en sièges prédisant entre 400 et 455 députés sur 577 pour La République en marche, le président « peut se saisir de tous les pouvoirs »

Le chiffre important de la soirée est le taux d’abstention le plus fort que la cinquième république a connu depuis 1958 au premier tour des élections législatives. Il s’élève à 51,3%. Les électeurs des classes populaires ont boudé les urnes.

Du coup tous les leaders politiques de gauche comme de droite, appellent à la mobilisation au second tour. L’objectif est de constituer une force d’opposition au gouvernement de Macron. Ils argumentent que le pays a besoin de pouvoirs équilibrés et non concentrés entre les mains d’un seul parti.

La droite est divisée. D’un côté, des candidats d’une droite constructive qui soutiennent ouvertement la politique du Président. De l’autre la majorité des Républicains, qui souhaite rester dans l’opposition.

Au parti socialiste c’est l’hécatombe qui n’a recueilli que 9,51 % des suffrages exprimés. Est-ce une bérézina ? Un naufrage ? Une déroute ? Le visage du Parti socialiste au soir du premier tour des législatives, c’est peut-être Jean-Christophe Cambadélis qui sait le mieux le décrire. Le scrutin est « marqué par le recul sans précédent de la gauche dans son ensemble et notamment du Parti socialiste », a souligné,

« Sans précédent » en effet, ce coup de balai qui ne va laisser que quelques miettes roses sur le territoire. Les dernières projections donnent entre 20 et 30 sièges au PS et à ses partenaires, contre près de 300 dans la précédente législature. En 1993, année jusque-là connue pour être la plus noire dans l’histoire récente de la formation, 57 députés avaient été élus. Aussi, que le résultat final de 2017 se rapproche de la fourchette haute ou de la fourchette basse, il s’agira du pire score de l’histoire du parti à des élections législatives

C’est un long cortège de socialistes qui ne pourront pas défendre leurs couleurs lors d’un second tour. Le patron du PS, éliminé à Paris, fait partie du cortège des battus, avec les anciens ministres Mathias Fekl, Pascale Boistard, Aurélie Filippetti, François Lamy, Kader Arif, Christian Eckert, Jean Glavany, Isabelle Guigou… Le candidat du PS à la présidentielle, Benoît Hamon, a également été éliminé dès le premier tour. Le Parti socialiste enregistre son pire score à des élections législatives et aura du mal à incarner une opposition à l’Assemblée macroniste.

De côté de la France Insoumise, Jean Luc Mélenchon parvient à éliminer le député socialiste sortant Patrick Mennucci dès le premier tour. Mais au niveau national son mouvement obtient des chiffres moins inférieurs que ceux obtenus lors du premier tour des élections présidentielles du 23 avril 2017. La France Insoumise devient la première force d’opposition de Gauche  sociale et écologiste en qualifiant 60 candidats au second tour.

Le Front Nation espérait une entrée  massive au parlement. Les résultats du premier tour contredisent cet optimisme démesuré. Le FN pâtit lui aussi de l’abstention en subissant un important revers. En obtenant 13,2 %, il reflue nettement en voix par rapport à la présidentielle (21,3 %), comme par rapport aux législatives de 2012 (13,6 % ; 2 990 624 voix en 2017 contre 3 528 663 voix en 2012) , et devrait être privé de groupe à l'Assemblée. Entre la présidentielle et la législative. Plus de 4,7 millions de voix sur les 7,7 millions obtenues au premier tour de la présidentielle se sont évaporées.

Le Parti Communiste continue son déclin et n’obtient que 3%. Sa direction qui ne cherchait qu’à sauvegarder son groupe parlementaire en n’offrant aucun renouvellement au niveau des candidats et du programme. Le PCF avec sa stratégie d’alliances électorales à géométrie variable avec le PS continue sa descente aux enfers et il est voué à la disparition à moyen terme.  Patrick Le Hyaric, directeur de L’Humanité et député européen, ne recueille que 8,76 % des voix dans la 6e circonscription de Seine-Saint-Denis contre 19,35 % pour Bastien Lachaud (FI).

A gauche, Le résultat des rivalités montre toutefois que ceux autour desquels nombre de commentateurs estimaient que le rassemblement de la gauche et des écologistes devait se faire n’étaient pas nécessairement le premier choix des électeurs.

 L’abstention premier parti de France !

L'abstention est très élevée aux législatives avec 51,3%, limitant le nombre de triangulaires et de quadrangulaires et favorisant a priori le parti d'Emmanuel Macron.

Quelles sont les causes de cette crise de la participation citoyenne?

1) Depuis 2002 et l'inversion du calendrier électoral par Lionel Jospin premier ministre qui se voyait déjà président à l'époque à la place de Chirac mais s'est retrouvé éliminé dès le premier tour au profit de JM.LePen, l'abstention ne cesse d'augmenter.

2) Le nombre élevé de candidats, la dilution des étiquettes traditionnelles avec l'arrivée de La République en marche, et le nombre important de nouveaux candidats, contribuent à brouiller les cartes et à rendre assez illisible l'offre électorale.

3) La super médiatisation de l'élection présidentielle les a rendues secondaires (Les médias n'ont pas promu ces élections du tout presque).

4) L'assemblée nationale donne l'image d'une assemblée qui ne contrôle pas le gouvernement et ne fait pas les lois.

5) Rajoutez que les gens sont saturés par la propagande Macron depuis un an, annoncé déjà gagnant avec 400 sièges par les sondeurs qui nous manipulent... Ca décourage énormément!!!

Ce blanc-seing ne signifie toutefois pas une adhésion totale au projet.  Ni ses 24 % du premier tour de l’élection présidentielle, ni les 50 % d’abstention de ce dimanche ne doivent donner l’illusion d’une France convertie à la “macronmania”.

Tout est politique et tout s’est additionné pour éloigner des urnes une majorité de Français. A dimanche prochain en espérant d’assister un sursaut citoyen pour redonner des couleurs à une démocratie française gravement malade.

A. Klai

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