Youssef Chahed ou la préparation d’une candidature qui ne fait plus de doute

Youssef Chahed ou la préparation d’une candidature qui ne fait plus de doute

 

Aucune annonce fracassante, aucun élément d’information que l’on ne connaisse déjà. L’interview du chef gouvernement Youssef Chahed diffusée jeudi soir sur la chaine nationale Al Watanyia 1 ainsi que sur d’autres médias audiovisuels (Hannibal TV, Shems Fm et la radio nationale) est-elle pour autant un exercice inutile.

On en attendait au moins qu’il livre sa décision d’être ou de ne pas être candidat à l’élection présidentielle dont le dépôt de candidature commence demain vendredi. Tout en affirmant qu’il a pris sa décision, il a refusé de la dévoiler publiquement. Mais il ne fait plus de doute qu’il se portera candidat comme le lui demande son parti Tahya Tounes dont il a remercié d’ailleurs les dirigeants d’avoir soutenu sa candidature encore potentielle.

Chahed avait ce jeudi soir deux écueils qu’il a cherché à éviter. Il ne pouvait pas annoncer sa candidature sur une chaine de la télévision publique car cela aurait nourri la polémique qu’il utilise les moyens de l’Etat au service de son ambition. Le second a trait au conflit qu’il avait avec le président défunt Béji Caïd Essebsi dont l’effet pourrait être dévastateur pour la suite de sa carrière.

L’exercice n’était pas facile et Youssef Chahed a tenté tant que faire se peut à dire que sa relation avec le chef de l’Etat disparu avait été apaisée depuis le mois de mars 2019, en rappelant que l’appel lancé par BCE au congrès de Nidaa Tounes de lever le gel qui le frappait était fait en coordination entre eux deux, dans la mesure où le président défunt était soucieux d’éviter l’éparpillement de la famille centriste et démocratique.

En s’appesantissant sur les détails de sa visite au chevet de BCE alors que ce dernier était hospitalisé en soins intensifs et que des rumeurs sur son décès parvenaient aux rédactions de certains médias, Youssef Chahed ne voulait pas seulement apporter un démenti aux informations publiées notamment par l’hebdomadaire Jeune Afrique sur « ses conditions d’une vacance du pouvoir ». Il tenait surtout à faire la démonstration que l’ancien chef de l’Etat n’avait jamais refusé de le rencontrer au cours de ses derniers jours comme la rumeur en avait couru.

Chahed était conscient des incidences négatives de ces rumeurs surtout après la ferveur populaire qui avait accompagné le deuil suite au décès de BCE et il voulait s’en débarrasser. Sa tristesse était réelle et non feinte et ses larmes lors de la cérémonie officielle des funérailles, que les journalistes-interviewers ont relevé sont le signe d’une émotion personnelle intense.

La seule information qu’il donnera de sa relation avec BCE fut celle relative à la promulgation de la loi portant amendement de la loi électorale. « Le président m’a fixé rendez-vous pour le jeudi, soit 24 heures avant la fin du délai, mais ce rendez-vous a été annulé à la dernière minute. » Est-ce à dire que Caïd Essebsi avait l’intention de signer le texte et qu’il s’était ravisé à la dernière minute ? Il ne le dira pas se contentant de qualifier cela d’ « énigme ». Mais de la loi elle-même, il dira qu’il s’agit d’un dossier clos.

Par ailleurs, Il n’a pas manqué aussi de mettre en évidence sa contribution à la passation en douceur du pouvoir suite au décès du président Caïd Essebsi soulignant par la même occasion les témoignages qu’il a reçus de vive voix des hautes personnalités étrangères venues en Tunisie à l’occasion de ces funérailles nationales.

Si une partie importante de l’interview a été consacrée à cette préoccupation, l’autre partie était dédiée au bilan de son gouvernement qui célébrera dans quelques jours ses trois ans. « Dans ma première déclaration devant le Parlement lors du vote d’investiture, j’avais dit que les clignotants ne reviendront au vert qu’à l’horizon 2020 », a-t-il rappelé en donnant les indices de l’amélioration de la situation économique et financière du pays.

Selon lui, il avait pris un Etat en faillite, tant la situation était grave mais ce n’est plus le cas, avec notamment la réduction des déficits, la stabilisation de l’inflation et une amélioration du cours du dinar.

Mais au-delà du bilan lui-même, c’est le programme de la prochaine période dans l’action du gouvernement qui a retenu l’attention. Le modèle de développement n’est pas mauvais car il a permis des avancées dans le domaine économique et il importe de lui imprimer l’impulsion qui lui permettrait de prendre en compte les aspirations futures.

C’est en homme qui ambitionne de relever les défis de la prochaine phase que Youssef Chahed s’est présenté. Les grands projets en matière d’énergies renouvelables, déjà engagés en sont la meilleure illustration.

S’il a évité de révéler ses intentions en ce qui a trait à sa candidature à l’élection présidentielle, il ne fait plus de doute au terme de l’interview que sa décision est prise, ce qu’il a affirmé sans ambages et qu’elle sera positive.

Mais cela ne l’a pas empêché de dire du bien du ministre de la défense nationale Abdelkrim Zbidi qui pourrait être lui aussi candidat à cette même élection.

RBR

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